Revue des revues 9

mardi 29 mars 2016, par Jacques Cossart *

Trois sujets sont abordés dans cette revue des revues et qui reviennent régulièrement parce qu’ils sont au cœur des problèmes brûlants mondiaux. Premièrement, l’ONU, ce « machin » comme disait le général De Gaulle, s’évertue de décennie en décennie à fixer des « objectifs du développement ». Bien que le nombre de personnes étant en dessous du seuil de pauvreté diminue en valeur absolue, il n’en reste pas moins que les inégalités s’accroissent. Deuxièmement, la finance fait toujours parler d’elle car une nouvelle crise menace, mais les banques ont de plus en plus de mal à justifier le bien-fondé de leur secret bancaire. Elles ont cependant encore de grandes capacités pour le préserver. Troisièmement, le climat est devenu un souci majeur. La COP 21 n’a fourni aucune garantie que les bonnes résolutions se traduisent en actes.

1. Alors, ce machin ?

En 2015, la richesse produite par les « pays riches » se chiffre à plusieurs dizaines de milliers de milliards de dollars, le budget des États-Unis est de l’ordre de 4 000 milliards de dollars et celui des Nations unies de moins de 6 milliards de dollars.

Bien entendu, il ne s’agit ici pas de comparer, ex abrupto, ces montants qui présentent des caractéristiques fort différentes. Cependant, quand on entend parler de « machin » à propos de l’ONU, on peut légitiment être quelque peu agacé. Cette énorme « machine » bureaucratique coûterait cher ; serait-ce ici la manifestation d’une totale ignorance ou d’une simple brève de comptoir ? L’autre critique est plus sérieuse, elle porte sur l’efficacité – jugée à juste titre insuffisante – des Nations unies. Pour pallier ce considérable handicap, il ne convient pas de supprimer cette organisation, mais de la réformer radicalement, et de donner à son Assemblée générale le pouvoir de se saisir de toute question de portée internationale en veillant, bien entendu, à ce que ses décisions aient force de loi. C’est ce que tentait de démontrer un livre d’Attac [1] où on lisait, par exemple, « parmi les idées-force de cet ouvrage figure, sans aucun doute, celle de l’exigence absolue d’une régulation publique mondiale qui ne peut qu’être exercée par l’ONU ». Ce n’est pas du tout impossible quand on voit que les G-quelque chose – à condition toutefois de ne pas dépasser 7 – et autres comités Théodule, y parviennent parfaitement. Il est vrai qu’ils défendent les privilèges des propriétaires. Que peuvent donc bien peser les 7 milliards d’êtres humains face à la précellence de quelques milliers ?

Le 25 septembre 2015, les États membres ont adopté les Objectifs du développement durable (ODD). À cette occasion, l’ONU s’est réjouie du très net progrès enregistré pour chacun des huit objectifs du millénaire (OMD). Rappelons que l’amélioration a été mesurée sur les 25 années de la période 1990-2015. La date de 1990 n’est pas anodine, elle prend place au lendemain de la chute du mur de Berlin. Les instances internationales s’alarment alors de la baisse de l’aide publique au développement (APD). C’est ainsi que l’ONU chiffrait, en 1990, l’APD à 61 milliards de dollars courants et en 2000 à 53 milliards de dollars courants. C’est dans ce contexte que les OMD ont été fixés. La sous-alimentation est, à juste titre, un repère essentiel de la marche du monde. On lira dans Insécurité alimentaire : des progrès ? que 200 millions de personnes sont sorties de la sous-alimentation en quelque vingt ans. On ne peut que se réjouir de ce constat. Cependant, il faut rappeler que d’une part, sur la même période, la population mondiale s’est accrue de 1,7 milliard environ ; et que d’autre part, la place de la Chine dans l’amélioration n’a cessé de croître : au début des années 1970, le pays comptait, selon les statistiques existantes, 46 % de sa population sous-alimentée pour descendre à 12 % au début des années 2010. On dénombrait alors, en Afrique subsaharienne, encore plus de 25 % de sa population en sous-nutrition, conduisant, ainsi à une augmentation du nombre d’Africains sous-alimentés. Le PNUD se réjouit d’enregistrer la baisse du nombre d’êtres humains sous le seuil de pauvreté fixé à 1,25 $/jour. Comme on le lira dans Inégalités extrêmes et dans L’aide internationale et la pauvreté, si, dans l’ensemble des pays à faible revenu, le pourcentage de population sous ce seuil a sensiblement diminué en vingt ans, c’est encore malgré tout la moitié de la population survivant dans les pays pauvres qui se situe sous ce seuil. À propos de cette borne de 1,25 $/jour, la Banque mondiale la situe désormais à 1,90 $/jour. Dans un document relatif à l’extrême pauvreté publié le 4 octobre 2015, elle indique que ce relèvement est consécutif aux augmentations des coûts de la vie dans les quinze pays qui servent de base pour l’établissement du seuil en deçà duquel les populations basculent dans l’extrême pauvreté. Ce 1,90 $ PPA [2] vient donc en remplacement du niveau arrêté dix ans plus tôt en 2005 pour, censément, préserver le pouvoir d’achat calculé alors. Dans le document qui vient d’être évoqué, la Banque précise que, malgré l’augmentation du nombre de « extrêmement pauvres » due à ce changement, le chiffre s’établirait en 2015 à 702 millions, soit 9,6 % de la population mondiale ; en 2012, il s’agissait de 902 millions, c’est-à-dire 12,8 % du total mondial. Elle déclare que c’est la première fois que ce taux est inférieur à 10 % de la population mondiale, mais que, pour éradiquer l’extrême pauvreté d’ici 2030, il faudra franchir de nombreux et lourds obstacles.

S’agissant des embûches, on la croit bien volontiers. Dès lors que l’on aborde la question de la pauvreté, se pose, entre autres, la question de sa mesure. En 1990, la Banque mondiale fixe le seuil de 1 $, en dessous duquel on est considéré dans l’extrême pauvreté qui ne permet pas de vivre une vie humaine. Ce 1 dollar était calculé à partir d’un panier de biens et services relevés dans quinze des pays les plus pauvres. À l’époque, la Banque dénombrait 1,9 milliard de personnes subissant ce sort. Ce nombre s’abaisserait donc à 702 millions en 2015, devant survivre avec moins de 1,9 $/jour. Une première observation porte sur le taux d’inflation retenu ; le passage de 1 $ à 1,9 $ correspond approximativement à l’évolution des prix observée aux États-Unis sur la période ; qu’en est-il dans les pays les plus pauvres ? Il est plus vraisemblable que la réalité conduirait à 2,5 $/jour plutôt qu’au 1,9 retenu. Une autre critique plus fondamentale tient à la nature du seuil monétaire pour définir la pauvreté. Le PNUD [3], l’agence chargée de la promotion et du suivi des OMD, donne depuis 1990, avec l’IDH [4], un éclairage beaucoup plus large de la pauvreté. Sans être parfait, tant s’en faut, il offre une meilleure vision de la « vraie vie » en combinant trois indices : le PIB/habitant, l’espérance de vie à la naissance et le niveau d’éducation mesuré en années d’études pour les adultes de plus de 25 ans.

