Le genre des choses et les choses de genre

mercredi 4 avril 2018, par Jean-Marie Harribey *

L’éclatement de l’affaire Weinstein aux États-Unis a provoqué une déflagration dans le monde entier : la parole des femmes contre les violences et agressions sexuelles qu’elles subissent s’est libérée et rien ne pourra désormais l’arrêter. Dans le même temps, en France, s’est ravivée la pression pour mettre en pratique une « écriture inclusive », destinée à mettre la lutte contre les inégalités entre femmes et hommes au cœur de la langue française, de sa grammaire et de sa calligraphie, et donc de la symbolique exprimant les représentations collectives et les valeurs. Plus généralement, il s’agit de remettre à plat la domination et l’exploitation subies par les femmes en les conceptualisant de manière nouvelle, afin de mieux aider à transformer la réalité.

Pour autant, partager totalement la cause féministe empêche-t-il de porter un regard distancié, sinon critique, vis-à-vis des théorisations proposées ? S’engager dans une voie critique est un pari risqué, mais c’est peut-être le moyen de tirer le meilleur parti de la notion de genre(s). Sans prétendre épuiser, loin de là, cette notion, voyons ici les choses sous l’angle méthodologique en prenant les cas de l’exploitation des femmes et de l’écriture inclusive.

1. L’exploitation des femmes comme rapport social

Le concept d’exploitation est directement issu de Marx : la force de travail prolétaire s’échange contre un salaire, qui couvre les besoins dits nécessaires ou déterminés comme tels par les rapports de force, mais qui est inférieur à la valeur qu’elle ajoute ; le capitaliste prélève donc sur le travailleur une plus-value qui vient grossir son capital. Ainsi se met en branle l’accumulation. Pendant longtemps, la tradition marxiste a considéré que le travail domestique effectué gratuitement, presque toujours par les femmes, était une façon pour le capitalisme d’économiser du capital. En participant à la reconstitution de la force de travail sans frais, le travail des femmes, bien que non productif de valeur et de plus-value, favorisait cette production. L’exploitation des femmes n’était alors qu’un sous-produit de l’exploitation des travailleurs. Ainsi, pour conceptualiser le travail accompli par les femmes dans la sphère domestique, on ne dispose pas d’un concept équivalent à la plus-value de Marx. Et ce concept n’est pas applicable au travail domestique. Sauf au second degré : le travail domestique ne produit pas de valeur marchande susceptible de valoriser le capital, mais le capitalisme bénéficie indirectement du fait que le travail domestique soit effectué gratuitement. Il participe ainsi à la reconstitution de la force de travail salariée. C’est en gros ce que disait l’analyse marxiste traditionnelle. Par exemple, on pouvait trouver la théorisation suivante :

« Il s’agit là de rapports capitalistes de reproduction et non de rapports interpersonnels ; ces rapports entre les hommes et les femmes passent par le filtre de leurs rapports aux conditions de production et de reproduction. Tout comme les rapports entre les classes sociales passent par le filtre de leurs rapports aux moyens de production (qui constituent la base matérielle du pouvoir qu’exercent sur les travailleurs les détenteurs des moyens de production), les rapports entre les hommes et les femmes dans une société capitaliste passent par le filtre de leur accès inégal aux conditions nécessaires à leur reproduction physique et sociale, de jour en jour et de génération en génération. […]

Affirmer que le système capitaliste implique le primat du mode de production sur le mode reproduction et, par voie de conséquence, sur l’inégalité dans les rapports hommes/femmes n’est pas faire preuve d’’économisme’ ou de ’réductionnisme de classe’, c’est au contraire reconnaître les effets structuraux sur les relations entre les hommes et les femmes d’un mode de production qui accumule le capital au lieu de satisfaire les besoins des gens. Ceux qui préfèrent postuler une ’inter-action mutuelle’ entre la production et la reproduction ou faire de cette dernière une cause première sous-estiment l’importance théorique des innombrables preuves de la subordination de la reproduction par rapport à la production capitaliste » [1]

Dans la seconde moitié du XXe siècle, au moment où justement l’entrée des femmes dans le salariat fut massive, cette vision traditionnelle fut largement contestée et remise en cause parce qu’elle ne rendait pas compte de la domination masculine, dont la marque la plus commentée est l’absence durable de partage des tâches domestiques : en France, en moyenne, 4h01 par jour pour les femmes contre 2h13 pour les hommes, même si l’écart se réduit depuis 25 ans [2]. Mais ce dernier constat est loin de recouvrir toute l’étendue de cette domination, notamment symbolique [3].

Un large courant d’écrivaines féministes a entrepris une démarche de déconstruction de la vision traditionnelle. Comme l’expliquent Elsa Galerand et Danièle Kergoat [4], une sociologie féministe matérialiste s’est constituée en entreprenant la critique du travail et en analysant « les rapports sociaux de sexe en tant que rapports de production ou d’exploitation irréductibles au capitalisme ». Pourquoi cette sociologie est-elle matérialiste avec une nette filiation marxienne ? Parce que ce que sont, font et pensent les humains correspond avec ce qu’ils produisent, comment ils produisent et quels rapports ils nouent entre eux pour ce faire. Autrement dit, ces rapports sont toujours historiquement situés.

