L’évasion fiscale représente un manque à gagner annuel de 100 milliards d’euros, majoritairement occasionné par les ultra-riches et les grandes multinationales à travers la fraude et l’optimisation fiscale. Les gouvernements successifs ont néanmoins systématiquement remis en cause le chiffrage de l’évasion fiscale et affaibli l’administration chargée du contrôle fiscal.
Des moyens insuffisants pour lutter contre l’évasion fiscale
Il y a une incohérence entre les résultats réels et le discours portés par le gouvernement de Gabriel Attal. Ce dernier s’est félicité que les résultats du contrôle fiscal sont historiques avec 15,2 milliards recouvrés en 2023, soit 600 millions de plus que l’année précédente. En tenant compte de l’inflation, cela représente pourtant une baisse.
La médiocrité de ces chiffres s’expliquent en partie par l’affaiblissement systématique de l’administration en charge du contrôle fiscal, la Direction générale des finances publiques (DGFIP), qui a perdu 4 000 postes depuis 2010, dont 1600 sous le premier quinquennat de Macron. Il y a un sous-effectif criant dans des services essentiels comme les douanes, qui comptent 17 000 agents en France contre 48 000 en Allemagne, malgré un plus grand nombre de frontières en France.
Au-delà des moyens humains, les services de contrôle fiscal souffrent aussi d’un manque de matériel et de formation adéquate, avec des ordinateurs obsolètes et une insuffisance de ressources pour mener des enquêtes judiciaires approfondies. Ce manque de moyens s’étend aussi au Parquet National Financier, qui ne dispose toujours pas des effectifs prévus à sa création en 2014.
Ces manques de moyens pour la justice face à des évadés fiscaux qui sont ultra organisés, qui sont épaulés par des intermédiaires très compétents et protégés par une législation largement défaillante. Cela conduit à une véritable injustice avec des fraudeurs qui ne sont jamais punis ou si peu. Par exemple, le mécanisme des Conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP), qui est une forme de « justice négociée » avec les grandes multinationales, leur permettant de payer des amendes plutôt que d’être condamnées, ce qui renforce l’impunité des fraudeurs.
Quant au Conseil d’évaluation des fraudes, mis en place par le gouvernement précédent, c’est une véritable mascarade. En témoigne la présence, parmi ses membres, d’Agnès Verdier-Molinié, directrice de l’Ifrap, un think tank connu pour ses positions hostiles à la fonction publique.
Le dénigrement de l’impôt, pilier fondamental de la solidarité et du financement des services publics, fait parti de la stratégie politique néolibérale d’Emmanuel Macron. Le laisser-faire face à l’évasion fiscale mine le consentement à l’impôt, ce qui est primordial pour la cohésion sociale. Et ce manque à gagner est aussi un manque d’argent pour le financement des services publics. C’est donc des services publics qui vont de plus en plus dysfonctionner et ce sont des gens qui vont de plus en plus se demander pourquoi eux, ils payent des impôts pour des services auxquels ils n’ont plus accès.
En somme, le gouvernement se fait le complice de l’évasion fiscale, c’est pourquoi il est urgent que tous et toutes, citoyens et citoyennes, nous œuvrons pour pour que ça devienne un sujet central de nos revendications.
Intervention de Charlotte Leduc lors du Forum de la justice fiscale (05/10/24)
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