Au-delà de la pertinence du seuil fixé, 1 $, 1,25 $, 1,90 $ ou même 3 $, qui permettra, peut-être, de dire qu’il n’y a plus que 700 millions d’êtres humains vivant sous le seuil défini – en l’occurrence, 1,90 $/jour – il faudra considérablement affiner l’étude pour en savoir davantage sur les différents niveaux de revenu de ces 700 millions ; combien survivent avec la moitié, ou moins encore ? Pour le savoir, il faudrait, pour le moins, que soient définis plusieurs seuils de pauvreté. Par ailleurs, à supposer que puisse être déterminé avec pertinence le nombre de pauvres dans les pays du Sud, quid des nombreux pauvres dans les pays « développés » ? Comment sont recensés les quelque 200 000 sans-abris en France ? Que sait-on de la population vivant dans les 15 pays de l’OCDE présentant un taux de pauvreté [5] supérieur à 10 % ? Où se situent les quelque 50 millions d’États-uniens dénombrés, par le Bureau du recensement, comme vivant sous le seuil de pauvreté de ce pays ?

Pour tenter de mettre en évidence combien l’observation de la pauvreté ne peut être conduite à partir du seul seuil de pauvreté, fût-il fixé à 1,90 $ et établi à plusieurs niveaux, examinons ce qui se passe pour les deux pays figurant aux deux extrémités du classement établi dans les rapports PNUD [6] : le Niger et la Norvège sur la période 2007- 2014.

Année Niger Norvège
IDH PIB $ PPA/habitant IDH PIB $ PPA/habitant
1975 0,236 298 0,853 19022
1990 0,280 235 0,895 28810
2013 0,337 884 0,994 62858

On observe que, sur quatre décennies, le PIB par habitant a été multiplié par près de 3 au Niger et par plus de 3 en Norvège. Mais que peut signifier cette « spectaculaire » augmentation nigérienne quand, au bout du compte, le rapport avec l’indice norvégien est de 1 à 76 ! La situation pour une majorité de Nigériens demeure très grave : 44 % d’entre eux disposent de moins de 1,25 $ par jour et l’indice de Gini, dans le pays, s’établit à 0,346 – il y a bien pire, il est de 0,631 en Afrique du Sud – tandis qu’il traduit beaucoup moins d’inégalités en Norvège avec 0,258.

Si le combat du PNUD est parfaitement respectable, et même obtient des résultats qui sont considérables pour ceux qui meurent de faim, il reste que le système capitaliste repose sur une accumulation sans fin monopolisée par une très faible part de l’humanité ; c’est bien ce système qui se trouve à la source de la redoutable montée des inégalités dans le monde. L’observation des montants accumulés et du nombre de personnes entre les mains desquelles elles se concentrent est analysée chaque année dans un rapport sur Les grandes fortunes. La fortune globale est évaluée dans le rapport 2014, à près de 53 000 milliards de dollars courants [7], partagés entre 13,7 millions d’individus. Ce montant est équivalent à 69 % de celui du PIB mondial de la même année. En 1999, ils étaient 6 millions à avoir accumulé 21 000 milliards de dollars, montant équivalant à quelque 53 % du PIB mondial de l’année. Mais les détenteurs de la véritable fortune sont beaucoup moins nombreux que ces 13,7 millions de riches individus. Ils n’étaient en effet que 128 000 à posséder, ensemble, plus du tiers de la fortune globale, c’est à dire plus de 18 000 milliards de dollars [8]. C’est ce petit nombre de personnes qui dirige le monde. On se reportera à cet égard à une étude particulièrement précise de 2011 portant sur le réseau terriblement interconnecté des transnationales dans le monde [9]. On y voit que sur les 1 318 transnationales recensées, les 50 plus importantes contrôlent 40 % des interconnexions mondiales. Les 128 000 individus considérés comme ultra-riches y interfèrent évidemment à tous les niveaux.

Sans renversement de la compétition mondiale pour la remplacer par une coopération salvatrice, tout porte à croire que l’accroissement des inégalités, les guerres et le dérèglement climatique iront croissant, puisque la pseudo-compétition n’est que le voile recouvrant l’accaparement sans fin pour les plus riches. Bien sûr qu’ils continueront à faire main basse sur les terres à raison de centaines de millions d’hectares au détriment du paysannat et de l’agriculture paysanne qui fournissent pourtant environ 80 % de l’alimentation mondiale ; qu’ils toléreront, voire encourageront, les guerres pour lesquelles, selon les chiffres fournis par la Banque mondiale, ils ont puisé en 2014 dans les fiscalités des divers pays quelque 1 800 milliards de dollars [10] ; qu’ils poursuivront la concentration des richesses entre les mains d’une très faible part de l’humanité, comme l’atteste le graphique reproduit ici.

Ce graphique de la figure 1 a été établi par Oxfam à partir des données fournies en 2014 par le Crédit suisse dans son rapport annuel sur la richesse. On y remarque que, tout au long de la période 2000-2014, plus de la moitié des richesses dans le monde sont détenues par 1 % des individus, tandis que le reste de la population, soit 99 %, a vu, après la crise de 2008, sa part descendre jusqu’à moins de 44 %.

On ne trouvera pas, dans L’aide internationale et la pauvreté, ce graphique toujours issu du rapport Oxfam s’appuyant sur les travaux du Crédit suisse, le graphique reproduit ici. Peut-être paraissait-il par trop invraisemblable, qu’en 2020, 1 % de la population mondiale puisse détenir plus de 54 % des richesses pendant que les 99 % « restant » s’en partageraient 46 % !

Le rapport 2016 d’Oxfam publié le 18 janvier est intitulé, avec une cruelle pédagogie, « Une économie au service des 1 % ». Le sous-titre de cette étude est tout autant explicite, « Ou comment le pouvoir et les privilèges dans l’économie exacerbent les inégalités extrêmes et comment y mettre un terme ». D’une part, la monstruosité du système est brutalement mise en évidence dans le graphique 3 de la page 14, reproduit ci-dessous, où il apparaît que, en 2014, la fortune des 62 individus les plus riches de la planète égale celle des 3,75 milliards les plus pauvres ! Pour faire face à cette gigantesque prévarication, les auteurs indiquent quoi faire ; enfin établir, au niveau mondial une fiscalité juste. Ils formulent plusieurs recommandations et notamment :

  • Partager équitablement la charge fiscale pour uniformiser les règles du jeu.
  • Mettre en place des dépenses publiques progressives pour lutter contre les inégalités.

La revue Les Possibles met très régulièrement en évidence le rôle de la finance dans les inégalités mondiales. Cette affirmation s’appuie sur de nombreuses publications. Il en est une qui mérite d’être signalée car elle vient, en effet, du saint des saints. Le Fonds monétaire international publie, en novembre 2015, une étude qu’il intitule Capital Account Liberalization and Inequality. Ses auteurs ne prétendent pas qu’il ne conviendrait pas de mener de réformes de libéralisation – on est au FMI – mais, avec peut-être quelque malignité, ils précisent que de telles réformes sont incompatibles avec une politique de réduction des inégalités. Leur analyse porte sur 149 pays examinés entre 1970 et 2010. La libéralisation, en facilitant l’accès au crédit, profite très majoritairement, aux plus riches. Elle augmente les crises qui pèsent surtout sur les plus pauvres. Mais encore, elle constitue un facteur important et durable de la répartition des revenus au détriment de ceux du travail. On trouvera dans les pages 19 et suivantes, une série de graphiques qui ne laisse pas d’impressionner.

