Privatisations, NON !

mercredi 7 avril 2004, par Attac France

Le projet de loi de privatisation du statut d’EDF et GDF, transmis au Conseil d’État, serait prêt : le statut d’établissement public serait supprimé et remplacé par des “ sociétés anonymes ” privées.

Depuis plus d’une dizaine d’années, les différents gouvernements de l’Union européenne, et en premier lieu le gouvernement français privatisent à tour de bras. Les motifs invoqués sont toujours les mêmes : faire baisser les prix pour les consommateurs, leur offrir le choix de leur fournisseur, stimuler l’innovation et l’investissement, permettre des alliances internationales...

Partout des échecs Les privatisations ont partout débouché sur des échecs : les prix augmentent, des monopoles privés se constituent, les investissements ralentissent, les actionnaires et les hauts cadres dirigeants se gavent d’options sur titres (stock-options), dividendes et plus-values, le service se dégrade, les effectifs baissent dans les entreprises et les conditions de travail se détériorent. L’effondrement financier du rail britannique a été précédé par de multiples accidents. Pas moins de 60 personnes ont perdu la vie depuis la privatisation de British Railways. Cette situation a amené le gouvernement de Tony Blair à renationaliser, de fait, la société Railtrack chargée des infrastructures ferroviaires. Là où elle a été mise en oeuvre, la libéralisation du secteur postal s’est faite sur le dos des usagers et des salariés. Ainsi en Suède le prix du timbre a augmenté de 60 % en quelques années, et le nombre d’employés a diminué de 27 %. Un constat similaire peut se faire pour de nombreux pays : Finlande, Norvège, Danemark et, bien entendu, le Royaume-Uni. L’énergie n’est pas en reste. British Energy, compagnie privée qui gère les centrales nucléaires, est au bord du dépôt de bilan et doit être renflouée par le gouvernement britannique. Il aura fallu pas moins de 39 heures pour que la vie reprenne à peu près son cours normal pour les 50 millions d’habitants de la côte Est des États-Unis et du Canada, surpris le 14 août 2003, à la sortie des bureaux, par la plus grande panne électrique qu’ait connu cette région. Cette panne colossale aurait pu apparaître comme un malheureux incident technique si elle n’était pas survenue dans le système électrique américain en cours de dérégulation et marqué déjà par d’importantes défaillances (Californie en 2001). L’effondrement du secteur des télécommunications, le premier à être ouvert à la concurrence à l’échelle internationale, représente le symbole le plus visible de l’échec de la libéralisation et des privatisations. Effectuée dans une ambiance euphorique, dans laquelle les nouvelles technologies étaient présentées comme un eldorado à conquérir, la libéralisation des télécommunications a provoqué un surinvestissement généralisé débouchant logiquement sur une bulle spéculative. Lorsqu’elle a éclaté, elle a entraîné la déconfiture des opérateurs les plus liés aux marchés financiers, en premier lieu France Télécom et la ruine de beaucoup de ceux qui avaient acheté des actions. Mais le fiasco actuel est aussi l’échec de la stratégie qui visait à transformer une entreprise de service public en une firme multinationale. Fondée sur l’illusion, moteur du néolibéralisme, d’une montée continue des cours de la Bourse, cette stratégie a abouti à acheter Orange trop cher, au plus mauvais moment et au plus haut de la bulle spéculative.

