Prise de parole rassemblement soutien aux expulsés de NDDL

Paris, Stalingrad le 10 décembre 2015
vendredi 11 décembre 2015, par Attac France

Merci d’avoir répondu à notre appel à ce rassemblement de soutien ! Si nous nous retrouvons en effet ici, profondément indignés, ce jeudi 10 décembre, c’est que commence en ce moment même à Nantes une audience en référé-expulsion au Tribunal de Grande Instance de Nantes. Cette assignation concerne 4 exploitations agricoles et 11 familles : paysans, habitants locataires ou propriétaires historiques. Nous allons vous parler d’eux et de leur lutte, qui est aussi la nôtre !

Contexte de l’audience

Mais comment ne pas évoquer d’abord le contexte de cette audience, contexte marqué par la tenue de la COP et l’état d’urgence. La COP 21 vit ses derniers jours, et avec elles les beaux discours du gouvernement d’une France qui serait exemplaire dans la lutte contre le réchauffement climatique.

  • Alors que ce gouvernement, docile élève de l’Europe ultra-libérale, n’a de cesse de promouvoir le développement d’une agriculture soi-disant « durable » !
  • Alors qu’il soutient une agro-industrie excessivement polluante, qui détruit autant les sols qu’elle condamne les petites fermes !
  • Alors qu’il a une politique de subventions et de soutien aux grosses propriétés au détriment de l’agriculture paysanne !
  • Alors qu’il laisse se multiplier jusqu’à l’absurde les projets touristico-commerciaux qui dévorent ou artificialisent les terres agricoles !
  • Alors que la faiblesse toute relative des émissions de carbone de la France ne tient qu’au développement de ses réacteurs atomiques, qu’elle cherche d’ailleurs à exporter toujours davantage, sans politique claire et soutenue de développement des énergies renouvelables, laissant aux générations futures le fardeau des déchets et du démantèlement des centrales !

Et nous pourrions développer bien d’autres cas de l’hypocrisie de ce pouvoir !

L’état d’urgence

L’État d’urgence proclamé à la suite des attentats de novembre crée également un contexte très particulier ! Il ne nous a pas fallu très longtemps pour voir qui a été visé, et continue à l’être, par cet état d’urgence : Assignations à résidence pour la durée de la COP 21, sur simple présomption du fait que les personnes visées seraient susceptibles de se mobiliser..., gardes à vue... concernent des militants réputés « écologistes » !

Interdictions de manifester, avec une répression sans précédent des militants bravant l’état d’urgence pour rappeler que le droit de manifester est un droit humain ! Nous avons vu le 29 novembre place de la République à Paris la violence policière, les coups, les blessures, l’es centaines d’embarquement de personnes prises dans des nasses soigneusement construites !

Il s’agit d’instaurer la peur, de verrouiller le débat public et de casser les solidarités ! La lutte pourrait aussi être concernée directement par l’état d’urgence sur un autre plan car selon M.Stephan de Ribou, sous-préfet spécialement nommé auprès du préfet pour mener à bien le projet d’aéroport, « le dossier de NDDL ne serait désormais plus prioritaire, les moyens de police devant se centrer sur la lutte contre les terroristes et non sur l’expulsion des habitants pour vider la zone » (c’est lui qui parle, bien évidemment !). Mais il semble bien que les expulsions soient toujours à l’ordre du jour !

Audience de Nantes du 10 décembre 2015

Revenons en effet maintenant à cette audience d’aujourd’hui à Nantes, et aux personnes qui y sont concernées. AGO/Vinci qui a obtenu en 2010 la concession de la construction et de la gestion du futur éventuel aéroport, agit pour le compte de l’État via le ministère de l’écologie ; il est inimaginable qu’il ait pu lancer cette procédure sans un feu vert au plus haut niveau. Ses prétentions sont exorbitantes :

  • l’expulsion immédiate, sous peine d’astreinte de 200€‚ par jour et par dossier (4 pour certains) et si besoin avec le concours de la force publique.
  • saisie et séquestration des biens, outils de travail et cheptel ;
  • sans qu’il soit tenu compte de la trêve hivernale.

Ces demandes révoltantes sont sans précédent... On peut d’ailleurs rappeler que pour M. Ramery, magnat du BTP devenu « paysan » avec la ferme-usine des mille vaches, qui dépasse de 380 bêtes son autorisation, il n’a que 780 euros d’astreinte journalière, et qu’il n’a jamais été question de lui enlever ses vaches !