Les dix-sept objectifs définis dans les ODD vont-ils alors contribuer à inverser la tendance de fond en faveur des très grandes fortunes ? Dans ce catalogue disparate où rien ne paraît oublié, aucun d’entre eux ne pourrait être considéré comme injustifié. Pourtant, à la lecture de ces dizaines et dizaines de sous-objectifs, eux-mêmes détaillés en plusieurs sous-rubriques, on ressent une sorte de tournis. À de nombreux endroits, on trouvera des formules comme « Faire construire des établissements scolaires », ou « Accroître considérablement le budget de la santé » et même « D’ici à 2020, élaborer et mettre en œuvre une stratégie mondiale en faveur de l’emploi des jeunes » ou encore « Stimuler l’aide publique au développement ».

Tout y est, mais comment sera-ce financé ? Pas un mot sur une profonde réforme fiscale harmonisée au plan mondial, rien sur les milliers de milliards de dollars auxquels échappent les plus fortunés. Éluder la question des moyens permettant cet ambitieux programme revient à ne pas permettre sa réalisation ! Vouloir faire de l’APD un véritable instrument de développement est parfaitement louable, mais comment prendre ce souhait au sérieux à l’examen du tableau reproduit ci-dessous ? Vingt-huit des pays les plus riches de la planète consacrent, ensemble, 0,29 % de leur PIB à l’aide au développement ! Selon les chiffres de la Banque mondiale rappelés plus haut, en 2014, les dépenses militaires représentaient 2,3 % du PIB mondial, les États-Unis y consacraient 3,5 % et l’Arabie saoudite 10,8 %. Pour la France, ce ne sont « que » 2,2 % pour les dépenses militaires, et 0,36 % pour l’APD.

La Banque mondiale indique une estimation modélisée des chiffres établis par l’OIT du chômage dans le monde ; ainsi, à fin 2014, on pouvait dénombrer officiellement plus de 400 millions de chômeurs. Plus largement, on peut légitimement se demander si l’augmentation du nombre des pauvres en même temps que celle des ultras-riches apparaîtrait ex nihilo ? Il y a près de deux millénaires et demi, Aristote prétendait que, dans la démocratie qu’il décrivait, les pauvres devaient être « souverains », parce que plus nombreux que les riches ; pour autant, précisait-il par ailleurs, l’égalité exigeait qu’ils n’aient pas davantage de pouvoir ! À cet égard, n’oublions pas que les non-citoyens – en premier lieu les esclaves – de la Grèce antique devaient être dix fois plus nombreux que les citoyens, seuls habilités à intervenir dans la « démocratie » athénienne. Il ne s’agit donc pas d’un anachronisme quand Aristote indique que « les classes élevées, si elles sont habiles et intelligentes, auront soin d’aider les pauvres et de les tourner constamment vers le travail, en leur créant des ressources » [11]. Marx, lui, s’inscrit dans une tout autre analyse. C’est en étudiant le développement de la production capitaliste qu’il fait état de sa fameuse « armée de réserve ». Dans Loi générale de l’accumulation capitaliste, du livre premier du Capital, il traite de la Production croissante d’une surpopulation relative ou d’une armée industrielle de réserve  ; il indique que « la condamnation d’une partie de la classe salariée à l’oisiveté forcée non seulement impose à l’autre un excès de travail qui enrichit des capitalistes individuels, mais, du même coup, et au bénéfice de la classe capitaliste, elle maintient l’armée industrielle de réserve en équilibre avec le progrès de l’accumulation ». Plus de 130 ans après la disparition de l’auteur, jamais peut-être les inégalités n’ont été aussi considérables dans un monde aussi riche.

2. « Le temps du secret bancaire est révolu »

Telle était la vertueuse déclaration, depuis Londres en 2009, de Nicolas Sarkozy, alors président de la République française. Il faut croire que la formule du début du XXe siècle : « la politique n’est pas l’art de résoudre les problèmes, mais de faire taire ceux qui les posent » est encore bien vivace. L’auteur de cet aphorisme, spécialiste en la matière, Henri Queuille, est un grand connaisseur de la vie politique française : il a été membre des gouvernements de 1920 à 1954, pratiquement sans interruption. François Hollande n’a, semble-t-il, pas voulu se trouver en reste ; il affirme en avril 2013 : « Nous allons nous mobiliser contre les paradis fiscaux ». On ne peut que se vivement réjouir de ces engagements des deux derniers présidents français. En effet, selon le rapport déposé le 9 octobre 2013 sur le Bureau de l’Assemblée nationale, « l’optimisation fiscale » détourne, chaque année, quelque 2 000 milliards d’euros, au détriment de l’Union européenne. La totalité, il est vrai, n’est pas cachée dans les paradis fiscaux. Soyons équitables en reconnaissant que des progrès ont été accomplis. Toutefois, d’une part, ils sont le résultat d’un combat acharné de plusieurs ONG européennes, comme on va le voir ici, d’autre part, ces avancées, comme le précisent ces organisations, restent insuffisantes.

En octobre 2015, après une longue période d’études, de concertation et de mandat du G20, l’OCDE publie Plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, connu sous l’acronyme anglais BEPS.

Beaucoup de bruit pour rien ?

Est-ce une avancée dans la lutte contre l’évasion fiscale ? Oui, incontestablement. La fraude et l’évitement sont-ils derrière nous ? Non, tant s’en faut. Au lendemain de la publication du Plan d’action de l’OCDE, la plate-forme PFJ (paradis fiscaux et judiciaires) a publié Mythes et réalités, excellente synthèse montrant que les préconisations de l’OCDE ne suffiraient pas à mettre fin aux pratiques fiscales, notamment celles des transnationales. En matière de fonctionnement du système économique de telle sorte qu’il préserve à la fois population et planète, le capitalisme commet plusieurs « péchés contre l’esprit » – ceux qui, selon l’évangile catholique, ne seront jamais pardonnés – l’un d’eux est le fait des transnationales qui, jusqu’alors, sont toujours parvenues à refuser la globalisation de leurs profits [12]. Depuis près de deux décennies, les syndicats et plusieurs ONG, se battent pour que soit appliquée, au plan mondial, une taxe sur les transactions financières. On pourra lire Taxer les transactions financières ?, sorte de présentation de l’histoire de cette revendication de l’alter mondialisme, en même temps que publication des démonstrations de sa parfaite faisabilité. C’est le premier mythe que dénonce l’étude de PFJ : les filiales des transnationales seraient, selon elles, des sociétés indépendantes, permettant ainsi, notamment, toutes les manipulations qu’autorisent les prix de transfert [13] dans le cadre du principe dit de « pleine concurrence » ; ainsi par exemple, la firme Nestlé présentait en 2014 un chiffre d’affaires de 91 milliards de dollars dont 90 d’exportations... Il serait sans doute intéressant d’examiner l’origine de ses 11 % de résultats nets, la part prise par les centaines de filiales du groupe et l’impôt payé par chacune d’elles. Au plan mondial, les échanges opérés entre les filiales d’une même transnationale approchent la moitié du commerce mondial [14]. Comment les administrations fiscales nationales peuvent-elles contrôler ce maquis, parfaitement connu, en revanche, par la foultitude des experts employés par ces transnationales ? Pourtant, une règle simple permettrait d’éclater cette bouteille à l’encre : affectation par pays de la part du bénéfice mondial en fonction du volume d’activité réel réalisé. On imagine aisément que la firme Nestlé ne pourrait pas prétendre, dans le cadre d’une telle régulation, avoir réalisé le montant de bénéfices annoncé en Suisse avec qui, elle a établi un accord de tax rulings qui, en Suisse comme partout ailleurs, restera secret. Avoir imposé que tout ce qui a trait à ces accords doive rester confidentiel, interdisant, et sanctionnant, toute publicité à leur égard, équivaut tout simplement à supprimer le caractère dissuasif d’un véritable contrôle citoyen. N’entendra-t-on là, à nouveau, l’écho de la célèbre formule « pour que tout reste comme avant, il faut que tout change » ?

