Manger partout dans le monde ou conduire, il faut choisir

lundi 28 septembre 2009, par Aurélie Trouvé

Cet article est issu notamment de l’article de J. Berthelot, 2009, « Agrocarburants et sécurité alimentaire », Revue politique et parlementaire , n° spécial. Pour une version plus détaillée, voir : http://www.solidarite.asso.fr/home/... . Pour une vision générale des politiques agricoles, voir le livre d’Attac Europe-Coordination européenne Via campesina, Souveraineté alimentaire : que fait l’Europe ? , Paris, Syllepse, 2009. La crise écologique et en particulier climatique révèle les limites physiques d’un mode de développement qui nous est imposé par les logiques du productivisme et du capitalisme financier. Seule une diminution radicale de la consommation énergétique et matérielle globale permettrait de répondre à la gravité de la situation.

C’est ce qu’indique le rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC), lorsqu’il préconise une diminution de 40 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2020 (par rapport à 1990) pour les pays industrialisés, afin d’avoir une chance de contenir un réchauffement climatique irréversible. Cet objectif ne pourra être obtenu que par des mesures de sobriété et d’efficacité énergétiques, qui répondraient en même temps au problème de l’épuisement des ressources naturelles non renouvelables. Mais les partisans du système actuel multiplient les tentatives pour faire croire à une compensation de l’épuisement des ressources naturelles par la technique et la science. Sous couvert de « capitalisme vert » et de « croissance verte », il s’agit de trouver de nouveaux moyens de profit grâce à des investissements enduits d’un vernis prétendument écologique. Nouveau terrain d’accumulation du capital, ces investissements dispensent de toute remise en cause de notre mode de production et de consommation et d’un nouveau partage des richesses. Dans ce contexte, on comprend mieux les discours qui glorifient les agrocarburants. Ceux-ci comprennent les carburants liquides de première génération issus de produits agricoles, à côté de ceux de seconde génération issus de produits ligno-cellulosiques ou d’algues attendus à moyen terme. La production mondiale a crû de façon exponentielle depuis 2000, à une moyenne de 15 % par an ces cinq dernières années. En 2008, elle représente 2 % de la consommation mondiale du carburant de transport, mais déjà 40 % au Brésil et 4,5 % aux États-Unis pour les carburants essence, et 3 % pour le biodiesel dans l’Union européenne [ 34 ]. Une cinquantaine de pays ont des programmes d’agrocarburants afin de réduire leur dépendance aux carburants fossiles et leur impact sur les gaz à effet de serre (GES). C’est le cas des États-Unis depuis notamment l’Energy Independence and Security Act de 2007, mais aussi de l’Union européenne avec son paquet climat-énergie de 2008. Les États-Unis ont produit 42 % du total mondial en 2008, le Brésil 33 % et l’Union européenne 13 %. Si les États-Unis produisent essentiellement de l’éthanol (48 % du total mondial, à partir du maïs) ainsi que le Brésil (39 % du total, à partir de canne à sucre), l’Union européenne privilégie le biodiesel (les deux tiers du total mondial, essentiellement à partir d’huile de colza). La France n’est pas en reste : elle a produit 26 % des agrocarburants de l’Union européenne en 2008 (l’Allemagne en a produit 32 %) et elle veut atteindre dès 2015 les 10 % d’agrocarburants dans les carburants pour transport que s’est fixés l’Union européenne pour 2020. Et pourtant, la production industrielle d’agrocarburants est très contestable, aussi bien sur le plan économique et social qu’au niveau de l’environnement. Surtout, ils ont une responsabilité importante dans la flambée des prix agricoles et sont extrêmement dangereux dans un contexte de crise alimentaire mondiale, qui ne fait que s’amplifier depuis 2006. 115 millions de personnes supplémentaires en 2007 et 2008 sont sous-alimentées : plus d’une personne sur six dans le monde souffre aujourd’hui de faim chronique.

