Face au projet « PACTE-MACRON » : Appel pour un pôle financier public au service des citoyens

mercredi 20 février 2019, par Collectif

Les profonds mouvements sociaux en cours (celui des gilets jaunes, mais aussi ceux des mal-logés, des précaires, des jeunes et des retraités, des travailleurs pauvres, des associations de consommateurs et de défense de l’environnement…) se retrouvent tous pour dénoncer l’aggravation des injustices fiscales et sociales dans le pays, le recul des services publics de proximité. Ils revendiquent sous des formes diverses une plus grande transparence et la mise en œuvre d’un véritable contrôle démocratique direct des citoyens sur les décisions liées au budget, aux choix d’investissement publics, au pouvoir d’achat et donc aux salaires.

L’exécutif a été obligé d’ouvrir un grand débat national sur 4 questions qui font en partie écho à ces préoccupations : la transition écologique, la fiscalité et les dépenses publiques, la démocratie et la citoyenneté, et l’organisation des services publics.

Pourtant, comme pour illustrer le caractère dilatoire et hypocrite de cette démarche, le gouvernement poursuit sans la moindre concertation son cap de réformes d’inspiration ultralibérale. Il en est ainsi du projet de loi PACTE en débat en février au Sénat et déjà voté en première lecture à l’Assemblée nationale. Ce projet, sous couvert de « libérer les entreprises » en favorisant le développement de leurs profits, prévoit de réorganiser en profondeur l’intervention publique dans le financement de l’économie avec un programme de privatisation et de banalisation sans précédent.

Cette loi « fourre-tout » prévoit :

  • de relever certains seuils sociaux (notamment ceux liés aux contributions des entreprises à l’aide au logement des salariés) ;
  • de privatiser Aéroports de Paris, ENGIE et la Française des jeux ;
  • de banaliser le statut et la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Cet établissement public spécial, sous contrôle du parlement depuis plus de 200 ans, entrerait dans le régime commun des banques commerciales avec une supervision et un contrôle prudentiel banalisé. Le pouvoir de Bercy serait renforcé au détriment de ce statut d’autonomie ;
    d’organiser un jeu de Monopoly : en échange du contrôle majoritaire au capital du groupe La Poste, la CDC doit céder sa filiale CNP Assurances à La Poste via la Banque Postale.

Ce futur ensemble, avec ses 1000 milliards d’euros de bilan, pourrait passer sous le contrôle direct de la Banque Centrale Européenne comme les grands groupes bancaires européens. Emmanuel Macron ose appeler cette mascarade « pôle financier public » !

Or, rappelons les missions fondamentales de la CDC :

  • Elle gère et protège de la spéculation des marchés et de l’avidité de l’État plus de 300 milliards d’euros issus de l’épargne populaire des ménages (Livret A, Livret de Développement Durable et Solidaire, Livret d’Épargne Populaire). Cette épargne est mise à mal cette année par la décision du gouvernement de bloquer sa rémunération à 0,75 % alors que l’inflation atteint 1,7 % (ce qui donnera 3,6 milliards d’euros de perte en 2018) ;
  • Grâce à cette ressource et à d’autres formes d’épargne qu’elle protège sous le sceau de la foi publique (dépôts des notaires, consignations, professions juridiques…), la CDC finance sur le long terme plus de 70 % de la construction et de la réhabilitation des logements sociaux, ainsi que la plupart des infrastructures et équipements d’intérêt général ;
  • Elle est le principal investisseur en matière de transition écologique et énergétique ;
  • Elle gère les régimes publics de retraite, le compte personnel de formation et assure le financement de la trésorerie de la sécurité sociale ;
  • Elle contrôle des filiales telles que CNP Assurances (premier assureur de personnes), CDC Habitat (premier bailleur social du pays), TRANSDEV (deuxième groupe de transport public de personnes derrière KEOLIS) ;
  • Ce groupe, avec son sous-groupe Bpifrance, joue un rôle décisif dans l’accompagnement et l’investissement des TPE/PME, comme dans celui des grandes entreprises ;
  • Enfin, pour l’État, il s’agit d’une de poule aux œufs d’or qui lui apporte chaque année plus de 2 milliards d’euros.

Et les missions fondamentales du groupe La Poste ?

