Féministe tant qu’il le faudra !

mercredi 4 avril 2018, par Nathalie Arguin *

C’est le thème retenu cette année par les mouvements syndicaux et sociaux du Québec pour le 8 mars, journée internationale des femmes. Le mouvement #MeToo, #MoiAussi (au Québec) et #BalanceTonPorc (en France) démontre non seulement le nombre effarant d’agressions de toutes sortes, mais donne enfin la parole et la crédibilité aux victimes. Beaucoup trop de dénonciations d’agressions de la part des femmes, qu’elles aient été publiques ou non, se sont retournées contre elles. Que ce soit l’agresseur qui profite de sa notoriété pour attaquer la réputation de sa victime ou l’étalement, lors d’un procès, de l’intimité de la victime pour démontrer ses « mœurs légères », ou encore les menaces de perte de promotion et même d’emploi, nous sommes toujours bien loin d’un traitement des plaintes équitable et non sexiste. Féministe tant qu’il le faudra !

Au Canada, durant les trente dernières années, plus de 1 200 filles et femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées. Ces statistiques, affirmées par les autochtones, les groupes de femmes et les syndicats, n’ont que très récemment été reconnues par le gouvernement fédéral. Le gouvernement conservateur précédent a toujours rejeté les demandes d’enquête publique et nationale, traitant ces cas comme des crimes et non comme un phénomène sociologique. Les nombreux témoignages, manifestations, entrevues, conférences, toutes les actions des femmes autochtones, appuyées par les mouvements sociaux et syndicaux, ont porté leurs fruits : le gouvernement libéral, élu en 2015, a enfin écouté les femmes autochtones et ordonné la tenue d’une enquête nationale. L’enquête est toujours en cours et il reste bien du chemin à parcourir. Plus qu’une « écoute nationale », cette enquête doit mener à des résultats concrets. Pour le moment, de nombreux problèmes fonctionnels et idéologiques subsistent. Le manque de communication avec les familles et de transparence, les casse-têtes bureaucratiques et les conflits internes minent la crédibilité de cette enquête. Il nous faudra rester vigilantes, en appui aux femmes autochtones, pour que toute la lumière soit faite sur ces crimes et qu’un réel travail en partenariat avec les autochtones soit enclenché. Féministe tant qu’il le faudra !

Au Québec, le gouvernement libéral, avec comme prétexte l’équilibre budgétaire, a imposé des mesures d’austérité qui ont fait très mal aux services publics. En éducation, alors que le réseau public était déjà en manque de ressources pour assurer un maintien minimum des services et des infrastructures, des millions de dollars ont été coupés dans des budgets aussi cruciaux que la réussite scolaire, l’adaptation scolaire et les services spécialisés, pour ne nommer que ceux-là. Alors que plusieurs écoles tombent littéralement en ruine, rongées par les moisissures dues au manque d’entretien, c’est le service direct aux élèves qui a contribué au financement du sacro-saint équilibre budgétaire. En santé, les coupes et les réorganisations du travail qui, à en croire le gouvernement, ne sont que des changements administratifs, ont des conséquences très négatives sur les patients, les personnes âgées ou handicapées, bref, sur les plus vulnérables de notre société. Tant en santé qu’en éducation, ce sont les travailleurs et majoritairement les travailleuses de ces réseaux, qui tiennent les services à bout de bras. Plusieurs femmes, appuyées par la population, se sont exprimées sur les réseaux sociaux et dans les médias pour dénoncer ce désengagement de l’État qui exploite de façon éhontée leur dévouement et leur professionnalisme, et ce, au prix de leur santé physique et mentale. De plus, ce sont majoritairement les femmes qui agissent comme proches aidantes lorsqu’un membre de la famille est malade ou affaibli et qui s’occupent de l’éducation des enfants. Les femmes sont doublement pénalisées par ces mesures d’austérité, comme travailleuses et comme utilisatrices des services publics. Féministe tant qu’il le faudra !

Ce thème est une affirmation claire qui définit bien le féminisme et qui démontre toute la détermination qui anime les femmes, et qui a également donné l’occasion aux hommes de s’afficher fièrement comme alliés, nombreux l’ayant démontré par lettres ouvertes ou entrevues médiatiques. Féministe tant qu’il le faudra, c’est dénoncer l’illusion de « l’égalité-déjà-là », prendre conscience qu’il y a un immense fossé entre l’égalité de droit et l’égalité de fait, encore en 2018. C’est réaliser qu’une société patriarcale ne devient pas égalitaire avec l’adoption de quelques lois.

Féministe tant qu’il le faudra, c’est dire non à l’immobilisme, à l’indifférence ou au fatalisme. Au Québec, deux producteurs très influents, entre autres, ont quitté la vie publique à la suite de plaintes d’inconduites sexuelles. Le discours et la réaction sociale de ne plus banaliser ces comportements ont mis la pression sur les agresseurs et non plus sur les victimes.

Par ailleurs, la lettre ouverte en France dénonçant les mouvements sur les réseaux sociaux (#MeToo, #MoiAussi, #BalanceTonPorc) comme étant des dérives a suscité des réactions d’étonnement et très peu d’adhésion au Québec. Au contraire, la volonté que ces mouvements sociaux ne s’éteignent pas et la nécessité de ne pas retomber dans ces vieux stéréotypes de la « drague insistante » ont mené au lancement d’une déclaration commune #EtMaintenant, qui revendique de continuer la réflexion et le dialogue amorcés, tant sur la place publique que dans l’intimité, et ce, avec les hommes à nos côtés.

Le mouvement syndical, dont fait partie la Fédération des employées et employés de services publics – CSN –, porte et contribue activement à cette bouffée de fraîcheur qu’est la conscientisation qui vient balayer le cynisme ambiant. Comme toujours, en ce qui concerne les droits des femmes, il nous faudra demeurer vigilantes et solidaires pour que ce changement de paradigme continue d’évoluer de façon constante et durable.

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