Plutôt qu’organiser un « Téléthon de la honte », rétablissez l’ISF, Monsieur Darmanin !

vendredi 3 avril 2020, par Maxime Combes

L’appel aux dons plutôt que lever l’impôt est-il la nouvelle doctrine de l’exécutif ? En annonçant une plateforme de dons en ligne pour que les « particuliers ou entreprises apportent leur contribution à l’effort de solidarité de la nation envers les plus touchés », Gérald Darmanin illustre à nouveau l’incurie d’un gouvernement qui se refuse à prendre des mesures à la hauteur des enjeux.

Il y a des appels à la « solidarité nationale » qui sonnent comme une invitation à l’indignation collective. Celui que Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, a prononcé ce lundi 30 mars en fait partie. Annoncer vouloir mettre sur pied « une plateforme de dons » pour que les « particuliers ou entreprises apportent leur contribution à l’effort de solidarité de la nation envers les plus touchés » est à la fois extravagant et indigne. Même pour alimenter le fonds de solidarité lancé par l’État pour aider les petites entreprises et les indépendants.

Extravagant parce qu’on attend de l’exécutif qu’il prenne des décisions courageuses et visionnaires à la hauteur des difficultés que nous traversons. Dans cette période de doutes et d’angoisse, nous avons collectivement besoin de garanties et de certitudes pour résoudre les difficultés actuelles et entrevoir une amélioration de la situation : les pouvoirs publics doivent débloquer des financements pérennes, prévisibles et suffisants. Pas que le gouvernement se lance dans l’organisation hasardeuse d’un Téléthon géant, aussi gênant qu’inapproprié.

Indigne parce que les personnels soignants, et, plus largement, toutes celles et tous ceux qui prennent soin de nous, risquent leur vie quotidiennement en raison de l’incurie d’un gouvernement défaillant incapable d’assurer à chacun.e le matériel nécessaire pour se protéger. Pourvoir aux besoins des hôpitaux et amortir les conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire nécessitent immédiatement des financements publics et pérennes, pas un appel à dons ponctuel et incertain.

« Appels aux dons ? Quelle honte ! »

Les associations et les œuvres caritatives ont besoin de donatrices et donateurs.

L’État, lui, doit s’appuyer sur les contribuables, c’est-à-dire les individus, ménages et entreprises qui, assujettis à l’impôt, contribuent financièrement à son bon fonctionnement et aux services publics qu’il assure. Les soignants eux-mêmes le disent : « Les appels au don ? Quelle honte ! » pour la 6e puissance mondiale, dans un pays où l’évasion fiscale est évaluée entre 60 et 100 milliards d’euros par an et où les entreprises du CAC40 prévoient de verser près de 50 milliards d’euros de dividendes.

Après avoir permis aux entreprises d’allonger la durée de travail journalière et hebdomadaire, et les avoir autorisées à imposer une semaine de vacances à leurs salariés en période de confinement, le gouvernement veut-il à nouveau se défausser de sa responsabilité en s’appuyant sur le bon vouloir de chacun.e d’entre nous pour venir en aide aux petites entreprises ?

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Il est temps de réhabiliter l’impôt, et d’arrêter de le délégitimer. L’impôt est au fondement de ce qui permet de faire société : vivre ensemble, de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. En prélevant davantage sur les riches que sur les pauvres, l’impôt permet d’assurer la cohésion sociale et de financer les services publics, ces services publics dont on perçoit bien qu’ils manquent cruellement de moyens.

Réhabiliter l’impôt c’est d’abord le rendre plus progressif, moins pesant sur celles et ceux qui ont peu, et plus exigeant envers celles et ceux qui accumulent sans limite. Tout l’inverse de ce qu’Emmanuel Macron a fait depuis son arrivée au pouvoir : toutes les études le montrent, la suppression de l’ISF et la création de la Flat tax sur le capital ont fait des 1% des ménages les plus aisés les grands gagnants de la politique fiscale de l’exécutif.

Non, on ne financera pas les hôpitaux par des appels à dons. Mais en s’assurant que chacun.e, entreprises multinationales comprises, paient leur juste part d’impôt. Lutte implacable contre l’évasion fiscale, rétablissement de l’impôt sur la fortune et de la progressivité de l’imposition sur les revenus du capital, suppression du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), voilà les mesures que l’exécutif devrait prendre s’il était un tantinet conséquent.

Si la crise économique qui s’annonce est plus dure qu’en 1929, comme l’affirme Bruno Le Maire, on n’organise pas un Telethon. On met à contribution les millionnaires et les milliardaires de ce pays : les taux supérieurs de l’impôt sur le revenu ont atteint 70% à 94% entre les années 30 et le début des années 80 aux États-Unis. Et près de 80% en France, sous la présidence du général de Gaulle au milieu des années 1960. Chiche ?

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