Si cette rencontre était inédite, la volonté de créer une alliance contre la répression grandissante n’est pas nouvelle. Il y eut le Conseil de défense des libertés créé en réaction à la loi pour renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations (avril 2019) ; et le cadre sur les libertés associatives initié par la Ligue des droits de l’homme, en réaction à loi sécurité globale (mai 2021) et à la loi confortant le respect des principes de la république (août 2021).
Face à la répression des mouvements Retraites et des mégabassines, la dynamique de défense collective a été relancée dans ces cadres, et à travers celui des Assises. Aux lois de ces dernières années, visant à étouffer la contestation des mouvements sociaux et populaires, s’ajoutent un arsenal répressif déjà conséquent et aux lois d’exception qui ont été intégrées dans la loi ordinaire au nom de la lutte antiterroriste.
Ainsi l’usage disproportionné du délit de participation à un groupement en vue de commettre des dégradations et des violences, introduit en 2010, est un exemple criant de l’instrumentalisation politique de la répression. Il a été employé pour procéder à des interpellations massives lors des manifestations gilets jaunes ou du mouvement retraites. Il est le prétexte à d’innombrables arrestations arbitraires, dont l’écrasante majorité a été classée sans suites. Un dispositif redoutable pour empêcher la contestation, alors même que les urgences sociales et écologiques obligent les mouvements sociaux et populaires à multiplier les initiatives et actions.
La politique de Macron fait le jeu de l’extrême-droite et plonge le pays dans une situation qui menace gravement la démocratie, notre modèle social, et la capacité des forces progressistes de se mobiliser :
- multiplication des interdictions de manifestation ;
- réquisitions de grévistes ;
- criminalisation des mal-logé.es (loi Kasbarian) ;
- suppression des subventions d’Alternatiba pour avoir organisé une formation à la désobéissance civile ;
- déploiement massif d’armes de guerre contre les manifestant·es à Sainte Soline et peines de prison pour avoir simplement manifesté (comme pour François membre d’Attac) ;
- dissolution des Soulèvements de la Terre et des collectifs comme la Gale ou le Bloc Lorrain ;
- interpellations arbitraires qui entravent les mouvements sociaux et tuent dans les quartiers populaires ;
- réduction des droits de l’assurance chômage ;
- libertés syndicales attaquées et syndicalistes mis à pied ;
- police qui réprime dans les lycées ;
- réforme des retraites envers et contre toutes et tous à coup de matraques, de 49.3, d’interdictions de manifestation, d’arrestations abusives et de réquisitions ;
- menaces sur les subventions de la Ligue des droits de l’homme ;
- opération policière de Wuambushu à Mayotte ;
- projet de loi sur France Travail qui prévoit de sanctionner les chômeurs·euses et allocataires du RSA ;
- réforme sur le Lycée professionnel qui mettrait les jeunes sous la coupe des patronats locaux ;
- projet de loi sur l’asile et l’immigration qui menace gravement les droits fondamentaux des personnes exilées qu’elle criminaliserait.
La liste de ces atteintes aux libertés est vertigineuse. Ses conséquences sont décuplées dans les quartiers populaires, sur les précaires et les migrant·es. C’est pour y parer que la tribune « Face à la violence d’État, défendons nos droits partout » (Libération, 19/01/23) a été publiée et appelait à l’organisation des Assises.
Cette journée a pour la première fois réuni des mobilisations très diverses : des syndicats à la zad de bure, du collectif Justice pour les quatre étudiantes nantaises violentées par la police aux organisations des quartiers populaires, des gilets jaunes au Syndicat de la magistrature.
Il s’agissait de faire se rencontrer les résistances pour construire un contre-pouvoir démocratique efficace qui aurait une place de poids dans la bataille culturelle. Cette journée a été l’occasion de dresser un état des lieux de l’aggravation des violences d’État, de réfléchir à des propositions pour la défense des droits et la sauvegarde des libertés, et d’imaginer la suite et la forme que pourrait prendre cette alliance.
Aujourd’hui un processus de construction - auquel Attac participe activement - d’un cadre pérenne et de référence, pour peser dans le débat public et se défendre collectivement est en cours. Le projet fera l’objet d’une publication prochainement.
Youlie Yamamoto, pour le comité d’organisation des Assises populaires pour nos libertés.