Le Pacte Vert européen menacé

mercredi 29 mai 2024, par Plihon Dominique

Attac et la Fondation Copernic ont publié début mai Leur Europe et la nôtre, un livre pour éclairer les enjeux actuels autour de l’Union européenne et les défis majeurs à relever et présenter des propositions pour construire une Europe démocratique, sociale et écologique.

Nous publions ici un extrait de ce livre concernant les enjeux autour du Pacte Vert. Leur Europe et la nôtre est disponible à la commande sur le site d’Attac.

Au lendemain des précédentes élections européennes de 2019, l’Union européenne avait affiché de grandes ambitions écologiques et comptait devenir « le tout premier continent à présenter une architecture verte complète », selon la présidente de la Commission européenne. Présenté dès 2019, le Pacte Vert européen devait permettre à l’Union européenne d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Un projet présentant plusiuers limites, et qui est désormais menacé.

La démarche du Pacte Vert est d’aligner progressivement l’ensemble des politiques européennes sur les objectifs de l’Accord de Paris de 2015. La mise en application du Pacte Vert a donné lieu à un paquet de directives Fit for 55 qui prévoient une diminution de 55% des émissions de CO2 à l’horizon 2030, et couvrent des domaines très divers (transports, logement, commerce international, …).

Parmi les principales mesures prévues figurent l’interdiction des moteurs thermiques (essence, diesel) en 2035, la réforme du marché du carbone (suppression des quotas gratuits) et l’instauration progressive d’un mécanisme de taxes carbone aux frontières à partir de 2025.

Pas moins de 1000 milliards d’euros ont été prévus par la Commission pour la période 2021-2030 pour les investissements verts, notamment pour développer les énergies propres et soutenir la recherche et l’innovation dans les technologies à faible intensité carbone. Sauf que la provenance des ressources et les critères d’attribution de celles-ci n’étaient pas précisés … À terme, l’objectif est qu’au moins 25 % du budget de l’Union soit consacré à la transition écologique.

En 2021, la loi européenne sur le climat a été validée par le Conseil et votée par le Parlement européen. L’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 est désormais inscrit dans la législation, comme la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030.

Les critiques adressées au Pacte Vert

En première analyse, le Pacte Vert peut être considéré comme une avancée importante dans la lutte contre la crise climatique et la préservation de la biodiversité. Mais dans la réalité, le Pacte Vert comporte d’importantes limites dénoncées par les eurodéputés et les ONG écologistes.

La dimension sociale est quasiment absente du Pacte Vert, alors que l’articulation des objectifs écologiques et sociaux est une nécessité absolue. Cette préoccupation a été exprimée par les députés de la gauche unitaire européenne (GUE/NGL), qui ont proposé un contre-projet de pacte « vert et social », qui n’a pas été adopté, comportant des objectifs sociaux plus ambitieux, destinés à réduire les inégalités des territoires et des populations face aux conséquences de la crise écologique.

Par ailleurs, le volet financier du Pacte Vert a été jugé insuffisant et inadapté. Ainsi, la Fondation pour la Nature et l’Homme, de même que la plupart des autres ONG, ont montré que l’effort financier proposé est « bien loin du compte ». D’après les estimations de la FNH, « le plan à 100 milliards annuels ne couvre qu’un tiers des besoins de financement ». D’autant plus que la confiance de la Commission dans les marchés pour contribuer au financement du Pacte Vert est totalement irréaliste.

Au-delà de ses insuffisances, le Pacte Vert recèle des incohérences qui limitent sa portée. En premier lieu, il n’y a aucune remise en cause du système économique productiviste et extractiviste qui est à l’origine de la crise écologique et sociale. De même, aucune réflexion n’a été engagée pour remettre en cause les accords de libre-échange conclus par l’UE avec d’autres continents, dont les impacts sociaux et environnementaux négatifs sont pourtant reconnus.

Le poids dominant des lobbys

Le cas de l’agriculture productiviste, un des principaux secteurs responsables de la crise écologique, illustre parfaitement les contradictions de la politique « verte » européenne. La Commission a proposé de réformer la politique agricole commune (PAC), un des piliers historiques de la construction européenne, pour articuler celle-ci avec le Pacte Vert. C’est la stratégie « de la ferme à la table » présentée dès 2019, destinée à doter l’UE d’une « approche systémique pour l’agriculture, l’alimentation, le bien-être animal, l’environnement et le climat ». Cette réforme de la PAC n’a pu aboutir sous la pression des lobbys, tels que la FNSEA en France, opposés au verdissement de l’agriculture.

Mais les lobbys sont loin d’être les seuls à dévoyer les règles du Pacte Vert. La contestation des responsables politiques a gagné du terrain ces derniers mois. Emmanuel Macron a lancé les hostilités en appelant à une « pause réglementaire » au printemps 2023. Au total, cette fin de mandature est marquée par une marche arrière des responsables politiques et des élus sur l’environnement : en témoignent le torpillage du projet sur la restauration de la nature ainsi que le rejet du règlement européen sur les pesticides par un Parlement européen dominé par les droites, deux textes clé du Pacte Vert.

Dominique Plihon

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