La responsabilité des agrocarburants dans la flambée des prix agricoles depuis 2006

Même si l’explosion des agrocarburants ne doit pas occulter les autres causes de la flambée des prix agricoles, – notamment la libéralisation des marchés agricoles et les spéculations nouvelles sur les marchés à terme –, elle a été une cause majeure de cette flambée de 2006 à 2008. C’est ce qu’ont souligné toutes les institutions internationales et de nombreux gouvernements. Ainsi la FAO (organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) souligne que, les trois quarts des 40 millions de tonnes de hausse de la demande mondiale en maïs en 2007 ont été affectés à l’éthanol et que le biodiesel de l’Union européenne a absorbé en 2007 25 % de la production mondiale de colza et 70 % de ses échanges mondiaux [ 35 ]. Puisqu’il y a une relation inverse entre les niveaux des stocks et des prix mondiaux, les États-Unis et l’Union européenne portent une responsabilité écrasante dans la flambée des prix mondiaux des céréales : la baisse de leurs stocks céréaliers a dépassé celle des stocks mondiaux de 2005-06 à 2007-08 alors que ceux de la Chine et de l’Inde ont augmenté [ 36 ]. Ces deux pays ont d’ailleurs été montrés du doigt à tort pour la hausse de leur consommation de viande [ 37 ], même si les changements de mode alimentaire dans ces pays sont porteurs de déséquilibres futurs. De plus, contrairement aux États-Unis et à l’Union européenne, ils ont fortement réduit leur production d’agrocarburants de 2007 à 2008. Quant au Brésil, s’il n’a pas de responsabilité directe dans la hausse des prix des céréales, puisque l’éthanol y est issu de la canne à sucre, il a une responsabilité indirecte du fait de la croisade mondiale du président Lula pour promouvoir les agrocarburants et finaliser le Cycle de Doha. En outre, l’explosion de la production de maïs des États-Unis consacrée à l’éthanol a joué un rôle moteur dans la flambée des prix mondiaux des autres grains, notamment le blé et le soja, qui lui sont substituables. Et, comme le maïs et le soja sont surtout destinés à l’alimentation animale, la flambée de leurs prix mondiaux s’est répercutée sur les prix des produits animaux. Les spéculateurs sur les marchés agricoles mondiaux ont également alimenté cette hausse des prix, forts du signal donné par le Congrès américain pour une production croissante d’agrocarburants. Au final, le prix du maïs restait supérieur de 61 % à celui de 2005 [ 38 ]. Et les projections FAO-OCDE de prix pour 2008-2017 prévoient une hausse de 40 à 60 % pour le blé et le maïs et de 80 % pour les huiles végétales par rapport à 1998-2007, si les objectifs d’agrocarburants ne sont pas remis en cause.

Les importations d’agrocarburants de l’Union européenne et des États-Unis

Les États-Unis et l’Union européenne sont importateurs nets de produits alimentaires [ 39 ] : malgré leurs relatives bonnes conditions agronomiques, ils sont incapables de nourrir seuls leurs populations. Ce déficit est passé de 21 à 24 milliards d’€ pour l’Union européenne de 2007 à 2008 (dont 13,6 et 13,3 milliards d’€ dus aux poissons) mais la forte hausse des prix agricoles a permis aux États-Unis de passer d’un déficit de 845 millions de $ en 2007 à un excédent de 17 milliards de $ en 2008 (malgré des déficits en poissons de 10 et 10,5 milliards de $). Cette situation ne peut qu’empirer pour l’Union européenne avec le développement des agrocarburants, qui concurrencent directement les productions à finalité alimentaire... dans un contexte où les perspectives sont d’au moins 9 milliards d’humains en 2050. L’Union européenne et les États-Unis sont importateurs nets d’éthanol, tous deux principalement du Brésil. De même, l’Union européenne est fortement importatrice de biodiesel (surtout des États-Unis), tandis que le détournement de ses propres cultures de colza l’ont amenée à importer de façon accrue d’autres huiles pour ses besoins alimentaires. Les objectifs européens de 10 % d’incorporation d’agrocarburants dans les carburants de transport sont impossibles à atteindre, sauf à augmenter grandement les importations. Ainsi, pour le Centre commun de recherche de la Commission européenne, dont celle-ci a refusé d’accepter les conclusions, « Si les biocarburants de seconde génération n’apportent pas de contribution significative en 2020, le pourcentage des importations s’élèverait de 56 à 64 %, dont 80 % pour le biodiesel » [ 40 ]. L’objectif de l’Union européenne de 10% d’éthanol dans l’essence pour 2020 correspondrait à 30 % du blé produit en 2005 [ 41 ] ! De même utiliser 10% de biodiesel nécessiterait 2,6 fois la production actuelle de colza [ 42 ]. Ainsi, les pays riches tenteront de plus en plus de couvrir par l’importation leurs besoins alimentaires à long terme et leur consommation d’agrocarburants.