Au tour d’EDF ? La direction d’EDF a suivi la même stratégie visant à transformer à marche forcée l’entreprise en multinationale. Ainsi, EDF a fortement investi en Europe, notamment en Grande-Bretagne dans London Electricity, en Suède avec Graninge et en Allemagne avec EnBW. EDF est présente en Egypte, Maroc, Guinée et Côte d’Ivoire. Elle est fortement présente en Amérique latine (Mexique, Brésil, Argentine) et en Asie (Chine, Vietnam). Son entrée dans le capital de Montedison a entraîné une levée de boucliers en Italie. Cette stratégie a pour conséquence d’amoindrir et de décrédibiliser le service public. Peut-on vouloir défendre le service public en France et se comporter en multinationale avide de parts de marché à l’étranger ? Une entreprise de service public peut-elle se comporter comme une banale entreprise commerciale ? La politique internationale d’EDF vise à construire un marché mondial et européen de l’électricité, largement contrôlé par les institutions financières et leurs instruments spéculatifs (marchés à terme, options...), provoquant l’insécurité des approvisionnements et le renoncement à l’égalité d’accès. Partout en Europe et dans le monde, l’échec des privatisations et des processus de libéralisation est maintenant évident. Pour le bénéfice des grands actionnaires, le gouvernement Raffarin s’obstine pourtant à vouloir privatiser les entreprises publiques ou nationales : EDF-GDF, Air France, les sociétés d’autoroute, la SNCF, la SNECMA sont les premières concernées. Il faut construire un large front des usagers, des salariés et de tous les citoyens pour l’en empêcher. Une privatisation d’EDF, même appelée hypocritement “ ouverture du capital ”, ne ferait qu’aggraver la situation en rendant l’entreprise dépendante des marchés financiers, avec pour conséquence le dépérissement accentué et rapide de ses missions de service public. Il faut sortir EDF de la gestion libérale actuelle pour la recentrer sur des missions de réponses aux besoins de la société afin de garantir l’accès à l’énergie pour tous. La démocratisation d’EDF/GDF fait partie des reformes nécessaires, la participation des collectivités locales et celles des usagers dans la définition et le contrôle de l’accomplissement des missions l’est également.

Ouvrir le capital, est-ce différent d’une privatisation ? “ Ne vous inquiétez pas, nous ne voulons pas privatiser, nous ouvrons seulement le capital ”. Voilà l’argument qui est régulièrement avancé pour rassurer et désamorcer la mobilisation. Au plan juridique, ouverture du capital et privatisation ne sont pas identiques. La privatisation signifie que le capital privé devient majoritaire. Avec l’ouverture du capital, il reste minoritaire. En principe, dans ce dernier cas, l’État conserve le pouvoir de décision. En pratique, l’ouverture des entreprises publiques au capital privé fait entrer le loup dans la bergerie. La mise en Bourse d’une partie du capital de l’entreprise publique signifie l’arrivée de fonds de pension notamment américains dont le seul motif est le profit et non la bonne réalisation des missions de service public. Ils vont agir pour que l’entreprise distribue un maximum de dividendes, au détriment de ses missions et des conditions sociales pour ses salariés. Et l’entreprise, devenue dépendante de cette source de financement, devra en tenir compte. L’expérience montre que les directions des entreprises publiques dont le capital a été ouvert se convertissent très rapidement à la logique financière sans qu’il soit besoin que les nouveaux actionnaires se manifestent. Ils deviennent avides de stock-options. En pratique encore, l’expérience nous a montré que l’ouverture du capital est le prélude de la privatisation totale. 

C’est pourquoi nous nous opposons à toute ouverture du capital des entreprises de service public ou des entreprises nationales comme la SNECMA EDF : les mensonges du gouvernement 1. Ni les traités européens ni la concurrence n’imposent la privatisation. 2. Pour se développer, EDF et GDF n’ont pas besoin d’un statut privé, elles se développent déjà à l’étranger comme des prédateurs. 3. Elles n’ont pas besoin d’être privatisées pour faire à la fois de l’électricité et du gaz, ce qu’elles font déjà ensemble en distribution. C’est leur fusion qui serait une vraie réponse industrielle pour aller plus loin et non la gabegie de leur séparation. 4. Ces privatisations vont coûter très cher aux citoyens-usagers sur leurs factures d’énergie : 640 euros par ménage pour soulager ces firmes privatisées de leurs engagements retraites futurs ; des hausses de 10 % au moins, avec la fin d’une tarification de l’énergie fondée sur les coûts du nucléaire et du réseau déjà amortis. 5. La privatisation entraînera la suppression de la péréquation tarifaire, la perte de la garantie de continuité du service et de l’égalité de traitement territorial. En un mot, elle marquera la fin des missions de service public. 6. Il n’est pas vrai que le statut du personnel sera inchangé : il relèvera du doit commun privé des salariés des sociétés anonymes.

EDF-GDF appartiennent aux citoyens ! Il faut imposer le passage d’une logique de concurrence à une logique de coopération pour mettre en place de véritables services publics au niveau européen et même mondial. Au-delà, il faut créer en France un large front de tous les citoyens, des usagers et des salariés des services publics pour bloquer tous les projets de privatisation ou d’ouverture de capital.

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