La crise des valeurs et repères scolaires et républicains
Les débats sur l’École sont révélateurs des difficultés à tracer une voie d’envergure et pérenne. [1] Si la gestion technocratique envahit trop souvent la sphère universitaire et scolaire, si, dans l’espace de la cité, un populisme réactionnaire et xénophobe accroît régulièrement ses parts de marché, c’est parce que le « logiciel » qui régit la communauté nationale est partiellement périmé. Symptomatique de cette fin de cycle, la perte d’intégrité morale et intellectuelle que subissent de nombreux professeur-e-s, pris-e-s dans les nasses de l’autoritarisme administratif et d’une violence juvénile, réactionnelle à l’égard des régressions et discriminations sur les terrains socio-économique et professionnel [2]. En témoigne la campagne « Pas de vague », le « me too des enseignant-e-s » sur les réseaux sociaux, qui a fait suite au braquage d’une professeure dans un établissement de Créteil, en octobre 2018 [3].
Dans cette période confuse, marquée en arrière-plan par la vague d’attentats en 2015 à Paris, la consigne sécuritaire est de mise tant à l’École que dans les ministères régaliens. Le dispositif d’éducation à la citoyenneté [4] mis en place sous le ministère de Najat Vallaud-Belkacem a promu la lutte contre la radicalisation et en faveur d‘une laïcité défensive, dans les faits conservatrice de l‘ordre socio-culturel existant. Suite à l‘incident précité et aux réactions médiatiques qu’il entraîna, les ministres de la Justice, de l’Éducation nationale et de l’Intérieur, ont annoncé une série de mesures (le 26 octobre 2018). En lieu et place de réponses en matière d’augmentation de postes, de dotations en personnel médico-social, d’aides aux associations de quartier…, c’est la « solution sécuritaire », dans les faits répressive, qui l’emporte : ouverture de centres éducatifs fermés, de « centres d’accueil de jour » potentiellement encadrés par des militaires ou des policiers, renforcement des équipes mobiles de sécurité (EMS)… Autant de mesures souvent inefficaces, voire contre-performantes pour la construction d‘un climat serein, propice à l’émancipation individuelle et collective des élèves.
Un système scolaire de plus en plus inégalitaire
Il y a urgence à promouvoir une politique éducative plus inclusive, de nombreux signaux d’alarme étant au rouge, tels les rapports de l’OCDE sur la situation des publics scolaires issus de l’immigration. Ils développent une problématique récurrente depuis les émeutes juvéniles de 2005 :
« Le système éducatif français est l’un des plus inégalitaires des pays de l’OCDE. En effet, il ne parvient pas, en dépit des multiples réformes entreprises depuis des décennies, à instaurer l’égalité des chances pour tous les élèves, en particulier pour les enfants immigrés ou issus de l’immigration. (...)
Malgré une progression du niveau d’éducation de la population française sur le long terme, d’après le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), la proportion de bons élèves en mathématiques (niveaux 5 et 6 dans l’enquête PISA 2012) ne progresse plus en France depuis 9 ans alors que la part des élèves peu performants (sous le niveau 2 dans l’enquête PISA 2012) est en augmentation de 6 points de pourcentage par rapport à 2003. Les résultats montrent également des écarts très importants entre la réussite scolaire des enfants les plus favorisés et les plus défavorisés.
En France, près de 28 % des jeunes adultes (âgés de 15 à 34 ans) y sont soit nés à l’étranger, soit issus d’au moins un parent immigré, ce qui est proche de la moyenne des pays de l’OCDE (27 %) et peu éloigné de la moyenne de l’Union européenne (24 %).
La difficulté à intégrer les enfants issus de milieux défavorisés y est plus nette que dans la plupart des pays de l’OCDE et se traduit par de piètres résultats chez les enfants immigrés et issus de l’immigration qui sont surreprésentés dans ce groupe :
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- 41 % des élèves immigrés éprouvent des difficultés de compréhension de l’écrit contre seulement 26 % en moyenne dans les pays de l’OCDE.