Au sein de ce renouveau, la sociologue Christine Delphy occupe une place particulière car elle a proposé dans la décennie 1970 une conceptualisation qu’elle a voulu alternative à (ou plus globale que) la théorie marxiste de l’exploitation. Plus précisément, elle s’est efforcée de construire une « théorie générale de l’exploitation » pour analyser les « différentes formes d’extorsion de travail aujourd’hui » qui ne se résument pas à l’exploitation capitaliste. [5] La problématique qu’elle pose est celle-ci :

« Le travail ménager ne bénéficie pas au capitalisme mais aux hommes. À la théorie du ’profit pour le capitalisme’, j’oppose depuis longtemps celle du ’profit pour la classe des hommes’. Ou en d’autres termes, le travail ménager n’est pas une somme disparate de relations individuelles, mais l’effet d’un mode de production, le mode de production patriarcal ou domestique. Qu’est-ce que le mode de production patriarcal ? C’est justement l’extorsion, par le chef de famille, du travail gratuit des membres de sa famille. C’est ce travail gratuit réalisé dans un cadre social – et non géographique – de la maison que j’appelle le travail domestique. » [6]

Il faut préciser que, plus loin, Christine Delphy ne considère pas tout le travail ménager comme domestique. Selon sa définition, seul le travail gratuit effectué pour un autre est domestique. Le travail pour soi n’est donc pas dit domestique par elle.

Ce mode de production domestique est caractérisé par deux classes aux intérêts contraires : la classe des hommes, dominatrice, et la classe des femmes, dominée. On pourrait croire que cette analyse vient conforter, en la complétant, celle de l’exploitation capitaliste. Non, pour Christine Delphy,

« l’explication par la plus-value est insuffisante pour l’exploitation capitaliste elle-même, qu’elle la rend mystérieuse au point de la rendre difficile à dénoncer. […] Elle est un obstacle à l’articulation entre les différents modes d’exploitation. Elle est inutile à la théorie du capitalisme. […] En particularisant trop le capitalisme autant qu’en le privilégiant, elle est dommageable à la perception des autres modes d’exploitation et, finalement, à la compréhension de l’exploitation en général et de chacune en particulier. » [7]

La sociologue avance deux arguments essentiels. Le premier est qu’une situation d’exploitation doit être évaluée selon des normes morales et politiques et non comme une réalité économique objective. Or, Christine Delphy fait des femmes une classe sociale parce qu’elle enracine l’exploitation domestique dans un « mode de production patriarcal » par le biais du rapport social fondé sur la gratuité dont bénéficient les hommes, tout en rejetant une objectivation de type économique. Ne s’agit-il pas d’un balancement entre deux idées contraires ?

De plus, il ne suffit pas d’expliquer, dit-elle, que les prolétaires travaillent plus longtemps que le temps nécessaire à produire l’équivalent de leur salaire. Il faut se demander : pourquoi le font-ils ? Parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement : la longueur de la journée de travail est fixée par l’employeur, au mieux, de nos jours, encadrée par la loi, pourrions-nous ajouter. Mais où est la nouveauté de cet argument qui redit ce qu’avait toujours dit Marx : la longueur de la journée de travail n’est pas naturelle, elle est le résultat d’un rapport de force ? Christine Delphy pense que « cette injustice, ce vol, sont masqués par la distinction entre ’ force de travail’ et ’travail’ et donc entre ’valeur de la force de travail’ et ’valeur du travail’ ». [8] Risquons-nous à dire qu’il s’agit ici d’un pas en arrière dans l’histoire de l’économie politique. L’un des mérites de Marx est d’avoir précisément inventé le concept de force de travail, parce que celui de « valeur du travail » utilisé par les classiques Adam Smith et David Ricardo avant lui, et qu’il bannit, confondait deux choses : la valeur du produit du travail et la valeur reçue par le travailleur. Le plus explicitement du monde, Marx entendait sortir de « leurs cadres théoriques » et non pas y rester enfermé [9]. Faire comme Christine Delphy de la théorie de la plus-value (égale à la différence entre la valeur que produit le travailleur et celle qu’il reçoit en salaire) un « oxymore : une exploitation sans vol […] une création aussi paradoxale que la génération spontanée ou l’Immaculée conception » n’est-il pas un contresens ? Christine Delphy écrit : « la différence entre le travail et la force de travail, c’est que la seconde a une valeur moindre que le travail » [10]. Donc, pour récuser le concept de plus-value, Christine Delphy réintroduit chez Marx ce que celui-ci avait rejeté car la « valeur du travail » n’a aucun sens. Et l’étonnant est que Christine Delphy propose de « supprimer la distinction mystifiante entre ’valeur de la force de travail’ et ’valeur du travail’ » [11], alors que la suppression qu’elle revendique n’aurait de sens que si la notion de « valeur du travail » en avait un, ce que Marx avait réfuté avec la plus extrême vigueur. Et ce n’est pas le moindre des paradoxes que de lire : « Même si on se débarrasse de la théorie de la plus-value, la plus-value reste, et heureusement, car elle existe. » [12]