Étude Eurodad

Eurodad [15] a publié en novembre 2015 un document de grande qualité intitulé Cinquante nuances d’évasion fiscale au sein de l’Union européenne. Parmi les contributeurs, on trouve CCFD-Terre solidaire, principal animateur en France de la plateforme PFJ (paradis fiscaux et judiciaires).

Les auteurs ne mésestiment pas les avancées obtenues ces dernières années – partant de si bas, on pouvait difficilement ne pas enregistrer de progrès – mais ils soulignent les obstacles qui barrent encore la route à une vraie transparence. Au sein de l’Union européenne, on continue à observer « le même système complexe et dysfonctionnel de rescrits fiscaux, de conventions fiscales,

de sociétés dites ’boîtes aux lettres’ et de régimes fiscaux préférentiels pour les brevets ». Les propriétaires des transnationales veillent toujours jalousement à ce que leur identité ne soit pas publique. Si des corrections ont été apportées, « malheureusement, ces progrès sont mis à mal par l’émergence de nouveaux mécanismes visant à dissimuler les propriétaires, comme les nouveaux types de trusts ». Ce sont les lanceurs d’alerte qui sont coupables et non les auteurs de délits ou de crimes, « l’histoire de ces héros de la justice fiscale est une rude illustration du coût social de l’opacité de ce système d’imposition des sociétés ». Enfin, les auteurs mettent en évidence combien cette recherche de justice fiscale – pour autant qu’elle soit réelle –, est l’affaire des pays riches. Pourtant, lors de la troisième conférence pour le financement du développement, tenue à Addis-Abeba en 2015, les pays du Sud ont vivement réclamé une « démocratie fiscale internationale ». Pleine de son arrogance habituelle, « l’UE [en particulier, le Royaume-Uni et la France] s’est fortement opposée à la création d’un organisme fiscal international et a joué un rôle essentiel dans le rejet de cette mesure » ! Eurodad cite le chiffre de plus de 2 000 milliards de dollars provenant d’Asie, d’Amérique latine et d’Afrique qui seraient détenus dans les paradis fiscaux, entraînant une perte fiscale annuelle de plus de 58 milliards de dollars.

Si la justice fiscale exige, en premier lieu, que chaque citoyen « contribue » en fonction de tous ses revenus mais pas au-delà, la plus élémentaire démocratie impose des règles clairement établies et non décidées intuitu personæ. À la tête du client, pourrait-on dire ! Or, dans l’histoire du « rescrit fiscal [16] », en France, on recense beaucoup moins de personnes appartenant à la moitié des Français percevant un revenu mensuel inférieur à quelque 1 700 euros que ceux disposant de hauts revenus ! Le rapport renvoie en effet à « une étude des pratiques sur les rescrits fiscaux dans les vingt pays membres menée par la Commission européenne en 2015 [qui] démontre que les huit États membres les plus actifs dans le domaine du rescrit fiscal ont conclu entre 100 et 600 rescrits fiscaux par an, alors que l’un d’entre eux a accordé jusqu’à 2 000 rescrits fiscaux en l’espace d’un an. Cette étude n’a pas révélé l’identité de ces pays ». Ce sont les fameux tax rulings, et autres patent box [17]  : je dois 100 à l’État, mais je négocie avec lui de n’en payer que, disons, 30, le reste étant officiellement apuré ! Le rapport, reprenant des données établies en 2015 par la CNUCED, présente le tableau ci-dessous. Ce qui est dénommé, avec élégance « entités ad-hoc », signifie des coquilles juridiques, propres à accueillir ces sociétés qui entendent ne pas payer, de manière parfaitement « légale », ce qu’elles doivent. En Europe, on remarquera que 32 % du total des investissements des entreprises, des investissements directs étrangers pour l’essentiel, ne sont pas domiciliées là où se réalise la majorité de leurs activités. Pour se remémorer ce qui, avec LuxLeaks, a été mis sur la place publique, on pourra se reporter à Luxembourg : haut-lieu de l’évasion fiscale ? Dans cette masse considérable d’informations, on relève comment, par exemple, la firme Amazon a payé une somme d’impôt sur les profits sans rapport avec ceux-ci [18]. Cette compagnie avait fixé, en 2003, son siège européen au Luxembourg et payait ses impôts dans ce pays sous le « bénéfice » d’un accord de tax rulings. Faut-il rappeler, qu’à cette date, le Premier ministre était Jean-Claude Juncker, qui s’est trouvé à la tête de ce pays, ou à celle de ses finances, pendant trois décennies. C’est cette « personnalité » qui est, depuis le 1er novembre 2014, président de la Commission européenne. Il expliquait, avec une sorte d’ingénuité attendrissante qu’il n’avait rien fait d’illégal – on veut bien le croire, malheureusement – mais qu’il fallait bien trouver des ressources pour un pays qui ne dispose pas d’accès à la mer ! C’est sans doute pourquoi ce pays a enregistré un chiffre d’affaires, sur quatre ans, de 3,7 milliards d’euros pour McDonald’s.

On lira, pages 42 et 43, les douze recommandations formulées par les auteurs pour que la fin de la fraude, de l’évasion et de l’évitement fiscal devienne une réalité. Quand on regarde ce qui se passe à l’égard du transfert automatique des données entre administrations fiscales, on mesure la réticence, doux euphémisme, des États. Pourtant, dès 1977, une directive européenne précise ce que doit être la coopération en matière fiscale ; elle ne sera pas respectée. En 1998, la Commission européenne met en place, de la manière la plus technocratique qui lui va si bien, un groupe de travail « bonne conduite ». En 2002, ce cadre est enrichi de spécifications relatives aux rescrits ; las, une évaluation de 2009 conclut : « il est clair que l’engagement de 2002-2003 de s’échanger les informations spontanément sur les prix de transferts – ces prix que se facturent entre elles les filiales d’un groupe, au cœur des rescrits – n’a été mis en place par aucun pays membre »

Comme indiqué précédemment, les échanges intra-firme constituent pour les transnationales, une belle opportunité « d’évitement ». Pour être parfaitement tranquilles, il leur suffit se convenir avec les administrations fiscales des accords sur le prix de ces transferts (APP). À l’examen du tableau reproduit ci-dessous, on voit combien le Luxembourg est un pays attentif à ces transferts !