- Les enfants nés à l’étranger mais qui ont pu intégrer la maternelle en France ont à l’âge de 15 ans un avantage équivalent à plus de 3 années de scolarité comparé aux enfants entrés au même âge mais qui n’ont pas suivi cet enseignement.
- Un quart des jeunes de 15-24 ans sortis du système scolaire sans diplôme sont des enfants d’immigrés nés en France (y compris les jeunes issus de couples mixtes), alors qu’ils représentent une personne sur cinq dans cette classe d’âge.
Ces désavantages se traduisent plus tard par une plus grande difficulté pour les enfants d’immigrés à s’insérer sur le marché du travail et à s’intégrer socialement : - Moins de deux enfants d’immigrés sur trois (15-34 ans) sont en emploi contre près de 80 % pour les enfants de parents nés en France.
- Près d’un million de jeunes âgés de 15 à 34 ans nés à l’étranger ou dont au moins un des deux parents est immigré ne sont ni employés, ni scolarisés, ni en formation.
- 30 % des ménages immigrés qui vivent en France se trouvent en situation de pauvreté relative, contre 13 % pour les autres ménages. » [5]
Le Panorama des inégalités scolaires d’origine territoriale en France publié par le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) en octobre 2018 [6] confirme cette analyse, pour l’Île-de-France notamment :
« Les inégalités scolaires d’origine territoriale sont peu explorées et demeurent taboues dans une République une et indivisible. Aussi, le Cnesco a conduit une évaluation très fine des disparités scolaires d’origine territoriale en Île-de-France en se fondant sur la plus petite unité géographie établie par l’Insee, appelée IRIS ou plus communément, quartier. Ce découpage permet de révéler des inégalités invisibles à des niveaux d’études territorialement plus agrégés (par exemple au niveau communal). Cette évaluation s’est appuyée sur un éclairage national des inégalités socio-spatiales à l’École. Elle révèle que dans des contextes socio-spatiaux et démographiques inégaux, l’Éducation nationale et les collectivités territoriales déploient des ressources (humaines, budgétaires, offre de formation…) qui s’avèrent très variables selon les territoires. Ces fortes inégalités de ressources éducatives se développent aux côtés de disparités importantes dans l’orientation et la réussite scolaire. »
Chiffres-clés
-En Île-de-France, la part des enseignants de moins de 30 ans et la part des enseignants non titulaires varie du simple au triple entre les territoires parisiens et de banlieue favorisés et les territoires cumulant le plus de difficultés socio-économiques (Cnesco, 2018).
En Île-de-France, les collèges situés sur les territoires les plus défavorisés ont en moyenne un taux de stabilité des enseignants dans l’établissement presque deux fois plus faible que les établissements localisés sur des zones plus favorisées (Cnesco, 2018). Au niveau national, la Seine-Saint-Denis se démarque largement des autres départements métropolitains en cumulant à la fois le plus fort taux d’enseignants de moins de 35 ans (53,4 %, contre 23,5 % en moyenne) et la part la plus faible d’enseignants présents dans l’établissement depuis plus de 5 ans (30,8 %, contre 50,9 % en moyenne) (Cnesco, 2018). Lorsque l’on considère uniquement les épreuves écrites 2017 du diplôme national du brevet (DNB), on constate que les taux de réussite dans les collèges publics varient, en Île-de-France, du simple au double selon le type de territoires (Cnesco, 2018) |
À ce sombre panorama, s’ajoute le dispositif mis en place en 2018 pour l’orientation des bacheliers, Parcoursup, censé remplacer le dispositif APB, tirage au sort jugé inéquitable. Celui-ci, comme la loi ORE/ « Orientation et réussite des étudiants », dont l’objectif déclaré est de réduire le taux d’échecs en première année, a fait l’objet d’un grand nombre de protestations d’étudiant-e-s, de lycéen-ne-s et d’enseignant-e-s, au nom du principe d’égalité face aux études [7].