Le deuxième argument de Christine Delphy est plus important et nous mène au cœur de sa démonstration, une fois qu’on s’est séparé des contradictions logiques précédentes. L’exploitation étant définie à juste titre comme un « vol » ou une « extorsion de travail gratuit », [13] le travail domestique relève du concept d’exploitation, même s’il ne produit pas de plus-value. Il ne s’agit pas ici pour nous de nier cette exploitation, mais si cette exploitation relève d’un « mode de production » appelé par Christine Delphy « patriarcal » ou « domestique », celui-ci est, par définition, distinct du mode de production capitaliste. Que signifie alors la recherche d’une « théorie générale de l’exploitation » qui pourrait englober simultanément deux modes de production distincts ? Cette recherche est vaine dès lors qu’on suppose comme Christine Delphy l’existence de ces deux modes de production, car un seul concept ne peut pas rendre compte de deux réalités différentes. [14]

Christine Delphy récuse le concept de plus-value qui n’est pas capable de rendre compte en même temps de l’exploitation capitaliste et de l’exploitation subie par les femmes, alors qu’il n’a été forgé explicitement que pour la première, et jamais Marx n’a eu cette idée autant fausse que saugrenue selon laquelle il n’y aurait « exploitation que là où il y aurait plus-value » [15]. Quel concept peut-on utiliser alors pour critiquer la seconde ? C’est Christine Delphy qui donne la réponse : le surtravail [16]. Mais, là encore, c’est Marx qui nous lègue ce concept qui est plus général que celui de plus-value, car la plus-value résulte d’un échange monétaire de marchandises dans un cadre capitaliste, tandis que le surtravail prélevé sur les serfs dans le système féodal ou, dans le cas de notre discussion, le surtravail prélevé sur les femmes ne résultent pas d’un échange marchand. [17] Il serait curieux de soupçonner Marx de réductionnisme de toutes les formes d’exploitation à la seule exploitation capitaliste, alors qu’il prend explicitement la précaution méthodologique de rapporter les concepts qu’il forge au seul mode de production capitaliste. [18] S’agirait-il chez lui d’économisme ? Nous ne le pensons pas davantage car le facteur qui positionne le curseur entre travail nécessaire à la reproduction de la force de travail et surtravail est le résultat de confrontation sociale. On pourrait même retourner l’argument du réductionnisme car le « mode de production domestique » est-il en mesure de rendre compte de toutes les formes de domination exercées sur les femmes ? Par exemple, les violences sexuelles ne relèvent certainement pas de la même analyse que le surtravail effectué à la maison. Cela est si vrai que la définition du surtravail donnée par Christine Delphy est plus d’ordre politique que véritablement économique, dans la mesure où la gratuité est « en raison de la nature du contrat qui lie la travailleuse – l’épouse – au ménage, à son ’chef’ » [19].

Les travaux plus récents de Christine Delphy nuanceront le caractère abrupt de sa première théorisation de son mode de production [20]. D’une part, elle fait remarquer que :

« je n’ai jamais prétendu dans l’article ’L’ennemi principal’ que le MPD [mode de production domestique] était parfaitement superposé à la division sexuée/genrée de l’humanité : comment aurais-je pu le dire puisqu’au moment même où je l’établissais, j’en disais que, fondé sur l’exploitation familiale, ses victimes comprenaient toutes les victimes de cette dernière ? Je disais aussi que cette théorie ne rendait pas compte de toutes les oppressions des femmes. Et je l’ai précisé dans l’avant-propos du livre : non seulement a) le MPD ne rend pas compte de toutes les oppressions des femmes, mais b) il ne rend pas compte de toute leur oppression économique. Sur le premier point, l’avant-propos est clair : cette ’insuffisance’ constitue, à mes yeux, non une faiblesse mais une force. Sur le deuxième aussi : je me méfie de, et ne souhaite pas, trouver un système qui rende compte de la division genrée, toute la division genrée et rien que la division genrée. » [21]

D’autre part, Christine Delphy répond sur le terrain méthodologique et épistémologique où ses critiques l’entraînent :

« l’oppression des femmes est spécifique non pas parce que les femmes seraient spécifiques, mais parce que c’est un type d’oppression unique. Mais est-il unique qu’une oppression soit unique ? Non, c’est banal : toutes les oppressions sont uniques, comme les individus. La singularité est ce qu’il y a de mieux partagé au monde. Ceci ne signifie pas que cette singularité soit obtenue par des mécanismes totalement originaux. Or c’est le sophisme courant : puisqu’elle (cette personne, cette oppression, cette chose) est spécifique, elle ne doit ressembler à aucune autre. Au contraire, je considère l’oppression des femmes comme un cas particulier du phénomène général de la domination – pas plus particulier qu’un autre cependant.

