Le sujet du film No other land est la destruction de Masafer Yatta au sud d’Hébron, une zone aride où vivent des communautés palestiniennes. Déclarée « zone interdite » depuis plus de 40 ans, le gouvernement israélien prétend y établir une zone de tir pour son armée.
Basel Adra, jeune militant palestinien et militant non-violent, lutte depuis son enfance contre l’expulsion de sa communauté par les autorités israéliennes. Titulaire d’une licence de droit, il a décidé de rester dans son village avec son père, Nasser, propriétaire de la seule pompe à essence du village. En 2018, il a rencontré Yuval Abraham, jeune journaliste israélien qui a refusé de faire son service militaire, venu pour enquêter sur les démolitions de maisons à Masafer Yatta.
Basel et Yuval devraient être des ennemis que tout oppose mais ils sont animés par la même envie de décrire de l’intérieur la vie insoutenable en Cisjordanie.
Tous deux s’en vont ensemble sillonner la région de Masafer Yatta pour documenter la situation. Chaque message sur leur téléphone leur indique le site d’une nouvelle destruction opérée par l’armée israélienne dont les bulldozers dévastent des villages entiers. Les soldats détruisent le jour, les habitants reconstruisent la nuit.
Autant qu’un témoignage des exactions des soldats et des colons, le film est un acte de résistance d’un collectif de quatre réalisateurs dont deux sont Palestiniens et vivent dans les territoires occupés et les deux autres sont des citoyens israéliens libres et opposés à la guerre.
Très solidement construit, il alterne les séquences « chahutées » où des images captées par des téléphones et des caméras plus ou moins cachées sont compilées par le collectif et les séquences plus « posées » qui exposent un point de vue plus intime lors de conversations entre Basel et Yuval dont l’amitié s’est construite au fil de plusieurs années de collaboration de travail.
C’est dans ces conversations qu’apparaissent les difficultés que pointe Ballal, fermier palestinien et co-réalisateur du film, qui y fait quelques apparitions pour dire son scepticisme devant une telle amitié et l’absence de perspectives ouvertes sur un futur commun. Non présente à l’image, Rachel, la cheffe opératrice traduit la beauté des collines calcinées par l’été qui se recouvrent de vert à la faveur de la pluie.
Un dernier personnage récurrent construit la figure du méchant avec Ilan, l’homme chargé de l’exécution des expulsions pour l’armée israélienne.
Le film ne laisse aucun doute sur sa subjectivité : pour les uns et les autres, il n’existe aucun autre choix que celui de se battre pour l’égalité.
No other land est un film puissant, réalisé sur 5 ans et terminé en octobre 2023.
Sylvie Agard pour le groupe Cinéma d’Attac
En septembre 2024, contre le génocide et la colonisation en Palestine, l’AFPS, Attac et BDS France ont lancé la campagne « Banque complice » qui cible BNP Paribas.