Que l’ancien dirigeant du patronat britannique (Confederation of British Industry CBI)) et ancien superviseur de la Financial services authority, Adair Turner, réclame dans un ouvrage [19] d’aller plus loin dans la régulation financière n’est guère anodin. Son réquisitoire est particulièrement sévère : le volume de la finance est sans rapport avec les besoins de l’économie, une part beaucoup trop importante est attribuée au secteur immobilier en raison de sa rentabilité supposée à court terme, la rentabilité financière est érigée en dogme au détriment de la sécurité.

On ne peut que se réjouir de la victoire remportée par les ONG luttant depuis des années sur ce sujet. L’Assemblée nationale a adopté, contre l’avis du gouvernement français, l’obligation de la publication du reporting pays par pays. Ainsi, la recommandation n° 2 du document Eurodad devient réalité... Heureusement, le gouvernement de François Hollande et le secrétaire d’État au budget, Christian Eckert, veillent ! Devant la confirmation du vote en première et deuxième lectures, une heureuse suspension de séance a fini par accoucher, le 15 décembre 2015, d’un amendement adopté par 25 voix contre 21, lors de cette deuxième lecture rectifiée ! Cet amendement supprime le reporting public pays par pays. Un communiqué de la plateforme PFJ rend compte de cette sinistre – du latin à gauche – palinodie. Les transnationales sont soulagées, elles pourront continuer à faire leur marché dans les paradis fiscaux ; comme on le comprend, le président de la République a entendu la signification du vote du 13 décembre 2015 !

Tant que la fiscalité ne sera pas entre les mains des citoyens, qui auront été éclairés à cet égard, on peut craindre que rien ne change suffisamment. De pseudo règles démocratiques au sein de l’Union européenne ne sont guère là que pour amuser la galerie. Témoin, ce à quoi sont parvenus quatre États de l’Union, le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas et l’Irlande : ces quatre « petits » pays veillent au grain et ont réussi à sauvegarder les intérêts essentiels des transnationales.

3. Ah, Dieu, que le climat est joli !

À la fin des années 1960, c’était la Première Guerre mondiale que, par dérision, Richard Attenborough stigmatisait comme jolie. Il dénonçait l’indifférence des élites devant les massacres des « gens de peu ».

Depuis plusieurs décennies, de très nombreux scientifiques alertent, démonstrations à l’appui, sur la dangerosité de la dégradation climatique et sur la responsabilité humaine dans cette dérive. Devant ce constat, beaucoup de « gens de peu », à travers leurs associations, leurs syndicats, leurs ONG, leurs partis politiques, ont réclamé des mesures. Qu’ont fait les élites disposant des pouvoirs ? Rien, rien de sérieux en tout cas. Comment est-ce possible ? Tout simplement parce que le capitalisme se repaît de cette situation. L’accumulation capitaliste sans fin et sans limite a trouvé un nouvel essor à travers sa financiarisation tous azimuts. Qu’on en juge à travers cet exemple pourtant bien partiel. La BRI (Banque des règlements internationaux) publie, entre autres mille statistiques, le montant moyen des dérivés portant sur les changes ; ils ont évolué ainsi : 1 182 milliards de dollars en 1995 et 5 345 en 2013. Pour les dérivés portant sur les seuls taux d’intérêt, l’évolution des montants est encore plus spectaculaire : ils ont été multipliés par plus de 15 pour atteindre, en 2013, 2 343 milliards de dollars par jour. Que voulez-vous, il le faut bien pour que, en 2020, 1 % de la population mondiale puisse détenir 54 % des richesses ! Cependant, les officiels devront faire un peu semblant de lutter avec acharnement contre le réchauffement climatique… à condition, bien sûr, que ça ne coûte rien. Ainsi, le président de GDF Suez (aujourd’hui, Engie) a proposé, fin novembre 2015, au président de la République française de troquer la taxe sur la transactions financières – qui pourtant n’est toujours pas instaurée et dont l’application serait bien loin de celle d’une véritable TTF – contre des contributions volontaires. Ainsi, promet-il, « la Place de Paris [20] est prête à investir 10 milliards d’euros à horizon 2020 pour financer des projets d’adaptation, d’efficacité énergétique ou dans les énergies renouvelables ». Ainsi donc, celui qui a défrayé la chronique à propos du complément de retraite de 832 000 euros par an qu’il percevra à compter de mai 2016, assure que la place parisienne « investira » 2 milliards par an. Quel sera le retour sur cet investissement ? L’histoire ne le dit pas ; en revanche ce devrait être en exonération totale d’un impôt !

On ne connaît pas, jusqu’alors, de propriétaire de capital disposé à risquer une part de celui-ci s’il n’a pas la conviction qu’il récupérera sa mise plus quelque chose. Cette conviction est habituellement appuyée par des calculs économiques qui, pour autant, ne garantissent pas le résultat. En cas de malheur, les capitalistes savent installer plusieurs filets de sécurité, comme en témoigne, ad nauseam, le « secours » public accordé aux banques après la crise financière qu’elles avaient largement provoquée et qui allait leur permettre de s’octroyer de très confortables dividendes [21]. Ce principe capitaliste vient d’être illustré, sans la moindre vergogne, lors de la COP 21. Devant les présidents Obama et Hollande, Bill Gates a annoncé que, avec 25 autres milliardaires, il créait Breakthrough Energy Coalition, pour participer, avec le secteur public, aux investissements indispensables à l’innovation. Nous n’aurons pas l’outrecuidance de demander d’où ces vingt-six personnes, dont les présidents d’Amazon et de Facebook, tirent leurs milliards. Mais, comme le précise, sans ambages, Bill Gates, il ne s’agit pas de philanthropie mais « d’aider » le secteur public.

Le réchauffement affecte bien au-delà du climat

Si les climato-sceptiques sont parvenus à faire parler d’eux, il semble bien que ce ne soit dû ni à leur importance numérique dans la communauté scientifique mondiale travaillant sur le climat, ni à la qualité de leurs travaux. Pour en avoir le cœur net, le directeur scientifique du Consortium national des sciences physiques (NPSC) états-unien, James Lawrence Powell, a passé au crible les publications de 9 136 auteurs, éditées entre novembre 2012 et décembre 2013, dans des revues à comité de lecture ; résultat : un seul conteste la nature anthropique du changement climatique. La liste des publications démontrant combien le réchauffement est mortifère pour l’avenir de l’humanité, mais encore que cet « avenir » est déjà là, ne cesse de s’allonger. Quand, il y a six cents ans, Shakespeare nous livrait Beaucoup de bruit pour rien, il nous donnait une comédie brillante, ce qui n’est guère le cas des climato-sceptiques d’aujourd’hui !

Au lendemain des attentats islamistes du 13 novembre 2015 à Paris, l’animateur d’un débat sur une chaîne états-unienne demanda à Bernie Sanders, candidat socialiste à l’investiture du parti démocrate pour la prochaine élection présidentielle, s’il confirmait, malgré les massacres, ce qu’il avait précédemment déclaré à propos de la détérioration climatique comme étant « la menace la plus importante pour la sécurité des États-Unis » ; il confirma cette déclaration.