Le but d’une analyse scientifique de l’oppression, comme de tous les phénomènes, ce n’est pas de célébrer – ou de se lamenter sur – la singularité de chaque individu, que cet individu soit fleur, personne, événement historique ou mécanisme social, mais (comme je l’ai écrit dans l’avant-propos) de le découper en morceaux (qu’il s’agisse de feuilles, de jambes, de molécules, d’institutions, de procédures, etc.), comparables aux morceaux d’autres individus (fleurs, animaux, cellules, systèmes sociaux ; toutes ces entités ainsi que les entités qui les composent sont, à un point ou à un autre de l’analyse, des individus). Sinon, chaque phénomène reste enfermé dans sa spécificité phénoménale. Pourquoi pas ? dira-t-on. Cela suffit à beaucoup de démarches, c’est peut-être indispensable à certaines, mais c’est incompatible avec l’idée d’une connaissance scientifique du monde.

À mes yeux, la démarche naturaliste n’est pas seulement fausse parce qu’elle est fausse, mais parce qu’en amont même de sa fausseté substantielle, dès le départ elle respecte la spécificité de la division genrée, qu’elle appelle ’différence des sexes’ ; parce qu’elle explique toute l’oppression par une seule cause, et réciproquement, que cette cause, qui est la ’différence des sexes’ elle-même, n’a rien en commun avec les causes des autres dominations.

Ma propre démarche n’est pas seulement anti-naturaliste : opposée au réductionnisme biologique (la fausseté ’première’ de la démarche naturaliste), pour beaucoup de raisons largement expliquées dans ces deux tomes : elle est résolument anti-’cause unique’ parce qu’elle est résolument contre le respect a priori de la singularité de chaque phénomène, respect qui interdit l’explication de ce phénomène. La singularité ne peut être reconstituée qu’a posteriori, avec les éléments de l’analyse, éléments que l’on ne peut trouver si on se refuse à l’analyse. » [22]

Cependant, cette clarification épistémologique laisse un autre terrain à explorer : quelles sont les limites que l’on dresse pour définir le travail ? Dans la discussion autour de l’œuvre de Christine Delphy, Étienne Balibar lui demande :

« Pour aller vite, disons que ce qui fait question, c’est de savoir sur quels critères on va inclure dans le ’travail’ (même invisible, non payé et non reconnu) certaines activités, certains ’gestes’, et en exclure d’autres. Pourquoi, d’un côté, vouloir considérer comme travail les gestes et activités de représentation d’une bourgeoise qui n’effectue aucune tâche domestique ni même à proprement parler n’élève ses enfants, et d’un autre côté hésiter à nommer travail la façon dont une femme fait l’amour à son homme (à moins que ce ne soit lui qui le lui ’fasse’…) ? Sinon parce qu’il risquerait d’apparaître que, tout en s’étendant à l’ensemble de la société et en déterminant son histoire, la structure domestique ne permet pas de classer la totalité des individu(e)s dans l’une ou l’autre des deux catégories antagonistes, ’sans reste’ ; et que, d’autre part, l’oppression de genre – y compris et surtout dans ses formes extrêmes – a d’autres racines non moins déterminantes que l’exploitation domestique et la division du travail corrélative ? » [23]

Les paradoxes ou les contradictions précédents illustrent la difficulté de distinguer les genres de choses que l’on analyse, en l’occurrence ici de spécifier l’exploitation des femmes qui ne se réduit pas à l’exploitation capitaliste, tout en gardant la théorie de la plus-value pour analyser cette dernière. Tout rapport d’exploitation est un rapport social, mais l’émancipation des femmes ne se réduit pas à celle du travail prolétaire. Ce diagnostic peut alors être élargi à l’ensemble de la transformation sociale. L’abolition des rapports capitalistes est une condition nécessaire mais non suffisante : simultanément, doivent être partagé le pouvoir et dépassés le patriarcat et le productivisme.

2. L’écriture est-elle un rapport social ? [24]

Pour qu’il n’y ait pas d’autres malentendus, cette fois-ci au sujet des choses de genre, nous pensons qu’il est tout à fait important de féminiser les noms lorsqu’ils sont destinés à désigner une qualité des personnes qui accomplissent une certaine tâche. Par exemple, de la même façon qu’il existe des directeurs et des directrices, des présidents et des présidentes, des agriculteurs et des agricultrices, des instituteurs et des institutrices, des auditeurs et des auditrices, des animateurs et des animatrices, des spectateurs et des spectatrices, des joueurs et des joueuses, il est normal de désigner des professeures (l’usage dira si c’est plus joli que des professeuses, mot qui existait déjà dans l’ancien français), des auteures (est-ce mieux que autrices, qui a pourtant son antécédent en latin ?), etc. Si nous voulons souligner la parité de la présence d’hommes et de femmes à une manifestation, on peut dire les manifestants et les manifestantes, ou dans l’ordre inverse. Et, pour écarter le moindre doute, disons « droits humains » plutôt que « droits de l’homme ».