Dans l’attribution désormais sélective des places à l‘Université, y a-t-il des discriminations spécifiques des lycéens issus des quartiers populaires, en fonction du critère territorial ? Le Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis (93) a lancé un appel à témoignages auprès des jeunes s’estimant lésés par cette plate-forme, dont les modes de fonctionnement sont opaques. Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a saisi la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal.
Les médias, miroir des expériences interculturelles et de laïcité ouverte (cas des docu-fictions)
Dans la perspective d’une éducation inclusive, l’émergence des médias et du numérique constitue un paramètre socio-éducatif non négligeable ; les publics scolaires, immergés dans une société multiculturelle, utilisent des modes d’expression largement médiatisés : musiques du monde, poésie chantée… Le « cinéma de la diversité » n’est pas en reste, favorisé par l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé) créée suite aux émeutes précitées des banlieues de 2005.
Dans la dernière décennie, des films, souvent plébiscités par le public et primés ont mis en scène la vie d’une classe, singulièrement des quartiers populaires : L’Esquive, Entre les murs, La Journée de la jupe, Les Héritiers.
-L’Esquive, film d’Abdellatif Kechiche (2004). Plusieurs Césars lui sont décernés en 2005, dont ceux des meilleurs jeunes espoirs masculin et féminin, à des acteurs de la diversité, Osman Elkharraz et Sabrina Ouazani.
Entre les murs, film de Laurent Cantet (2008), soutenu par l’Acsé, palme d’or au festival de Cannes en 2008 ; adapté du roman éponyme de François Bégaudeau, professeur de Lettres (2006). Produit d’une collaboration entre France télévision et l’ACSE. La Journée de la jupe, film de Jean-Paul Lilienfeld (2008), soutenu par l’Acsé, prix d’interprétation féminine décerné en 2010 (aux César) à Isabelle Adjani. Les Héritiers, film de Marie-Castille Mention-Schaar (2014), adapté de l’essai du lycéen Ahmed Dramé, Nous sommes tous des exceptions (Éd. Fayard, 2014). |
La reconnaissance du public et les prix décernés s’avèrent des signes tangibles de l’aspiration majoritaire à trouver sur les écrans un reflet plus juste et fidèle de la société française, plus proche de sa complexité. Des questions pertinentes y sont posées, concernant les différences et les relations à cultiver entre individualité (à l’occidentale) et collectivité (propre aux cultures du Sud), entre laïcité à la française et patrimoines religieux, en particulier musulman, entre parité homme-femme et sexo-séparatisme, entre moi et altérité, entre hétérosexualité et homosexualité…
Pour endiguer les décalages culturels et motiver leurs élèves issus de la diversité, les professeurs sont souvent amenés à jouer les équilibristes. Ces films et docu-fictions posent la question de la mixité socio-culturelle dans l’enseignement public : comment assumer la fonction de creuset républicain dans les collèges et lycées ? Ils témoignent de l’urgence d’une adaptation au nouveau contexte multiculturel et d’une laïcité ouverte, sachant que si la sinistrose scolaire est plus marquée dans les quartiers sensibles, la question de la transmission intergénérationnelle se pose de manière générale. Ils témoignent aussi de la créativité propre des quartiers populaires, fondée sur l’intelligence collective et le partage des meilleures expériences et valeurs communautaires. Ainsi, le dernier en date, Les Héritiers porte sur la participation d’une classe de seconde (au lycée Léon Blum de Créteil) à un concours national d’Histoire, sur la Résistance et la déportation des Juifs. À ces titres, ce sont des outils précieux pour la formation initiale et continue des enseignants.