La Banque mondiale a publié, le 8 novembre 2015, un lourd rapport intitulé Shock Waves Managing the Impacts of Climate Change on Poverty. Il s’inscrit dans sa série sur le changement climatique dont, avec Décarboniser le développement, la revue Les Possibles présentait une précédente étude de mai 2011 au titre déjà évocateur. {}Les neuf auteurs ont la totale approbation de l’institution puisque son président, Jim Yong Kim, déclare : « ce rapport établit clairement qu’il ne sera pas possible de mettre fin à la pauvreté si nous ne prenons pas des mesures énergiques pour atténuer la menace que le changement climatique fait peser sur les pauvres et si nous ne réduisons pas massivement les émissions nuisibles. » Les plus pauvres sont plus exposés que la moyenne de la population aux divers chocs climatiques. Le tableau de la page 37, reproduit ici, illustre de manière dramatiquement prégnante le sort particulier des pauvres engloutis par le dérèglement climatique. On lira que plus de 57 % de la population rurale indienne subit les chocs des désastres dits naturels !

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Au niveau mondial, les perspectives étudiées par la Banque d’ici 2030 confirment, s’il en était besoin, l’extrême gravité de la situation. On sait que la durée de vie des gaz à effets de serre (GES), en particulier le CO2  [22], continuera à entraîner une détérioration climatique, quelles que soient les mesures appliquées aujourd’hui. Maintenir le réchauffement en dessous de 2° Celsius [23] est totalement indispensable pour l’avenir de l’humanité, mais, malheureusement, rien ne peut plus changer d’ici 2030. D’ici là, le sort des centaines de millions les plus pauvres sera largement dépendant des comportements des pays riches à leur égard. On reproduit ci-après deux cartes établies par les auteurs de l’étude et publiées page 16 du rapport. Elles mettent en évidence comment les politiques de développement adoptées d’ici cet horizon pourront, ou non, réduire les impacts du changement climatique sur la pauvreté. On y voit une infographie du nombre d’êtres humains vivant sous le seuil de pauvreté [24] en fonction de deux scénarios : hypothèse dite de « prospérité » et hypothèse de pauvreté. Dans cette dernière, les calculs montrent que cent millions supplémentaires viendraient grossir les rangs de ces parias ! Comme on le voit, l’Afrique subsaharienne devrait être la plus touchée. On ne manque pas de thuriféraires tentant de rassurer en affirmant que le XXIe siècle sera celui de l’Afrique ; acceptons-en vivement l’augure. Quand le FMI affirme que, pour ce sous-continent, il s’agit de maintenir le rythme, on est fondé à se demander si, véritablement, L’Afrique va-t-elle dans le bon sens ?

On verra sur la figure 2.3 présentée en page 55 et reproduite ci-dessous avant les cartes du monde qui viennent d’être évoquées, comment la détérioration climatique entraîne très directement celle des ressources alimentaires pour les personnes vivant dans les pays pauvres. Elles sont mesurées en disponibilité, par personne, du nombre de calories disponibles calculées en comparaison de celles dont dispose la population des pays riches. On remarque que, dans le pire des scénarios climatiques, la population subsaharienne disposerait en moyenne de moins de 70 % de la disponibilité calorique par personne comparée à celle de la population des pays riches. Le modèle utilisé est GLOBIOM, mis au point par l’IIASA, un institut basé en Autriche et créé pendant la Guerre froide grâce à une coopération scientifique entre l’Est et l’Ouest.

La tâche est immense, puisque les auteurs nous démontrent que, pour ne pas ajouter l’augmentation de l’extrême pauvreté à la détérioration climatique, il faudra que les émissions nettes de carbone soient ramenées à zéro d’ici 2100 ! Bien entendu, préserver les populations pauvres exigera d’importantes ressources. Une des préconisations de la Banque porte sur l’instauration d’une taxe carbone. Elle avance que, même à un taux modeste, elle constituerait une contribution significative à la lutte contre la pauvreté. Dans son rapport du 8 novembre 2015 déjà mentionné, elle nous avertit que ce sont 100 millions de personnes supplémentaires qui, d’ici 2030, tomberaient sous le seuil de pauvreté si les mesures drastiques que l’on sait n’étaient pas prises !

Les économistes ont testé quatre niveaux de taxe à la tonne de CO2 émise : 5 dollars, 10, 20 et 30. À cet égard, il faut rappeler la pitoyable « expérience » européenne. Persuadée de la parfaite efficacité des marchés, la Commission européenne, totalement soutenue par les gouvernements, avait imaginé qu’instituer des quotas d’émission, et leur donner un prix, serait un outil parfait de régulation comme seuls savent le faire les marchés ! Au mitan de 2008, le prix des crédits carbone était proche de 30 euros la tonne de CO2, en janvier 2013 il était inférieur à 3 euros et se situe, à l’heure actuelle, autour de 5 euros. Ce que préconise la Banque mondiale ne s’inscrit pas dans ce processus dévastateur consistant à acheter des droits de polluer à des prix de marché, c’est-à-dire ridicules. Elle demande, à l’inverse, d’établir une taxe pour toute tonne émise. On voit qu’à 30 dollars la tonne de CO2 émise, une telle taxe fournirait aux pays de revenus intermédiaires de la tranche inférieure plus de deux fois les montants actuels de leurs transferts sociaux.

Les politiques publiques ont une influence directe sur les impacts du changement climatique envers les populations, en particulier les plus pauvres. C’est notamment vrai pour tout le secteur de l’agriculture. S’agissant des besoins sociaux, le rapport en rappelle l’ampleur considérable. Sur le seul poste des dépenses de santé, les habitants des pays les plus pauvres doivent recourir à leurs propres pauvres deniers, trois fois plus que ceux des pays les plus riches. Dans le graphique de la page 114 reproduit ici, les pays sont répartis en quatre groupes, du revenu le plus faible au plus élevé. Les auteurs ont classé les dépenses de santé selon l’origine de leur financement : les ménages eux-mêmes, les ressources extérieures, les autres dépenses privées, les assurances de santé privées, les autres dépenses d’État et la sécurité sociale. On remarque que plus les populations sont pauvres, plus elles doivent supporter elles-mêmes les dépenses de santé ou compter sur ce qui est dénommé « ressources externes », c’est-à-dire des ONG ou des associations. Pour près de 80 % de ces dépenses, les pauvres ne peuvent compter que sur eux-mêmes ou la charité ! Dans le Rapport sur le développement humain de 2015 publié le 15 décembre 2015, le PNUD décompte 1,19 milliard d’êtres humains vivant dans des pays à faible développement humain. Il ne faut pas être grand clerc pour redouter que les réfugiés climatiques proviennent, très majoritairement, de ces populations les plus pauvres et les moins protégées. L’IDMC (Internal displacement monitoring center) créé en 1998 est l’institut de référence sur les réfugiés climatiques qui, en particulier, sert de source aux Nations unies. Dans son dernier Global figures, il indique le nombre de réfugiés climatiques entre 1989 et 2014 : 185 millions.

Les auteurs affirment que la protection sociale publique est totalement indispensable pour faire face aux risques climatiques. On ne peut que totalement souscrire à cette exigence. En revanche, les remèdes proposés semblent bien avoir oublié l’essentiel. Page 142, les cinq experts à l’origine de l’étude établissent un savant graphique pour tenter de prouver que les ménages les plus pauvres ont besoin de solutions diverses ; pourtant il ressort clairement que ce sont la sécurité sociale de base, et plus encore son amélioration, qui constituent le meilleur rempart. Il eût été opportun de montrer que le développement de l’emploi est, sans doute, à la base du processus ; on pourra lire Protection sociale qui rend compte des analyses de l’OIT sur la période 2010-2015.