Cependant, deux confusions sont maintenant couramment faites entre des problèmes différents, au sujet desquelles on se demande pourquoi l’Académie française ne les a pas relevées (sans doute est-elle embarrassée par cette affaire malgré ses dénégations ou son assurance sans faille apparente) [25] :

  • confusion entre la féminisation des noms, quand c’est nécessaire pour les qualités des personnes, et le pointillisme iconographique illisible ·e ou –e ou ·E ;
    - confusion aussi entre le genre des mots et le genre humain ou le sexe des personnes (à ce sujet, le mot « personne » désigne indistinctement un homme ou une femme ; autre exemple, si je suis tué, dira-t-on que je suis un « victim » puisque j’étais un homme ?) ; le paroxysme de cette confusion est atteint avec le mot « les sans-papièrEs » dixit Act Up [26] ; tout cela signifie qu’il convient de distinguer la désignation d’une activité et le sexe de la personne qui s’active. [27]

Trois cent-quatorze professeurs ont signé une pétition pour expliquer pourquoi ils n’enseigneront plus la règle de grammaire établissant qu’au pluriel, « le masculin l’emporte sur le féminin ». Ils avancent trois arguments. Parce qu’il n’en a pas toujours été ainsi dans l’histoire de la langue française, la proximité du substantif féminin l’emportant alors. Parce que la règle du masculin avait un objectif politique d’imposer une domination des hommes sur les femmes. Parce qu’elle reproduit des stéréotypes sexistes auprès des enfants.

Chers (ou che·è·r·e·s, on ne sait trop) collègues, votre premier argument d’ordre historique est exact, mais alors pourquoi ne pas appliquer un tel critère historique à bien d’autres cas ? Par exemple, Ronsard disait et écrivait françois (canonisé par le Liberté de la langue française dans sa pureté de Dupleix) pour français aujourd’hui, et response pour réponse. Pourquoi ne revient-on pas en totalité à la langue des XVIe ou XVIIe siècles ? Sans doute faut-il différencier nettement un retour en arrière et le caractère relatif d’une option déterminée à un moment de l’histoire, donc potentiellement temporaire.

Le deuxième argument comporte très certainement une part de vérité, encore que, si la règle de l’académie a prévalu, faut-il laisser croire qu’il y eut un choix politique collectif déterminé, au lieu d’être, peut-être, l’entérinement d’un usage qui s’installait déjà ? D’ailleurs, si on écoute beaucoup de partisans de cette écriture, ils disent qu’on ne légifère pas sur une langue, car c’est l’usage qui tranche. Si cela est exact, et nous pensons que c’est exact, alors on ne peut pas croire à un complot ourdi par une classe de dominants, même si quelque énergumène a déliré comme suit : « le masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle » [28].

Le troisième argument souligne que la reproduction sociale passe par le canal de schémas sexistes. C’est vrai, bien que ce canal ne soit pas le seul, loin de là. [29] Le problème est de savoir si la suppression de toute règle, donc la « dérégulation » au sens où on l’emploie quand on parle du néolibéralisme, sera favorable au dépassement de toutes les formes de domination ou au contraire à leur maintien, voire à leur renforcement. Reprenons la citation de Ronsard (Épitre à la Response aux injures et calomnies) donnée par nos collègues : « afin que ta cause et la mienne soit connue de tous » ; « soit connue » est ici vraisemblablement accordée avec « la mienne », plus proche que « ta cause » bien que celle-ci soit du même genre, mais alors la règle selon laquelle la présence de deux sujets du verbe oblige à conjuguer celui-ci au pluriel disparaît. Que vont dire nos collègues à leurs élèves ? Chacun écrit-il comme il veut ? La concurrence libre et non faussée donnera-t-elle le la de la grammaire ? En revanche, sans hésitation, la logique exige de dire « Madame la présidente-directrice générale », par respect pour elle, et aussi pour éviter un conflit grammatical : en effet, si on disait « Madame le président-directeur général », on ne saurait comment arbitrer entre les pronoms personnels « elle » et « il » pour remplacer le titre.

