Le rapport
Synthèse
Une fiscalité en faveur des plus riches
Aucun-e des candidat-es ne veut revenir sur le prélèvement forfaitaire unique (PFU) et l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui remplace l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et ne propose de procéder à une « revue des niches fiscales ». Tou-tes proposent de prolonger voire d’aggraver l’affaiblissement de la progressivité du système fiscal. Valérie Pécresse veut ainsi doubler le crédit d’impôt pour emploi d’un-e salairié-e à domicile, ce qui ne bénéficierait pas aux classes moyennes mais seulement aux plus aisés. Eric Zemmour veut doubler le quotient familial au profit des familles riches, les deux voulant aussi renforcer l’abattement sur la résidence principale à l’IFI. Un IFI que Marine Le Pen veut remplacer par un impôt sur la fortune financière. Ceci se traduirait par un report des placements sur l’immobilier, remplaçant la rente financière qu’Emmanuel Macron, Valérie Pécresse et Eric Zemmour proposent de favoriser par la rente immobilière.
Les 4 candidat-es veulent aussi baisser les droits de donation et de succession, plus ou moins fortement selon les propositions. Aucun-e ne précise qu’il existe des abattements utilisés par les plus riches pour transmettre une part de leur patrimoine sans payer d’impôt et que les pauvres et les classes moyennes ne paient pas ces impôts, à de rares exceptions près (succession d’un parent lointain par exemple). Ces propositions auraient pour conséquence une explosion des inégalités de revenus et de patrimoines, celles-ci étant déjà en hausse.
Une fiscalité en faveur des grandes entreprises
Aucun-e des candidat-es ne veut remettre en cause les mesures d’Emmanuel Macron que constituent la baisse du taux nominal de l’impôt sur les sociétés (IS) et la baisse des impôts dits « de production » (soit les impôts locaux et sociaux des entreprises). Aucun-e ne souhaite remettre en cause les « niches fiscales » (qui bénéficient essentiellement aux grandes entreprises) de l’IS. Tou-tes veulent poursuivre la baisse des impôts de production, comme le réclame le Medef, voire renforcer des niches fiscales applicables à l’IS, comme le crédit d’impôt recherche dont le coût budgétaire record de 7,4 milliards d’euros est inversement proportionnel à son impact en matière de recherche...
Mieux vaut être riche pour frauder (fort avec les faibles, faible avec les forts)
Ces candidat-es ne veulent pas renforcer la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales mais préfèrent s’attaquer à la « fraude sociale », notamment la fraude aux prestations sociales. Celle-ci est estimée à 3 milliards d’euros, contre 20 milliards d’euros pour la fraude aux cotisations sociales (travail et revenus non déclarés) et 80 milliards d’euros pour la fraude fiscale. Tous les quatre omettent aussi de rappeler que le montant du non recours aux prestations sociales est bien supérieur à celui des fraudes aux prestations sociales : chaque année, plus de 10 milliards d’euros d’aides sociales ne sont pas réclamés par leurs potentiels bénéficiaires. Fort avec les faibles, faible avec les forts : voici l’orientation proposée.
Pouvoir d’achat : l’illusion par le sous-financement de la protection sociale
Aucun-e des candidat-es des inégalités ne propose de revaloriser le SMIC ni les salaires. Mais tou-tes promettent d’augmenter le pouvoir d’achat en réduisant les cotisations sociales salariales dans un tour de passe-passe synonyme de baisse des ressources de la Sécurité sociale. Il s’agit simplement de prendre d’une main ce qu’on fait semblant de donner de l’autre, pour éviter toute réelle revalorisation salariale.
Vers un autre modèle social
Aucun-e des 4 candidat-es ne veut revenir sur la réforme de l’assurance chômage d’Emmanuel Macron qui a pénalisé 1,2 million de demandeur-ses d’emploi. Valérie Pécresse veut même la durcir avec, entre autres, la suspension de l’indemnisation en cas d’un seul refus d’emploi ou de formation, ce qui reviendrait à forcer les chômeurs et chômeuses à accepter n’importe quel emploi.
Tou-tes refusent de rehausser la part des dépenses de retraites dans le PIB. En proposant de « travailler plus longtemps », compte tenu des réalités démographiques et du taux d’emploi des plus de 55 ans, cela signifiera tout à la fois une période plus longue avec des revenus faibles, une pension de retraite plus basse et une période de retraite en bonne santé plus courte.
En matière de politique familiale, si Emmanuel Macron est discret, les trois autres ne cachent pas des penchants traditionalistes voire xénophobes. Valérie Pécresse et Eric Zemmour veulent notamment l’universalité des allocations familiales, ce qui ne bénéficierait qu’aux familles riches, tandis que Marine Le Pen dit vouloir soutenir les « familles françaises » avec une subvention au troisième enfant.
Une politique d’affaiblissement des services publics
La réduction du périmètre et des moyens de l’action publique répond à la logique profonde d’ensemble des propositions de ces candidat-es. En affaiblissant le système de protection sociale et les services publics, ce seraient principalement les personnes pauvres et les classes « moyennes » qui en pâtiraient. Ce sont en effet essentiellement la protection sociale et les services publics qui permettent de diminuer les inégalités : par conséquent, en les affaiblissant, les inégalités ne pourraient qu’augmenter plus rapidement.
Malgré leurs divergences, Emmanuel Macron, Valérie Pécresse, Marine Le Pen et Eric Zemmour mèneraient une politique qui renforcerait l’injustice fiscale et sociale : elles et ils sont les « candidats des inégalités ».