Ce n’est pas le lieu, ici, d’essayer de relever ce qui, dans les tueries islamistes de par le monde, trouverait son origine dans la « sociologie » et la part relevant de l’idéologie. Notons simplement que The Institute for Economics and Peace recense plus de 32 000 tués dans des attentats durant l’année 2014. Près de 80 % des victimes ont été tuées dans cinq pays : l’Irak, le Nigeria, l’Afghanistan, le Pakistan et la Syrie. On remarquera que le Nigeria, l’Afghanistan et le Pakistan sont répertoriés par le PNUD dans les pays à faible développement humain ; l’Afghanistan, par exemple, se situe à la 169e place des 187 pays étudiés en 2014. Le quotidien Le Monde a publié le 24 novembre 2015 un article de son journaliste scientifique, Stéphane Foucart, qui, comme à l’accoutumée, fourmille d’informations fort documentées. À propos de l’influence des désastres climatiques sur les crimes et autres actes de piraterie, il écrit « bien sûr, les déterminants environnementaux n’invalident nullement les autres – religieux, politiques, ethniques, etc. –, habituellement mis en avant. Mais leur rôle est clair : comment penser que la destruction partielle de la production primaire d’un pays puisse être sans effet aucun sur sa stabilité et la sécurité de ses voisins ? ». Il cite, à ce propos, une étude publiée dans la revue suisse à comité de lecture Journal of Development Economics, dont il donne la conclusion : « Les deux économistes ont analysé les données relatives aux actes de piraterie au large d’une centaine de pays, et à l’abondance de plancton dans les mêmes eaux. Selon leurs calculs, lorsque la quantité de plancton baisse de 10 %, le nombre d’actes de piraterie augmente d’autant… ». Peut-être, un statisticien climato-sceptique viendra-il faire remarquer que concomitance ne signifie pas obligatoirement corrélation. Fort bien, le mieux sera alors de lui suggérer de poursuivre les travaux de Matthias Flückiger et Markus Ludwig !

Pourtant, l’évidence de la situation éminemment dangereuse dans laquelle nous sommes est perçue parfois même par des responsables politiques. Ainsi, Jacques Chirac, alors président de la République française, déclarait-il en 2002 à Johannesburg, « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». La situation a continué à se fortement dégrader depuis et si les gouvernements prétendent porter désormais une grande attention au réchauffement climatique, il y a encore loin de la coupe aux lèvres.

Enfin vint la Conférence de novembre-décembre 2015 à Paris

Le président français de la COP 21, Laurent Fabius, a estimé que la Convention-cadre sur les changements climatiques adoptée le 12 décembre 2015 était le « meilleur équilibre possible ». Le quotidien britannique The Guardian introduit son article du 12 décembre 2015 par deux phrases dans lesquelles son auteur, George Monbiot, exprime que le résultat de Paris est un miracle au regard de ce qu’il aurait pu être mais un désastre face à ce qu’il aurait dû être. Belle et terrible formule qui en dit long sur l’état de la « gouvernance » des relations internationales – que les propriétaires du capital [25], en dernier ressort, gouvernent – et celui du climat mondial.

Incontestablement, on ne peut que se réjouir que 196 pays aient signé cette Convention s’engageant contre le réchauffement climatique. Ils ont même inclus des obligations diplomatiques précises.

En revanche, la part vide du verre, qui n’est pas facilement quantifiable, est, qualitativement considérable. Sans doute, la mère de tous les dangers réside-t-elle dans la confirmation de l’inscription du climat au sein du cadre libéral marchandisé. Une coalition d’ONG rend compte du rapport interne de la Commission européenne qui illustre, une fois encore, sa nature et sa conduite ultralibérales ; elle a donné instruction à ses négociateurs à la COP 21 de s’opposer à tout ce qui pourrait mettre en cause les « règles » du commerce !

Pourtant, quel autre meilleur exemple de bien commun que le climat ? Comment ce qui conditionne la vie sur la planète de ses 7,2 milliards d’habitants et de tous ceux qui les suivront pourrait-il ne pas être étroitement contrôlé par tous ceux dont la survie en dépend ? Sont-ce les transnationales dont, au bout du compte, la seule ligne directrice est leur profit, qui peuvent être en mesure de préserver le climat planétaire ? Est-ce en laissant le commerce international [26] n’obéir qu’à ses propres règles que l’on parviendra à ce que la température de 2100 reste en deçà de 2° C au dessus de celle de l’ère préindustrielle ? La véritable lutte contre le réchauffement climatique anthropique passe, nécessairement, par l’usage de l’outil démocratique, seul à être à même d’enraciner la connaissance des dangers dans la part de la population la plus importante possible ; de ce point de vue, des progrès considérables peuvent être accomplis. Le Pew Reseaech Center, centre états-unien de collecte et analyse statistique de données multiples, s’est livré à une enquête pour mesurer comment les citoyens, dans les quarante pays étudiés, réagissaient au changement climatique et l’importance accordée au danger encouru. On remarquera, dans le tableau établi par les auteurs de cette étude et reproduit ci-dessous, que la perception des risques est souvent plus élevée chez les habitants des pays les plus menacés, de diverses manières : Philippines, Inde, Brésil, Ouganda, Burkina Faso. Pourtant, la population de ces pays est souvent réputée, dans nos imaginaires, beaucoup moins avertie que celle de la Grande-Bretagne, par exemple, qui semble relativement tranquille. On recommande aussi de consulter une étude du sociologue allemand Nico Stehr publiée le 22 septembre 2015 dans la revue Nature. Il démontre que, contrairement à ce que certains scientifiques – parfois éminents – pourraient laisser penser, « il faut renforcer la démocratie, non lui tourner le dos ». L’ignorance présumée du peuple, à coup sûr, selon l’auteur et à rebours des idées reçues, fait partie des causes de l’échec dans la lutte contre le changement climatique. Est-ce le « peuple » qui prétend que l’accroissement des échanges internationaux serait une arme efficace dans ce combat ? Bien entendu, la démocratie ne va pas sans savoir, et donc sans apprentissage.

Mais, comment donc cet apprentissage sera-il pris en charge financièrement ? On devrait pouvoir se réjouir des 100 milliards de dollars fièrement annoncés lors de la COP 21 et devant permettre aux pays les plus pauvres d’être en mesure de s’adapter au dérèglement climatique. Malheureusement, les besoins vont bien au-delà. Même si on parvenait à ne pas laisser filer la température au dessus de ces 2° C, le PNUE nous indique, dans une étude de décembre 2014, que les montants nécessaires pour faire face aux besoins s’établiraient entre 250 et 500 milliards de dollars au-delà de 2050. En outre, une part des 100 milliards annoncés sont déjà dans l’APD, dont on vient de voir la faible part face aux exigences.

Au-delà de cette manifeste insuffisance des ressources qui pourraient être allouées aux pays pauvres pour répondre aux changement climatiques, force est de constater que l’ampleur de la catastrophe risque bien d’être plus importante qu’annoncée si ce sont les règles du marché aux mains des transnationales qui sont observées. De nombreuses études convergent pour démontrer que l’humanité ne doit pas émettre, désormais, plus de 850 GtCO2 pour ne pas dépasser les fameux 2° C d’augmentation de température. Une étude explicitement intitulée Unburnable Carbon a été publiée en octobre 2013 par Carbon Tracker, elle montre que les réserves prouvées de gaz, pétrole et charbon de la planète renferment potentiellement 2 800 GtCO2. On trouvera ci-dessous une copie du graphique que les auteurs présentent en page 6, elle fournit une parfaite illustration de la réalité de la bombe que nous avons sous nos pieds.