Le lien avec l’accaparement des terres et l’éviction de la paysannerie

L’accaparement des terres dans les pays en développement (PED) par de puissants opérateurs publics ou privés a visé en premier lieu la production alimentaire pour la réexporter vers le pays investisseur. Mais le boom des agrocarburants porte également une responsabilité forte dans cet accaparement des terres. Celui-ci est réalisé sous la forme d’achat ou le plus souvent de bail à très long terme. Il aurait porté sur plus de 7 millions d’hectares de 2006 à 2009 [ 43 ]. C’est le cas en particulier dans cinq pays africains – Éthiopie, Ghana, Madagascar, Mali et Soudan – où les projets conclus depuis 2004 portent sur 2,5 millions d’hectares et, d’une façon plus qualitative, au Mozambique et en Tanzanie, deux pays dans lesquels la proportion des projets pour agrocarburants est dominante et est essentiellement orientée vers l’exportation. On peut citer notamment les 91 000 hectares loués pour cinquante ans renouvelables au Mozambique par la sucrerie Sena, dont le groupe coopératif français Tereos et sa filiale brésilienne Guarani possèdent la majorité du capital : une grande partie ira vers l’Union européenne, dans le cadre de sa décision « Tout sauf les armes » de 2001, qui autorise les pays les moins avancés à exporter des produits agricoles sans protection ni quota, notamment le sucre et l’éthanol. Ces exploitations agro-industrielles coloniales seront aussi de puissants leviers pour la libéralisation des échanges. Tout se passe comme si la spéculation financière, qui avait amplifié la bulle des prix des matières premières en 2007 et 2008, avait été remplacée par la course à l’accaparement des terres les plus productives des PED par de puissants opérateurs publics ou privés, avec la caution des gouvernements de ces PED. Cet accaparement foncier pour les agrocarburants ou les produits alimentaires augmente le prix des terres (de 18 % au Brésil en 2007), qui ne sont plus à la portée des petits exploitants. C’est une lourde menace pour la sécurité alimentaire des pays ainsi colonisés, puisque ces productions exportées vers les pays investisseurs réduiront les aliments disponibles localement et augmenteront les prix alimentaires. Déjà, l’indice des prix des produits alimentaires de base peu transformés a augmenté au Brésil de 20,5 % en 2007 et de 8,2 % en 2008 [ 44 ]. C’est aussi un véritable sacrilège pour ces communautés paysannes, dont la relation avec la « Madre Tierra » va bien au-delà d’un simple moyen d’existence matérielle : « La terre appartient à une grande famille dont quelques-uns sont vivants, un grand nombre sont morts et le plus grand nombre est encore à naître » (définition d’un chef coutumier nigérian). L’éviction des petits paysans s’accompagne souvent de violation des droits de l’homme, en particulier en Amérique latine. Au Brésil, 40% de la population brésilienne vit dans un état d’insécurité alimentaire [ 45 et le pays compte 4,5 millions de paysans sans terre. Plusieurs milliers d’esclaves travaillent dans une vingtaine d’exploitations de canne à sucre, dont la moitié de la production nationale est allée à l’éthanol. Les coupeurs de canne subissent des cadences inouïes, du fait des exigences accrues de productivité [ 46 ]. En Colombie, 263 000 familles paysannes ont été expropriées de 2001 à 2005 par les compagnies d’agrobusiness et les paramilitaires pour y produire principalement de l’huile de palme. François Houtart s’est rendu en 2007 auprès d’une communauté paysanne dans le Nord du Choco où «  On leur disait : “si vous ne voulez pas vendre vos terres, nous les achèterons à vos veuves”. Malheureusement les faits ont suivi. Dans la communauté que nous visitons, 113 personnes ont été assassinées, d’abord par l’armée, puis par les paramilitaires. Il en a été de même dans bien d’autres endroits ». Ce mouvement a été favorisé par la possibilité donnée aux firmes de gagner des permis d’émission de CO2 en demandant la qualification des projets de plantation d’agrocarburants dans le cadre du mécanisme de développement « propre » mis en place par le protocole de Kyoto.