Que se passe-t-il dans d’autres langues qui ne connaissent pas les mêmes affres que le français (ou qui en connaissent d’autres). Ainsi, en allemand, la « jeune fille » se dit « das Mädchen », du genre grammatical neutre. La fillette, du genre neutre, horreur ! Mais, une fois passée la réaction indignée, il reste la preuve que le genre des mots ne peut pas être réduit au sexe des gens. D’ailleurs, le mot « sexe » désigne aussi bien le sexe masculin que le féminin : faudrait-il écrire et dire la sexe ou le sexe·e pour les femmes ? On dit aussi le pénis et le vagin, sans qu’il faille y voir un indice de machisme, car, encore une fois, le genre des mots n’est pas lié au sexe des personnes, ni avec la construction genrée des identités. Autre exemple, nous disposons en langue française de deux verbes auxiliaires, avoir et être : avoir n’a pas besoin de être pour sa conjugaison, mais être a besoin de avoir pour sa conjugaison au passé. Parce que le capitalisme impose la suprématie de l’avoir (au sens de posséder) sur l’être, faut-il considérer la conjugaison comme une transposition de l’essence du capitalisme ? Cela serait ridicule.

Dans certaines langues, les déclinaisons ou bien les conjugaisons diffèrent selon trois genres (masculin, féminin, neutre), au singulier et au pluriel. Dans la nôtre, on souhaite bien du plaisir inclusif pour l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir quand plusieurs compléments d’objet direct du verbe de genres différents sont placés avant celui-ci. Enfin, il resterait à statuer sur le cas du pluriel englobant indifféremment les deux genres grammaticaux, problème tout à fait différent de l’« inclusif » car le sens d’une phrase peut être modifié, ou aboutir à une ambiguïté, voire un contresens ? [30]

Le juge de paix pourrait bien être le « parler inclusif » qui devrait logiquement être en cohérence avec l’écriture et la grammaire inclusives. Si ce parler inclusif est possible, alors il légitimerait l’écriture et la grammaire inclusives. Si ce parler est impossible, le doute est permis pour les deux autres, car on ne peut établir une règle pour l’écrit et une autre pour le parler. [31] Et comme on apprend dans l’enfance sa langue dite maternelle avant de savoir l’écrire, c’est le parler qui pourrait l’emporter.

Comme le genre des mots est le résultat des évolutions historiques des langues et des cultures, différentes selon les pays et les régions, qu’il diffère d’une langue à l’autre pour le même objet ou le même concept, et que sa distribution entre le masculin et le féminin est aléatoire, il n’a pas grand-chose à voir avec la domination (universelle celle-là) des hommes sur les femmes.

Les femmes sont discriminées et subissent maintes violences. Leur sort changerait-il avec l’écriture inclusive ? Pendant ce temps, en France, le salaire féminin moyen à temps plein reste inférieur de 18,6 % au salaire masculin moyen, et le salaire masculin lui est supérieur de 22,8 %, mais, quel que soit le point de comparaison, masculin ou féminin, il s’agit de la même inégalité. [32] Le point de comparaison choisi ici a un effet mathématique, il n’implique pas un projet politique, il suffit que chacun ait compris qu’une proportion peut s’inverser, mais son objet reste le même. En d’autres termes, donner aux formes du langage et de l’écriture un effet performatif absolu sur la violence exercée sur les femmes ne risque-t-il pas de nous entraîner vers un idéalisme philosophique assez éloigné d’une intégration nécessaire des représentations culturelles à l’intérieur des rapports sociaux comme constitutives de ces derniers ? Si tant est qu’un « effet de théorie », comme disait Bourdieu, en défaveur des femmes existe, serait-il contrebalancé par l’ajout répété de « ·e » ou « ·es » ?

Bref, si la position favorable à l’écriture dite inclusive est davantage de nature idéologique – en soi, cette idéologie d’orientation démocratique est parfaitement recevable, mais elle reste une idéologie, de même que toute position sur cette question – que dotée d’une grande cohérence théorique, ne vaudrait-il pas mieux prendre les choses à la racine [33] pour analyser les choses de genre(s) ? Autrement dit, ne peut-on défendre une position politique féministe mais aussi vouloir quelques règles d’usage, quelles qu’elles soient finalement, pourvu qu’elles ne soient pas trop incohérentes ?

Pour sortir de la logique et orienter le débat vers un peu plus de poésie, les Français disent la lune et les Allemands disent der Mond ; les Français disent le soleil, les Allemands disent die Sonne. Les Anglais ne s’embarrassent pas : ils disent the moon et the sun. Mais, dira-t-on, l’allemand et l’anglais ne sont pas des langues romanes. En italien, on dit la luna et il sole ; en espagnol, la luna et el sol : mêmes genres qu’en français. Sans doute, parce que le soleil brille plus que la lune, que regarder celle-ci suscite la rêverie, l’amour, alors que le premier nous brûle les yeux si on le fixe. C’est peut-être la raison de notre aveuglement général… Rappelons-nous que « amour » au singulier est masculin et que « amours » au pluriel est féminin. Cela pourrait-il être une règle ? Les Allemands, encore eux, ont choisi pour article défini au pluriel : die, qui, au singulier, est l’article défini féminin…

On (genre neutre) devrait sérieusement s’interroger pour savoir si substituer des problèmes dits sociétaux aux problèmes sociaux ne serait pas la marque d’une société qui s’organise pour rester a-inclusive.

