Contexte
Du 23 au 26 octobre, les député·es de la commission des finances ont examiné la première partie du projet de loi de finances 2025, consacrée aux ressources et à l’équilibre. Bien qu’ils n’aient qu’un avis consultatif certains votes ont été renouvelés dans l’hémicycle.
En principe, un vote solennel sur la première partie du budget aurait dû avoir lieu le 28 octobre. Mais les député·es n’ont pas réussi à étudier l’ensemble des amendements, et ce vote a été remis et l’étude du budget reprendra en séance à partir du 5 novembre.
Pour mieux comprendre la teneur des débats et des propositions sur la table, nous revenons ci-dessous sur les amendements les plus emblématiques en matière de justice fiscale, adoptés en séance à l’Assemblée nationale, puis lors des débats préalables en commission.
Amendements du projet de loi de finances adoptés en séance à l’Assemblée nationale
Taxation des ultra-riches :
Ultra-riches :
- Taxe sur les hauts revenus : suppression de sa dimension temporaire, et limitation des possibilités d’« optimisation fiscale » ; (adopté en séance le 22/10)
- Nouvel impôt sur le patrimoine des milliardaires. (adopté en séance le 25/10)
Évasion fiscale :
- Renforcement de l’exit tax. (adopté en séance le 23/10)
En 2022, la France entrait pour la première fois dans le top 3 du classement mondial des pays comptant le plus de millionnaires. Cela résulte de la politique menée par Emmanuel Macron, qui s’est fait le président des plus riches et des multinationales. En supprimant l’impôt sur la fortune (ISF), en plafonnant l’imposition des revenus financiers (PFU), en multipliant les niches fiscales, les gouvernements successifs n’ont cessé, depuis 2017, de soigner les intérêts des plus riches. Ces réformes étaient censées favorisées l’investissement et l’emploi, or elles se sont avérées aussi injustes et qu’inefficaces. C’est un enjeu de justice sociale que les plus riches contribuent au bien commun à la hauteur de leurs moyens.
En 2018, Emmanuel Macron allège l’exit tax, l’une des rares dispositions destinées à lutter contre l’exode fiscal des contribuables français. Elle impose aux résidents français quittant le pays de déclarer leurs plus-values latentes sur certains actifs. Actuellement, les mécanismes de report et de sursis d’imposition affaiblissent cette mesure. En commission puis en séance, tous les député·es excepté ceux de la majorité, ont adopté son renforcement.
Taxation de la finance et des revenus financiers :
- Taxation des superdividendes des entreprises à hauteur de 10% sur les dividendes distribuées par les entreprises du CAC 40 ; (adopté en séance le 26/10)
- Lutter contre les pratiques dite « CumCum ». (adopté en séance le 23/10)
Les député·es ont adopté un amendement visant à taxer les superdividendes des entreprises, déjà adopté au budget 2023, mais retiré avec l’utilisation du 49.3. Ce relèvement de la « flat tax » vise spécifiquement les grandes entreprises qui distribuent des dividendes très élevés sans réinvestir dans leur activité.
Les amendements votés pour contrer les pratiques dites « CumCum » et visent à récupérer les revenus fiscaux des détenteurs d’actions d’entreprises françaises résidant à l’étranger.
Amendements du projet de loi de finances adoptés en commission des finances mais retoqué ou en attente de discussion en plénière
Taxation des ultra-riches :
- Rétablissement de l’Impôt de solidarité sur la fortune ; (retoqué en séance le 22/10)
- Héritage : Mieux taxer les reventes de titres après une transmission d’entreprise défiscalisée grâce au Pacte Dutreil.
L’accumulation des richesses provient de l’héritage, dont l’importance est toujours plus grande dans le patrimoine des plus riches selon le Conseil d’analyse économique (CAE). L’amendement concernant le dispositif Dutreil cherche à limiter les abus dans la fiscalité des transmissions d’entreprises familiales. Certains héritiers dévoient l’objectif initial de cette mesure et l’utilisent comme une opportunité d’optimisation fiscale. L’amendement adopté en commission introduit une meilleure taxation des reventes de titres transmis via le Pacte Dutreil. Cette modification aurait pour effet d’augmenter l’assiette de la plus-value imposable pour les cessions précoces, ce qui limiterait les avantages fiscaux des transmissions suivies de reventes immédiates.
La mesure qui visait à remettre en place un ISF n’a pas été adopté. Pour rappel, Attac défend la mise en place d’un ISF rénové sur l’ensemble des actifs d’un·e contribuable (immobiliers, mobiliers, financiers).
Taxation des multinationales :
- Évasion fiscale : taxation unitaire inspirée par Attac et Gabriel Zucman ;
- Écologie : création d’une « taxe kilométrique pour intégrer le coût écologique dans les produits importés » ;
- E-commerce : extension de la taxe sur les surfaces commerciales aux entrepôts géants – avec le secteur du e-commerce en ligne de mire ;
- Niches fiscales : Réduction du périmètre du Crédit Impôt Recherche.
- Amendement sur la taxation des superprofits : la taxation supplémentaire sera calculée sur ces bénéfices « excédentaires », avec trois tranches imposées à 20 %, 25 % et 33 %.
- Contribution exceptionnelle sur les bénéfices de grandes entreprises avec un taux de prélèvement à 40% pour un chiffre d’affaires à 1 milliard et 55% pour plus de trois milliards. (retoqué en séance le 25/10)
Pendant les crises sanitaires et énergétiques, certains secteurs ont enregistré des profits exceptionnels (notamment l’énergie et le luxe). En maintenant des marges indécentes les multinationales ont alimenté les hausses des prix ce qui leur a permis de dégager des "superprofits". Un amendement qui vise à rétablir une taxe sur ces profits jugés excessifs, en élargissant l’assiette à tous les secteurs concernés a été adopté en commission des finances. Il permettrait de financer des mesures sociales et écologiques et de redistribuer les richesses de manière plus équitable.
Au-delà, les superprofits reposent aussi sur une triche fiscale à grande échelle via des montages fiscaux qui leur permettent d’échapper à l’impôt et d’optimiser la possibilité de distribuer des dividendes. Pour éradiquer l’évasion fiscale, un amendement, inspiré des mesures portées par Attac, sur les taxations unitaire des multinationales a été adopté. Cela permettrait que les grands groupes soient véritablement imposés dans les pays où ils réalisent leurs activités et non là où ils les déclarent.
Taxation de la finance et des revenus financiers :
- La taxe sur les transactions financières (TTF) : élargissement et doublement du taux ;
- Augmentation la « flat tax » de 30 % à 33 %. (retoqué en séance le 23/10)
L’élargissement de la TTF cible les activités spéculatives de trading haute fréquence et autres opérations boursières rapides. Doubler le taux pourrait réduire la spéculation financière et encourager des investissements plus durables.
Les député·es ont également adopté un amendement pour faire passer le taux du Prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 à 33 %. La hausse du taux contribue à une fiscalité plus équitable et rééquilibre la participation du revenu du capital par rapport aux revenus du travail. Chez Attac, nous proposons de supprimer le prélèvement forfaitaire unique, afin de rétablir la progressivité de l’imposition des revenus financiers, ce qui dégagerait au moins 2 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Les député•es ont aussi adopté un amendement visant à taxer les superdividendes des entreprises, déjà adopté au budget 2023, mais retiré avec l’utilisation du 49.3. Ce relèvement de la « flat tax » à 35 % pour les dividendes excédant de 20 % la moyenne des années précédentes vise spécifiquement les grandes entreprises qui distribuent des dividendes très élevés sans réinvestir dans leur activité.