Un bilan économique et énergétique mitigé, un impact désastreux pour les ressources naturelles et l’équilibre des écosystèmes

Les agrocarburants n’ont pu être lancés aux États-Unis et dans l’Union européenne et ne sont rentables aujourd’hui que grâce à de fortes subventions, détaxations et protections à l’importation. Ainsi, les agrocarburants de l’Union européenne ont bénéficié de 4,5 milliards d’euros de subventions en 2006 [ 47 ]. L’éthanol de l’Union européenne est protégé par un droit de douane de 0,192 € par litre, soit 40 % de la valeur des produits importés. Cette protection sur les importations des autres PED va baisser si le Cycle de Doha est finalisé, mais surtout si l’accord de libre-échange avec le Mercosur  , en sommeil depuis 4 ans, finit par être conclu. Déjà le commissaire au commerce de l’Union européenne Peter Mandelson a permis au Brésil, en décembre 2008, d’exporter sans droits de douane 6 % de la consommation d’éthanol de l’Union européenne s’il ouvre davantage son marché intérieur aux exportations industrielles et de services afin de finaliser le Cycle de Doha [ 48 ]. Quant aux droits de douane sur le biodiesel, ils ne sont que de 6,5 %, tandis que les importations d’huile sont à droit nul. Cela a déjà incité les PMA et les pays ACP  (Afrique-Caraïbes-Pacifique) à lancer des projets d’agrocarburants pour les exporter dans l’UE, au détriment de leur sécurité alimentaire. Or, selon la FAO, le déficit alimentaire des pays d’Afrique subsaharienne (qui sont tous des pays ACP et regroupent la majorité des PMA) a bondi de 1,9 milliards de $ en 1995 à 8,1 milliards de $ en 2007, et même à 12,7 milliards de $ en 2007 si l’on exclut leurs exportations de café-cacao-thé-épices. Même si l’on ne peut nier une certaine efficacité énergétique des agrocarburants, elle est limitée. Elle correspond au rapport entre valeurs énergétiques dégagées et dépensées par hectare (pour la culture et la transformation, y compris les coproduits pour l’alimentation animale). Cette efficacité est de 5,82 pour la canne à sucre, mais seulement de 1,35 pour l’éthanol de blé et de 2,23 pour le biodiesel de colza [ 49 ]. La principale raison affichée par l’Union européenne et les États-Unis pour développer les agrocarburants est la réduction des émissions de GES dus aux carburants fossiles. Mais il faut aussi tenir compte du changement d’affectation des sols. Ainsi, pour la FAO, « Alors que le maïs produit pour l’éthanol peut entraîner des économies de gaz à effet de serre d’environ 1,8 tonne de gaz carbonique par hectare et par an, (…) la conversion des herbages pour produire ces cultures peut émettre 300 tonnes par hectare et la conversion des forêts peut émettre 600 à 1000 tonnes par hectare » [ 50 ]. Ainsi l’extension de la canne à sucre au Brésil a déplacé les autres productions – soja, céréales et élevage bovin – vers le Cerrado et l’Amazonie, au détriment de leurs forêts. La production de soja – de plus en plus destinée au biodiesel – a augmenté d’environ 20% par an en Amazonie depuis 1990 et le nombre de bovins y a augmenté de moitié de 1998 à 2008. Le déboisement a porté en moyenne annuelle sur 10 000 km2 en Amazonie et 20 000 km2 dans le Cerrado [ 51 ]. Or le déboisement des forêts tropicales est responsable de 20% environ des émissions mondiales de GES, plus que les transports. Il résulte de ces subventions que, selon l’International Institute for Sustainable Development, le coût pour le contribuable de l’Union européenne de la tonne de CO2 évitée est extrêmement élevé, au moins 2 100 € la tonne (€/t) pour l’éthanol de céréales, 575 €/t pour celui de betteraves, 600 €/t pour le biodiesel et 220 €/t pour l’huile de cuisson... contre 40 €/t évités pour l’utilisation thermique de la biomasse. Des chiffres à rapprocher des 17 €/t décidés par Nicolas Sarkozy ou même des 32 €/t proposés par le rapport Rocard. L’impact sur l’environnement concerne aussi les ressources en eau, le maintien de la qualité des sols et de la biodiversité. Les forêts de l’Amazonie et du Cerrado, grignotées par les surfaces agricoles, sont extrêmement riches en biodiversité. Aux États-Unis la forte hausse de production de maïs pour l’éthanol a poussé à la culture en continu au lieu des rotations maïs-soja. Elle s’accompagne d’une forte consommation d’engrais et de pesticides charriés par le Mississippi, contribuant à l’extension de la « zone morte » privée d’oxygène dans le golfe du Mexique. De même, pour la canne à sucre au Brésil, on constate une forte pollution de l’eau et un appauvrissement des sols. Or, si le GATT autorise chaque pays à restreindre les importations pour garantir « la conservation des ressources naturelles épuisables », il interdit de limiter les importations de produits dont la production dégraderait l’environnement dans le pays exportateur ou au niveau planétaire, au mépris des conventions multilatérales sur l’environnement. C’est ce qu’ont montré les condamnations des États-Unis dans les affaires du thon mexicain en 1997 et des crevettes d’Indonésie en 1999.