Y a-t-il un ou des points communs entre les regards portés sur les tentatives de théorisation de l’exploitation spécifique subie par les femmes et sur l’écriture dite inclusive ? D’un point de vue méthodologique, il y a le rapport du réel à sa représentation. Deux tentations guettent ces discussions. Celle d’inverser le sens de cette relation. Critiquant l’idéalisme hégélien, Marx écrivit : « Hegel rend indépendants les prédicats, les objets, mais, ce faisant, il les sépare de leur véritable indépendance, de leur sujet. Le sujet réel apparaît ensuite comme résultat, alors qu’il faudrait partir du sujet réel et considérer son objectivation. La substance mystique se change donc en sujet réel, et le sujet réel apparaît comme étant autre, tel un élément de la substance mystique. » [34] Et beaucoup d’autrices féministes appréhendent la difficulté à bâtir une théorie matérialiste de l’exploitation des femmes qui ne ferait que substituer une forme de domination à une autre. La seconde tentation est de glisser ver un retour à une naturalisation de la condition de la femme, voire un essentialisme, qui clive aujourd’hui le féminisme. Retour à un naturalisme si la différence des sexes revient à nier la construction sociale du genre ; essentialisme inversé si le genre précède, donc crée le sexe. On comprend que théoriser tout cela demande de l’écrire rigoureusement. Sinon, le mélange des genres ne ferait pas bon ménage avec la pédagogie de l’émancipation.

Quitte à aggraver notre cas, nous nous souvenons de cet avertissement de Jean Jaurès : « Quand les hommes ne peuvent plus changer les choses, ils changent les mots. Et en vérité, l’humanité a si peu de joies innocentes que je me ferais scrupule de lui retirer celle-là ! » [35] Diable de Jaurès, il utilise « hommes » dans son sens neutre qui a glissé vers le masculin…

Notes

[1Martha E. Gimenez, « Le capitalisme et l’oppression des femmes : pour un retour à Marx », Actuel Marx, « Les rapports sociaux de sexe », n° 30, 2e semestre 2001, p. 71-73.

[3Voir le débat autour du livre de Pierre Bourdieu, La domination masculine, Paris, Seuil, 1998, contesté par beaucoup de féministes.

[4Elasa Galerand et Danièle Kergoat, « Les apports de la sociologie du genre à la critique du travail  », La Nouvelle Revue du travail, n° 4, 2014.

[5Christine Delphy, L’ennemi principal, tome 1, Paris, Syllepse, 1998. Pour une théorie générale de l’exploitation des différentes formes d’extorsion de travail aujourd’hui, Paris, Syllepse, 2015. Ce numéro des Possibles publie avec son accord un extrait de ce dernier livre, qui est une reprise de la thématique principale de L’ennemi principal, reproduite également dans Mouvements, n° 31, 2004/1, p. 97-106. La discussion des thèses de L’ennemi principal est abondante : voir par exemple Clémentine Autain, Sylvie Chaperon et Étienne Balibar qui signent trois articles, suivis d’une réponse de Christine Delphy « Autour du livre de Christine Delphy L’ennemi principal », Travail, genre et sociétés, 2000/2, n° 4, p. 157-200 ; Françoise Armengaud, « Christine Delphy : ’Penser le genre’, Note de lecture », Nouvelles questions féminines, 2002/1, n° 21, p. 126-133.

[6Christine Delphy, Pour une théorie générale de l’exploitation, op. cit., p. 29.

[7Christine Delphy, Ibid., p. 95.

[8Ibid., p. 97.

[9Au contraire de ce que Christine Delphy affirme Ibid., p. 86.

[10Christine Delphy, Ibid., p. 73. La substitution de « valeur du travail » à « valeur du produit du travail » revient à de nombreuses reprises dans le texte de Christine Delphy (p. 75, 76, 78, 79, 80, 97).

[11Christine Delphy, Ibid., p. 99.

[12Christine Delphy, Ibid., p. 99.

[13Christine Delphy, Ibid., p. 99.

[14Un rectangle est un polygone ; un triangle aussi. Mais le concept de rectangle ne peut pas servir à analyser un triangle et inversement. Comme on va le voir plus loin, le polygone est au surtravail ce que le rectangle est à l’exploitation capitaliste et le triangle à l’exploitation patriarcale.

[15Christine Delphy, Ibid., p. 101.

[16Christine Delphy, Ibid., p. 74, 104.