Et pendant ce temps là …

Que font les transnationales du secteur ? Ce qu’elles savent faire, du profit bien sûr ! Pour les six premières compagnies pétrolières mondiales, ce sont plus de 51 milliards de dollars au second trimestre 2015. Pourtant, en ces temps difficiles de prix du baril bas, on pourrait s’attendre à ce que ces sociétés souffrent. Le quotidien USA Today du 31 juillet 2015 note en effet qu’elle ont enregistré, au second trimestre 2015, le profit le plus bas de la décennie ; il cite, à cet égard, Standard & poor’s qui relève que, parmi les 500 premières cotations sur les bourses étasuniennes, il s’est agi quand même pour les compagnies pétrolières de près de 5 milliards de dollars de profits déclarés alors que ceux-ci s’élevaient à plus de 24 pour le second trimestre 2012. On comprend que, dans ces conditions hautement rentables globalement, les compagnies fassent tout ce qu’elles peuvent – c’est-à-dire beaucoup – pour poursuivre sans vergogne leur action prédatrice. Ainsi on verra, dans les données statistiques 2015 de l’Agence internationales de l’énergie, le tableau, reproduit ici : en quarante ans, la production d’énergie primaire mondiale a augmenté de près de 1 500 millions de tonnes équivalent pétrole, pour atteindre en 2014, 5 238 millions de TEP. On constatera aussi que plus de 80 % de cette énergie provient de l’extraction du charbon, du pétrole et du gaz.

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Non seulement les transnationales sont les fournisseurs des matières premières à l’origine, pour la part majoritaire, des gaz à effet serre de nature anthropiques, mais encore bénéficient-elles de larges subvention pour ce faire ! Le centre d’étude Oil Change International, basé à Washington, publie en novembre 2015, un rapport au titre explicite Empty promises dans lequel il recense le soutien financier public à ce carnage. On y verra, page 41, que le total annuel de ces subventions fournies par les pays du G20 s’est élevé à près de 78 milliards de dollars [27] en 2013-2014. Pour la France, pays pratiquement sans production nationale, ce soutien est évalué à 125 millions de dollars. Il faut cependant ajouter l’intervention française publique (en particulier à travers l’AFD et la Coface), évaluée à quelque 1,4 milliard de dollars destinés à « soutenir » les activités extractives.

Enfin, on ne s’étonnera guère de lire, dans un rapport intitulé Inégalités extrêmes et émission de CO2 et publié le 5 décembre 2015, comment Oxfam résume la réalité de ce monde aux ordres du capital : 10 % des habitants les plus riches de la planète émettent plus de la moitié des émissions de CO2, alors que la moitié la plus pauvre du globe n’est responsable que de 10 % des rejets polluants !

Notes

[1Collectif, Une autre ONU pour un autre monde, Bruxelles, Tribord, 2010.

[2PPA, parité de pouvoir d’achat est un taux de conversion exprimant le pouvoir d’achat des différentes monnaies indépendamment des « taux de change » officiels.

[3PNUD : Programme des Nations unies pour le développement.

[4IDH : indice de développement humain.

[5L’OCDE définit le taux de pauvreté comme étant la proportion de personnes dont le revenu est inférieur au seuil de pauvreté, c’est-à-dire à la moitié du revenu médian des ménages.

[6Rapport mondial sur le développement humain.

[7Pour préciser les ordres de grandeurs, le PIB mondial 2014 est évalué par la Banque mondiale à 77 868 milliards de dollars courants

[83,4 milliards vivaient dans des pays dont le total des PIB était de l’ordre de 13 000 milliards de dollars.

[9Lire The network of global corporate control dans Les grandes gagnantes : les transnationales

[10PIB du Canada : environ 1 800 milliards.

[11Aristote, Politique, Livre VII.

[12Ainsi, la compagnie pétrolière Total, qui a réalisé un profit officiel de 4,2 milliards d’euros en 2014, n’a pas payé en France, d’impôts sur les bénéfices (IS) au titre de cette année.

[13Un prix de transfert est celui qui est déterminé par un groupe comme celui retenu pour la cession prix d’un bien ou d’un service, par une filiale à une autre filiale ou à la maison-mère.

[14Pour 2013, l’OMC évalue, au niveau mondial, les échanges de biens à 18 300 milliards de dollars et à 4 600 milliards de dollars pour les services.

[15Eurodad (European Network on Debt and Development), regroupe plusieurs dizaines d’ONG européennes travaillant sur les questions relatives aux questions portant sur la dette, le financement du développement et la pauvreté.

[16Convention préalable établie entre l’administration fiscale et un contribuable particulier.

[17Régime fiscal, consenti par la plupart des paradis fiscaux, qui exonère d’impôts, ou les réduisent considérablement, les profits réalisés par les entreprises sur leurs brevets

[18En 2014 Amazon aurait, selon BFM-TV, réalisé un chiffre d’affaires, hors États-Unis, de 33,5 milliards de dollars et se serait acquitté de 24 millions d’impôts sur les bénéfices. En supposant que le taux obtenu par Amazon sur ses profits serait de 10 %, il faudrait supposer que les profits de la firme, en 2014, auraient été de 240 millions. Piètre rentabilité !

[19Adair Turner, Between debt and the devil. Money, credit and fixing global finance, Princeton University Press, 2015 à propos duquel Christian Chavagneux rend compte dans Alternatives économiques.

[20La capitalisation boursière (Paris) des entreprises du CAC 40 est évaluée fin novembre 2015 à 560 milliards d’euros.

[21La compagnie Henderson, basée à Londres depuis les années 1930, est notamment spécialisée dans la gestion du capital-risque. Son Global index publié en févier 2016, chiffre à 1 150 milliards de dollars les dividendes versés par les 1 200 plus importantes sociétés mondiales en 2015 (au-delà des seules banques, donc). À titre de référence, précisons que c’est sensiblement plus que la richesse produite par les quelque 900 millions d’habitants des pays les moins développés

[22La durée de séjour dans l’atmosphère du CO2 est de l’ordre du siècle.

[23Ces 2 degrés ont été énoncés dans les années 1990 ; depuis, et au regard des données récoltées, le niveau préconisé dans de nombreuses études est plus proche de 1,5° par rapport à la période préindustrielle. Dans son dernier rapport, le GIEC indiquait que ne pas excéder 2° exigeait de réduire les émissions de GES de 40 % à 70 %, alors qu’à 1,5°, cette réduction se situe entre 80% et 90%.

[24Ce seuil, anciennement fixé à 1,25 $/jour, a été réévalué à 1,90 $/jour.

[25On lira dans Alors, ce machin ? de ce même numéro que, en 2020, 1 % de la population devrait s’attribuer près de 55% des richesses mondiales

[26Selon l’OMC, le volume mondial des exportations s’établissait à plus de 18 000 milliards de dollars courants en 2013 contre 2 000 milliards en 1980.

[27Le total des contributions effectuées en faveur du PAM (Programme alimentaire mondial) s’élevait, en 2014, à moins de 5 milliards de dollars.

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