Toutes les personnes assignées sont concernées par l’accord politique de sortie de la ’grève de la faim’ de mai 2012, passé avec M. Hollande le 8 mai, qui protégeait contre l’expulsion les habitant-e-s vivant sur la zone avant la déclaration d’utilité publique, c’est pourquoi elles sont parfois désignées comme ’historiques’. Cet accord a été confirmé en 2014 par M. Ayrault et Valls. et élargi aux recours environnementaux (lois sur l’eau, espèces protégées) ; ces derniers ne sont pas épuisés, ils ont été jugés seulement en première instance, un acte juridique en comportant éventuellement trois : première instance, appel, cassation ou Conseil d’état.

Ces personnes ont affronté les tracasseries policières, administratives et judiciaires liées à l’expropriation ou l’expulsion : Marcel a été l’un des grévistes de la faim, Sylvain, accusé d’agression envers les forces de l’ordre avec arme (son tracteur) pour avoir essayé de protéger des manifestants en s’interposant avec sa remorque a été blanchi de cette accusation. Sylvie, Brigitte ont fait un énorme travail de communication, ont résisté aux forces policières... Tous, toutes sont des âmes de la résistance, tou.te.s ont porté la lutte ...

Rappel historique de la lutte contre ce grand projet inutile

Il faut refaire un peu d’histoire. Rappelons que cette lutte dure depuis plus de 40 ans, et que les paysans y ont joué un rôle déterminant dès la création de la Zad (zone à aménagement différé) en obtenant la possibilité d’installation de jeunes sur les terres acquises par le Conseil Général grâce à son droit de préemption. Hervé, l’un des paysans concernés aujourd’hui, s’est installé « hors cadre » sur les terres de son père dès 1978.

Après le réveil du projet en 2000, la lutte s’est élargie d’abord par la création de l’Acipa en 2000, ; puis, autour d’elle, la Coordination des opposants s’est structurée petit à petit. Elle regroupe actuellement près de 55 organisations variées, syndicales (Confédération Paysanne, Solidaires), des collectifs (élus...), des associations citoyennes ou de protection de l’environnement, des partis politiques. D’innombrables réunions d’informations, d’actions de mobilisations diverses, d’opposition sur le terrain au début des travaux... ont accompagné la construction d’une vraie expertise citoyenne, et le lancement de nombreux recours juridiques. Ces derniers n’étant pas suspensifs, c’est la lutte qui impose le respect de la « trêve ».

Ces habitants et paysans « historiques »ont été rejoints sur la ZAD (devenue ’zone à défendre’), surtout à partir de 2009 et après 2012, par de nouveaux occupants, pour éviter que le territoire ne se vide et pour y inventer d’autres formes de vivre ensemble, d’autres manières d’habiter, de cultiver... Des expériences prometteuses dans les domaines les plus variés ont vu le jour, et se poursuivent patiemment.

Malgré les engagements de mai 2012, une tentative ultra-violente d’expulsion de la zone de ces habitants les plus récents a eu lieu en octobre 2012. Nous en avons tous en mémoire le souvenir ou les images. La résistance déterminée des habitants et opposants, soutenus par un immense élan de solidarité des populations proches et la création de comités de soutien un peu partout, a mis en échec la stratégie policière de l’État pour vider la ZAD.

Malgré les propos de M. Valls, aucune date n’est actuellement fixée pour le début des travaux, il n’y a donc aucune espèce d’urgence. C’est si vrai que, dans le même temps, Vinci signe des baux précaires pour que des parcelles de la ZAD soient mises en culture la saison à venir. Face à l’échec de la stratégie policière de 2012, une autre stratégie est maintenant lancée : celle de frapper au coeur et au porte-feuille des paysans et habitants, par les menaces sur les troupeaux, les maisons, ainsi que par les astreintes financières. Il s’agit de mettre à genoux les paysan.ne.s et habitant.e.s. Leur départ permettrait de vider plus facilement la ZAD, puisque n’y resteraient plus alors que les « zadistes » traités d’affreux minoritaires ultra-violents quand ce n’est pas de « terroristes »

En cela le référé menace, non seulement les personnes assignées,

  • mais aussi tous les occupant-e-s de la zone,
  • mais aussi tous les opposants aux grands projets inutiles et imposés !
    Il cible des lieux de vie, de solidarité, d’organisation, d’invention d’autres mondes possibles car nous refusons celui du profit, du béton et de la terreur.

Et en cela le référé-expulsion nous menace tous.

Nous exigeons l’abandon du projet d’aéroport, et sans aucun délai l’abandon de la procédure à l’encontre des personnes concernées. AGO doit de se désister de ses demandes d’expulsion des habitants historiques du site. De fortes mobilisations seront aussi certainement nécessaires dans les jours et semaines à venir, nous vous demandons d’être particulièrement attentifs aux appels. Nous ne gagnerons pas sans vous ! Merci !

Au nom des militants et collectifs NDDL présents à Paris, ayant appelé à ce rassemblement.

P.-S.

Crédit photo : Abdallahh, CC BY 2.0.

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