Les déficits programmatiques (Education nationale)
Parmi les passifs de la dernière période, l’on peut noter :
En Histoire : l’abandon en classe de 5e de l’histoire des empires de l’Afrique pré-coloniale (réforme des collèges, 2015). L’histoire des migrations est remise en cause en 2018 (projet de réforme). En Lettres modernes-Français : l’annulation de la programmation d’auteurs francophones en terminale littéraire il y a deux décennies. Enseignement de la littérature francophone non concrétisé (réforme de 2001 des lycées). En arabe : recrutement au Capes réduit à zéro en 2014, et d’une manière générale à la portion congrue, ce qui réduit drastiquement les possibilités d’enseignement de cette discipline. |
Un cas de progression stoppée dans l’indifférence, la programmation d’auteurs francophones en terminale littéraire : les derniers à être enseignés sont des auteurs de la Négritude, Aimé Césaire en 1994 (Cahier d’ un retour au pays natal et le Discours sur le colonialisme, ces textes étant déprogrammés au bout d’un an pour non-conformité idéologique), et Léopold Sédar Senghor en 1996 (Éthiopiques). Quant à l’enseignement de l’arabe, déjà notoirement insuffisant au regard du nombre de locuteurs arabophones en France, le recrutement au concours de recrutement (Capes) a été réduit à zéro en 2014 [8]. De même que l’enseignement de l’arabe (en métropole) [9] et du créole (dans les territoires d’Outremer), celui de la littérature francophone, dont le principe a été acté pour les lycées par la réforme de 2001 sans véritable concrétisation, nécessite d’être plus largement promu [10].
L’involution actuelle du CSP/Conseil supérieur des programmes, créé par le ministre Vincent Peillon, témoigne de l’importance idéologique de ce paramètre, des contenus d’enseignement spécialement dans les matières linguistiques et littéraires, et dans celles qui relèvent des sciences sociales. La démission des présidents Michel Lusson et Sylvie Plane vise à protester contre le risque d’en faire une chambre d’enregistrement sous le ministère Blanquer, pendant que le Conseil scientifique, récemment créé et régi par le champ des neurosciences, tend à devenir dominant.
L’École, laboratoire d’une citoyenneté altéritaire
La loi sur la Refondation a mis en œuvre un enseignement moral et civique (EMC) dont les premiers degrés ont été rendus publics en juin 2015 [11]. Le Conseil supérieur des programmes (CSP) a intégré certaines problématiques émergentes, comme le montre ce panorama pour le cycle 4 (qui correspond à la fin d’études au collège).
Médiation scolaire à partir d’une situation de tension dans une classe.
Réflexions sur les différentes formes de racismes et de discriminations.
Comprendre la diversité des sentiments d’appartenance civiques, sociaux, culturels, religieux.
La francophonie.
Connaître les principes, valeurs et symboles de la citoyenneté française et de la citoyenneté européenne…
S’ils sont effectivement mis en application, il y a là des éléments d’une évolution possible, d’un mode de citoyenneté principalement individuel à une conscience collective renforcée, dans une École plus délibérément fédératrice. Des expériences novatrices existent dans ce sens, il reste à les médiatiser davantage. Un objectif souhaitable étant, en ces temps de crise systémique, d’articuler davantage les paramètres géopolitiques, socio-anthropologiques et des sciences de l’éducation, de manière à renouveler le ’logiciel’ éducationnel et citoyen. Abdennour Bidar, chargé de mission pour ce nouvel enseignement, préconise de « centrer la morale à l’École sur la culture de la fraternité et (…) (d’) apprendre aux élèves à débattre sur les valeurs » [12]
Cette démarche contribuerait à desserrer, au titre de troisième voie, le dialogue de sourds prévalant actuellement entre le champ pédagogique et celui des neurosciences. Un exemple réussi est celui du programme d’histoire qui, depuis le vote de la loi Taubira en 2001, intègre des cours sur la traite négrière et l’esclavage ; la recherche en histoire et sciences humaines est sollicitée également. Les humanités doivent se projeter aussi dans leur avenir, comme le montrent la création d’une option FLE-FLS au Capes de Lettres modernes [13], les rencontres du Réseau international Éducation et diversité (RIED), le colloque « Anthropologie pour tous » organisé par le lycée Le Corbusier d’Aubervilliers (2015), au contact des mythologies et des langues-cultures du monde, transmises dans les quartiers populaires et multi-ethniques [14].
