Notre-Dame-des-Landes : de César aux bassines… la transmission de l’espoir !

mardi 3 janvier 2023, par Geneviève Coiffard-Grosdoy

La fête des 10 ans de la résistance à l’opération César, les 19-20 novembre à Notre-Dame-des-Landes, a confirmé la formidable énergie collective qui demeure sur la zone à défendre (ZAD).

Ce texte est tiré du dernier numéro de notre trimestriel, Lignes d’Attac, disponible en adhérant ou en s’abonnant.

Il y a 10 ans, un préfet outrecuidant a dénommé César (au pays d’Astérix !) une opération d’écrasement d’une lutte de 40 ans à Notre-Dame-des-Landes. Cette opération a tourné au fiasco. Car ce mépris, et l’extrême violence des gendarmes ont fait se lever en masse les habitant·es de la zad, des paysan·nes, citoyen·nes et militant·es de partout.

Avec des barricades, des solidarités concrètes (vêtements, nourriture, matériaux), dans un océan de boue, de nuits blanches et de fraternité…

Quatre semaines après l’attaque, ce sont près de 40000 personnes qui avaient participé à la manifestation de réoccupation, avec un mot d’ordre : « s’ils expulsent, on revient ! ». Portés de bras en bras par de longues chaînes, planches et autres matériaux avaient permis le montage de cabanes amenées en kit par 200 comités locaux.

La lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été un laboratoire pour la répression, mais aussi un laboratoire d’organisation sociale et de démocratie. Parmi ses enseignements, citons la nécessité du maintien – difficile – de l’union des différentes « composantes », de l’imbrication assumée des différentes formes de lutte et de stratégies.

Si nous avons encore dans les oreilles et dans les tripes le bruit des arbres broyés, celui des maisons éventrées, le fracas des grenades... nous y avons appris que l’espoir est toujours justifié, même dans les situations les plus improbables. Et que la lutte commune et diversifiée dans ses formes et méthodes peut être gagnante. Elle l’a été :

- grâce à la vigueur des campagnes de sensibilisation et d’informations. La grève de la faim de 28 jours en plein cœur de Nantes au printemps 2012, a fait chavirer le cœur de nombreu·ses nantais·es). Les moyens de communication créés par le mouvement (réunions d’info, radio-klaxon, zad.nadir, lettres diverses…) ont joué à plein leur rôle.

- grâce à la construction d’une véritable expertise citoyenne qui a permis la déconstruction des mensonges d’État et des porteurs de projet,

- grâce à des recours juridiques longs et coûteux (tribunal administratif, cour d’appel administrative, Cour de cassation, Conseil d’État),

- grâce à la lutte politique (par exemple contre le pseudo référendum organisé en 2016 sous l’impulsion de Jean-Marc Ayrault),

- grâce au tissage de liens avec d’autres luttes (françaises et internationales) contre les GPII (grands projets inutiles et imposés),

- et sans doute principalement grâce à l’imbrication assumée des différents formes de lutte, avec rejet d’une différentiation entre les bons (qui seraient non-violents) et les méchants (qui seraient violents). Il a fallu déjouer cet outil de division si cher aux « médias mainstream », où la violence n’est jamais définie, mais simplement brandie comme un chiffon rouge.

L’abandon de l’aéroport a été acté six ans après César, en janvier 2018. Ce qui a permis entre autres de sauver le bocage menacé, mais aussi le « château d’eau » que constitue la zone, qui alimente deux bassins versants. L’urbanisation en continu de Nantes à Notre-Dame-des-Landes a été d’enrayée au moins provisoirement.

Pour de nombreus.es militant·es, les acquis personnels ont été essentiels, par exemple sur la différence à faire systématiquement entre le légal et le légitime ; sur ce qu’est la « violence » du capitalisme et de l’État à sa botte, et celle qu’on peut lui opposer dans la construction d’un rapport de force efficace ; sur l’importance de la mobilisation paysanne : l’image des tracteurs enchaînés autour de la Chat-teigne demeure inoubliable.

La fête des 10 ans de la résistance à l’opération César, les 19-20 novembre à Notre-Dame-des-Landes, a confirmé la formidable énergie collective qui demeure sur la zone à défendre (ZAD). Avec son rituel autour de l’eau, et l’incroyable banquet du samedi soir, son « cabaret » croisant des récits variés, sa salade César (au poulet évidemment), son fabuleux gâteau, ses concerts...

Si la fin du « monde de l’aéroport » est toujours loin, l’espoir soulevé anime encore et toujours d’autres luttes. La création des « Soulèvements de la Terre » vise à créer un cadre national commun pour fédérer, agglutiner des combats locaux. « Agir ensemble au fil des saisons. Jeter toutes nos forces dans la bataille. Remuer ciel et terre [1]. »

Et le week-end de lutte à Sainte Soline contre le début des travaux d’une nouvelle bassine (29 et 30 octobre) a été un superbe pré-anniversaire, où nous avons vu fonctionner quelques-unes des leçons de Notre-Dame-des-Landes. Vu aussi Gérald Darmanin transpirant d’angoisse à l’idée de la création de ZAD par « des écoterroristes » partout en France. Il n’a pas tort de trembler...

Geneviève Coiffard-Grosdoy

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