[17Nous nous permettons ici une parenthèse pour remarquer une proximité étonnante entre, d’un côté, la confusion méthodologique commise par les marxistes traditionnels entre le modèle abstrait que Marx élabore dans le Livre I du Capital pour définir le travail productif de valeur pour le capital et l’analyse d’une société capitaliste concrète dans laquelle les travailleurs employés dans les services non marchands produisent eux aussi de la valeur (mais pas pour le capital) qui est socialement validée par décision politique et non par le marché, et, d’un autre côté, la confusion entre la plus-value rendant compte de l’exploitation capitaliste pure et les autres formes d’exploitation que la plus-value ne peut analyser. Voir Jean-Marie Harribey, La richesse, la valeur et l’inestimable, Fondements d’une critique socio-écologique de l’économie capitaliste, Paris, Les Liens qui libèrent, 2013 ; voir aussi les éléments de ce débat sur mon site et dans « Dossier : Extension du domaine de la valeur », Contretemps, 5 juin 2017.

[18À propos du travail, Marx écrit : « Cet exemple du travail montre d’une façon frappante que même les catégories les plus abstraites, bien que valables – précisément à cause de leur abstraction – pour toutes les époques, n’en sont pas moins, sous la forme déterminée de cette abstraction même, le produit de rapports historiques et n’ont leur entière validité que pour ces rapports et à l’intérieur de ceux-ci. » [Karl Marx, Introduction dite « de 1857 » aux Manuscrits de 1857-1857 (« Grundrisse »), Paris, Éditions sociales, tome I, 1980, p. 39].

[19Christine Delphy, « Travail ménager ou travail domestique ? », dans L’ennemi principal, tome 1, Économie politique du patriarcat, Paris Syllepse, 1998, p. 69.

[20Christine Delphy, « Genre et classe en Europe », dans Penser le genre, L’ennemi principal, Paris, Syllepse, tome 2, 2001.

[21Christine Delphy, Réponse, dans « Autour du livre de Christine Delphy L’ennemi principal », op cit., p. 195-196.

[22Chritine Delphy, Ibid., p. 196-197.

[23Étienne Balibar, dans « Autour du livre de Christine Delphy L’ennemi principal », op cit., p. 181.

[24La section qui suit est en partie issue d’un texte publié sur mon blog le 9 novembre 2017 : « Une société qui exclut peut-elle être inclusive ? ». Au cours des derniers mois, de nombreuses tribunes défendant les points de vue opposés ont été publiées ; outre les points de vue partisans de l’écriture inclusive référencés ici, voir aussi Danielle Bousquet et Françoise Vouillot, « N’ayons pas peur d’une mesure de progrès », Le Monde, 21 novembre 2017 ; Agnès de Féo, « On oublie à quel point faire de l’’homme’ un mot neutre est problématique  », 21 novembre 2017 ; « Pourquoi on n’a aucun mal à dire coiffeuse et beaucoup plus à dire professeuse  », 1er février 2018 ; Éliane Viennot, « Le combat féministe passe par les mots », 14 mars 2018 ; pour les critiques, voir : Alain Bentolila, « Ce n’est pas avec l’écriture inclusive qu’on fera reculer la discrimination sexuelle », Le Monde, 21 novembre 2017 ; Claude Hagège « La langue n’est pas sexiste », Le Monde, 26 décembre 2017, « ce sont les comportements sociaux », dit-il.

[26Le Monde, 14 octobre 2017.

[27Dans sa défense « idéologique » (selon ses propres termes) de l’écriture inclusive, Richard Herlin, correcteur au Monde, évoque le cas des trans-genres qui règleraient le différend masculin/féminin en terminant leurs mots par un astérisque.

[28Citation rapportée dans la pétition référencée ci-dessus.

[29On lira avec intérêt Olivia Gazalé, Le mythe de la virilité, Un piège pour les deux sexes, Paris, Robert Laffont, 2017.

[30Dans un débat avec Éliane Viennot, initiatrice de la pétition ci-dessus et qui argumente son point de vue dans ce numéro des Possibles, Bernard Pivot (sur France inter, 2 novembre 2017) faisait la remarque suivante : « Si je dis : Colette est l’une de nos plus grandes écrivaines, cela n’a pas le même sens que si je dis : Colette est l’un de nos plus grands écrivains. »

[31Certains se sont amusés à réécrire « Le corbeau et le renard » en inclusif. L’essayer, c’est l’adopter ?

[33Karl Marx, Zur Kritik der Hegelschen Rechtsphilosophie, Einleitung  : « Être radical, c’est prendre les choses par la racine. Or, pour l’homme, la racine, c’est l’homme lui-même. » Sacré Marx, il a utilisé le mot « homme » dans un sens sexué ou universel ? Réponse : en allemand, der Mensch (l’homme générique) est différent de der Mann (l’homme au masculin) : « Radikal sein ist die Sache an der Wurzel fassen. Die Wurzel für den Menschen ist aber der Mensch selbst. ».

[34Karl Marx, Critique de la philosophie politique de Hegel, dans Œuvres, Paris Gallimard, La Pléiade, tome III, 1982, p. 893-894.

[35Jean Jaurès, Discours au Congrès socialiste international, Paris, 23-27 septembre 1900, dans Congrès socialiste international : Paris, 23-27 septembre 1900, Genève, Minkoff Reprint, 1980, p. 127.

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