Est à ce prix notamment le désamorçage des poussées nationalistes et djihadistes/radicales qui alimentent leur détestation mutuelle par médias interposés. Ce panorama interculturel a de quoi redonner des couleurs aux principes républicains, souvent condamnés jusque-là à un logiciel universaliste abstrait. C’était l’un des objectifs des rapports sur « la refondation de la politique d’intégration » rendus au premier Ministre Jean-Marc Ayrault en 2013 et malheureusement mis au placard : mettre à l’ordre du jour la déconstruction des processus de racialisation et de discrimination qui minent la société française, en sortant d’une approche « par le haut », centralisée, voire ethno-nationale de l’action publique, qui s’est révélée à la fois peu démocratique et inefficace [15]. Cela implique que l‘École prenne en charge les cultures (historiques et de l’immigration) et permette le développement du plurilinguisme propre aux familles, pour qu’elles puissent vivre non plus une assimilation forcée et condescendante, qui peut être source de communautarismes réactionnels, mais une intégration différenciée.
Cette question a été également sous-estimée dans le débat sur la réforme des collèges en 2015, qui a pourtant mis l’accent sur l’importance des matières linguistiques (langues anciennes, régionales, allemand…) dans un contexte de mondialisation et de médiatisation accrues.
Une telle perspective oxygénerait les relations Nord-Sud dans la sphère francophone : un programme de recherche et d’enseignement dans le champ des sciences humaines et sociales – littérature comparée, anthropologie culturelle et de genre, sémiologie, ethno-linguistique, ethno-sociologie, histoire des idées et des cultures, géo-politique, macro-économie, droit international… – permettrait de théoriser les évolutions à l’échelle du monde et dans l’Hexagone, et d’adapter, ce faisant, les projets tant géopolitiques que d’aide au co-développement [16]. Face au danger que représente l’essor d’une « économie de la connaissance » d’inspiration atlantiste et européiste et à base techno-scientiste, il serait bienvenu que l’espace français et, au-delà, francophone, s’engage sur la voie de cette démocratisation cognitive et culturelle.
L’ anthropologie culturelle élément d’une éducation populaire actualisée
Un exemple de réussite dans cet ordre d’idées, les Cultural studies et les Post colonial studies au Royaume-Uni et aux États-Unis, à partir de cet autre standard qu’est le multiculturalisme anglo-saxon. Ce dont témoigne par exemple le Camerounais Achille Mbembe [17] qui parle, par comparaison, de risque de « provincialisation » de la pensée française, ou le sociologue Armand Mattelart. [18]
Au-delà des problématiques de diversité ethno-culturelle et d’inclusion des minorités visibles [19], divers objectifs peuvent être ceux d’une anthropologie élargie à la cité et au monde associatif : mieux comprendre, à l’aide d’une méthodologie comparatiste et contrastive, les différentes appartenances catégorielles, idéologiques, culturelles, spirituelles, comme autant de composantes de l’échiquier national et du monde à envisager dans leur complémentarité systémique ; mieux appréhender les limites de ses choix personnels et ceux d’autres, leurs effets pervers en cas d’adoption d’une optique exclusive ou unilatérale ; favoriser les médiations et reliances à même de désamorcer les conflits inhérents à la vie sociale et de reconstruire une pensée unifiante, du peuple et pour le peuple (« l’unité dans la diversité » via l‘intersectionnalité). Sur ces bases réhabilitées à la base, les pouvoirs publics pourront davantage et mieux opérer les arbitrages, voire les rééquilibrages qui s’imposent sur les terrains éducatif et sociétal.
En amont, cet enseignement nécessite une formation en bonne et due forme dans les Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), de même que la constitution d’un réseau d’intervenants de ces différents domaines. Ainsi, la construction d’une culture socio-professionnelle commune passe par « la refondation de l’enseignement des humanités » [20].
Pour conclure, face à la technocratie à dominante économiste et à son « économie néolibérale de la connaissance », face également aux réactions identitaires de type nationaliste ou communautariste, il s’agit de redonner leurs titres de noblesse aux langues-cultures des peuples et communautés, dont celles des Suds. Celles-ci s’avérant comme des vecteurs d’un développement diversifié et à visage humain.