La retraite à 60 ans... enfin non ça dépend
Lors des élections présidentielles en 2022 [1], la candidate du RN a longtemps prôné un retour à la retraite à 60 ans avec 40 annuités pour une retraite à taux plein, avant de faire volte-face et de défendre finalement un âge progressif de départ à la retraite. Seules les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans pendant 40 annuités pourraient donc partir à la retraite à 60 ans. Une personne n’ayant commencé à travailler qu’à 25 ans ou plus ne pourrait partir en retraite qu’à 67 ans.
Le système de retraites basé sur un âge progressif défendu par le RN se rapproche ainsi beaucoup du système progressif défendu actuellement par le gouvernement. En outre, le RN n’intègre aucun dispositif de pénibilité qui permette de partir plus tôt à la retraite pour les métiers éprouvants, constituant un recul grave en matière de santé pour les travailleuses et travailleurs.
La défense de la retraite à 60 ans par le RN n’était donc qu’un effet d’annonce.
Pour équilibrer le système des retraites, soutenir la natalité
Lors d’un plateau sur BFM TV, Jordan Bardella, président du RN, dévoile son plan pour « sauver » le système de retraites par répartition : soutenir et relancer la natalité en France. « La France n’a jamais été aussi peuplée mais elle n’a jamais fait aussi peu de bébés ». La politique nataliste a toujours été le cheval de bataille du parti d’extrême-droite, obsédé par « l’invasion migratoire », et consistant à encourager les naissances dans les familles « françaises », à grand renfort d’incitations financières à faire plus d’enfants.
« Le choix est entre l’immigration et la natalité, j’assume très clairement faire celui de la natalité, celui de la continuité de la nation et de la transmission de notre civilisation grâce à notre modèle familial » (Marine Le Pen, élections présidentielles 2022)
Or, le rapport du COR [2] nous apprend que la part des dépenses de retraite dans le PIB sera stable ou en diminution jusqu’en 2070 malgré le vieillissement démographique, et que le rapport entre le nombre d’actifs et le nombre de retraités va légèrement baisser de 1,7 à 1,5 d’ici à 2040. Le taux de chômage en France (supérieur à 7 %) est aujourd’hui l’un des plus élevés d’Europe (après l’Espagne, la Grèce et l’Italie) ; en outre, de très nombreuses femmes souhaiteraient pouvoir rester en emploi lors de la naissance d’enfant mais sont contraintes de s’en retirer faute de solution pour le faire garder. Augmenter le nombre de personnes actives est possible en commençant par développer des crèches et par s’attaquer en priorité au chômage.
La question de la natalité n’est qu’un faux débat. En revanche, c’est un argument qui leur permet de remettre en cause les droits des femmes à l’emploi et le droit à l’avortement.
Le discours du RN invoquant la natalité pour « sauver les retraites » est trompeur. Il relève de l’archaïsme et s’inscrit dans l’obsession anti-immigration de l’extrême-droite. Il est une menace pour les droits des femmes et est incompatible avec l’exigence d’égalité entre les femmes et les hommes.
On n’a qu’à réindustrialiser la France...
Comme autre remède au soi-disant déficit du système de retraites, le RN ressasse ses vieilles antiennes comme le « patriotisme économique » et une « réindustrialisation ambitieuse de la France ». Mais celles-ci ne sont en rien en rupture avec les politiques néolibérales actuelles, elles s’inscrivent au contraire largement dans leur prolongement et sans aucune proposition de réelle stratégie industrielle (quelles activités, pour quels besoins ?).
Alors que le montant des aides publiques de l’État aux entreprises s’élève actuellement à 160 milliards d’euros - qui ont d’ailleurs démontré leur inefficacité pour créer des emplois - il s’agit de subventionner encore plus les entreprises soi disant pour les inciter à rester en France. Comme si la principale raison des délocalisations résidait dans le choix de pays à fiscalité plus faible, et comme si des subventions supplémentaires susciteraient des relocalisations d’entreprises expatriées.
Au lieu de programme de lutte contre la précarité et la pauvreté ou de programme de transition environnementale, le RN préfère « soutenir la productivité » et accorder des avantages fiscaux tous azimuts et sans contreparties, comme « s’engager sur le long terme sur la suppression (…) des impôts de production ».
D’ailleurs, à l’Assemblée nationale, la liste des votes du RN est longue contre le progrès social et le partage des richesses : Contre une taxe sur les revenus supérieurs à 3 millions d’euros, contre une taxe sur les superprofits, contre l’augmentation de la TVA sur les produits de luxe, contre la hausse des moyens pour lutter contre la fraude fiscale, contre le rétablissement de l’ISF, pour la hausse du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires, pour la baisse des impôts de production (CVAE)...
Le patriotisme économique du RN c’est toujours plus pour les riches et les grandes entreprises et pas de nouvelles recettes pour le système des retraites
...et revaloriser les salaires
Autre argument entendu du RN, la « revalorisation des salaires ». Bien sur, la revalorisation des salaires est défendu par les mouvements syndicaux et sociaux. Cependant, le RN, qui se présente comme le « défenseur » des classes populaires, n’hésite pas à voter contre la mesure demandant l’augmentation du SMIC à l’Assemblée nationale (juillet 2022). Par contre, quand le RN fait une proposition de loi pour inciter les entreprises à augmenter les salaires de 10 % (janvier 2023), celle-ci repose uniquement sur l’exonération des cotisations patronales ! Réduisant d’autant les recettes de la protection sociale et des caisses de retraites...
Exonérer les cotisations patronales va à l’encontre de l’équilibre du système de retraites
Le RN mobilisé contre la réforme des retraites ?
Le RN se dit particulièrement mobilisé contre la réforme des retraites alors qu’il a toujours fustigé le mouvement social, l’accusant de vouloir « bloquer le pays ». Le RN n’a jamais soutenu les mobilisations sociales, ni défilé lors des manifestations en janvier, qui ont réuni des millions de personnes dans les rues.
Le RN dit se battre contre la réforme à l’Assemblée mais n’a déposé que 75 amendements en commission des affaires sociales et il a même accusé, de concert avec Gérald Darmanin, les député·es de la NUPES de « bordéliser l’Assemblée ».
Le RN ne se bat pas contre la réforme des retraites mais préfère cibler le mouvement social et les étrangers.
En attendant la fameuse « contre-réforme » du système de retraites tant annoncée par le RN, nous ne nous laisserons pas berner ! Non, le Rassemblement National n’a pas changé et n’est en rien devenu un allié des classes populaires et des premier.es de corvé.es qui vont particulièrement être touché.es par cette réforme. Il continue d’être allié partout en France avec toutes les franges les plus radicales de l’extrême droite qui poursuivent leurs actes violents contre une partie de la population.