En conclusion

Les agrocarburants ne bénéficient qu’à l’agrobusiness national et international, et aux grandes exploitations qui profitent de la hausse des prix agricoles pour marginaliser les plus petites. Ils vont à l’opposé d’un développement soutenable sur les plans énergétique, économique, social et environnemental, ce qui n’empêche pas certains pays de les soutenir fortement. Le Brésil et l’Asie du Sud-Est mettent en avant les profits réalisés grâce à des exportations accrues vers l’Union européenne et les États-Unis. Ces derniers justifient leur soutien par l’attente d’une seconde génération, jugée plus efficace et qui bénéficiera des infrastructures et des marchés créés par la première. Mais cela ne changera rien à la concurrence avec les surfaces à finalité alimentaire et pour les autres usages du bois, en particulier le bois énergie dont l’efficacité énergétique est très supérieure. Sans compter que la rentabilité de cette seconde génération reste problématique, malgré les installations pilotes en cours. S’il est de bon ton d’affirmer qu’elle sera rentable entre 2015 et 2020, l’Agence internationale de l’énergie ne la voit pas avant 2030. Il n’est pas question ici de condamner toute production d’agrocarburants : ceux-ci peuvent être produits à petite échelle, dans la recherche par exemple d’une autonomie énergétique des exploitations. Il s’agit par contre de condamner la production telle qu’elle est envisagée actuellement, avec des modes de production industriels et des objectifs qui restent insoutenables sans importations massives. Ce qui a conduit Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, à demander un moratoire sur cinq ans pour évaluer plus précisément les impacts de la production d’agrocarburants. Attac soutient ce moratoire, y compris pour expérimenter des solutions alternatives. Et, quelles que soient ces solutions, il sera toujours plus important de répondre dès maintenant à une diminution globale de notre consommation énergétique et à d’autres exigences qui se nomment besoins humains, équité et soutenabilité écologique.

     À chacun son agrocarburant Il y a deux types d’agrocarburants, adaptables les uns aux moteurs à essence, les autres aux moteurs diesel. Dans le premier cas, il s’agit de produire de l’éthanol par la fermentation du glucose. Pour cela, on utilise soit des plantes naturellement riches en sucre (canne à sucre, betterave sucrière), soit des plantes riches en amidon, dont on extraira ensuite le glucose (céréales, notamment maïs et blé). Dans le second cas, il s’agit simplement de produire de l’huile, pompeusement baptisée “biodiesel”, et donc de cultiver du colza, du soja ou du tournesol, ou encore de planter des palmiers à huile. Ensuite, qu’il s’agisse d’éthanol ou de biodiesel, on effectue des mélanges avec les carburants actuels, dans des proportions qui impliquent ou non un changement de moteur. Ce ne sont là, nous dit-on, que des agrocarburants de « première génération ». Viendront ensuite ceux de deuxième génération, avec par exemple des micro-algues oléagineuses ou des arbres à croissance rapide, génétiquement modifiés, dont on pourra facilement extraire la cellulose, aux propriétés identiques à celles de l’amidon.

Jacques Berthelot, chercheur, économiste, Aurélie Trouvé, ingénieure agronome septembre 2009

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