  • Il constitue finalement pour nos concitoyens le dernier service public de proximité. Il affiche plus de 17 000 points de contacts dans la majeure partie du territoire, mais ne compte en en réalité que quelques milliers de bureaux de postes de plein exercice ;
  • la Banque Postale, encore investie d’une mission publique d’accessibilité bancaire, tend de plus en plus à se banaliser et se détache de son image de banque accessible à toutes et tous. L’absorption envisagée de CNP Assurances la transformera en banquier/assureur et améliorera mécaniquement son ratio d’exploitation.

Cette opération de Monopoly vise en fait exactement le contraire d’un grand pôle financier public :

  • rapprocher à la fois la CDC et la Poste du profil d’un grand groupe de services bancaires et financier conçu en référence aux « standards du genre » en Europe et dans le Monde ;
  • permettre à La Poste de multiplier ses opérations aventureuses de croissance à l’international au détriment des intérêts des populations locales, de l’économie de proximité et de l’environnement ;
  • permettre à la CDC de se rapprocher du modèle d’une holding financière ou d’un fonds d’investissement.

Si le projet de loi PACTE est voté, Emmanuel Macron aura mis fin à cette exception française qui freinait la soumission de la société et de l’économie au capital et aux marchés financiers :

  • il privera le pays de ses derniers services publics financiers ;
  • Il enlèvera tout pouvoir de contrôle sur l’utilisation ou l’orientation de l’épargne issue du travail et des efforts de prévoyance ;
  • Il placera cette épargne sous le contrôle de conseils d’administration banalisés où seront majoritairement représentés la technostructure et les marchés financiers ;
  • les projets d’investissement d’intérêt général seront désormais jugés à l’aune de leur rentabilité potentielle ;
  • la puissance publique sera privée des leviers pour mobiliser les financements publics et privés indispensables à la nécessaire réorientation sociale et écologique de l’économie et du système productif.

Nous posons la question de l’utilisation de l’épargne populaire : aujourd’hui, sur un total de 430 milliards d’euros (dont près de 150 milliards d’euros non centralisés par les banques commerciales), seulement 200 milliards viennent financer le logement social et les investissements d’intérêt général ; les 230 milliards restants alimentent les marchés financiers et financent des projets potentiellement climaticides.

Entièrement réorientée, cette masse financière pourrait financer le développement des services publics (transports, logement, éducation, culture…), leur présence sur l’ensemble du territoire et des politiques de réduction massive des gaz à effet de serre.

A l’opposé, voilà ce que pourrait être un véritable pôle financier public :

  • Ce pôle reposerait sur la mise en réseau des dernières institutions publiques économiques et financières du pays (Banque de France, Poste, CDC, Bpifrance, CNP) et de celles qui devraient être nationalisées ;
  • Il serait placé sous contrôle citoyen, public et social : responsables des établissements, élus nationaux et locaux, représentants de la société civile, salariés et associations ;
  • autour d’une mission commune d’intérêt général, avec un service public du crédit et de l’investissement, mettant en œuvre une autre logique de financement et d’autres critères que la rentabilité financière ;
  • Il financerait les investissements des entreprises favorables à l’emploi, à la formation, à la recherche, le développement des services publics dans les territoires (santé, logement, transports, énergie) ;
  • Il redonnerait l’égalité d’accès et le développement de tous de les biens communs de l’humanité que sont le climat, la pureté de l’air et de l’eau, la biodiversité ;
  • Il engagerait immédiatement un vaste plan de transition énergétique avec la priorité à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, aux économies d’énergie et au développement massif des énergies renouvelables.

Il n’est pas trop tard pour agir. Les mouvements sociaux en cours doivent et peuvent en fournir l’opportunité. Les organisations signataires de cet appel demandent la suspension et la révision du projet de loi PACTE et exigent la constitution de ce véritable pôle financier public.

Premiers signataires :

  • Attac,
  • Confédération Générale du Travail,
  • Convergence services publics,
  • Droit Au Logement, 
  • Les Economistes atterrés,
  • Indecosa-CGT, 
  • Union Syndicale Solidaires,
  • Union des syndicats CGT du Groupe Caisse des dépôts,
  • CGT Caisse Nationale de Prévoyance,
  • CGT Bpifrance,
  • CGT Banque de France,
  • CGT Finances publiques,
  • Solidaires Finances publiques,
  • Fédération Banques et Assurances CGT,
  • Fédération des Activités Postales et de Télécommunications CGT,
  • Fédération des Finances CGT,
  • Solidaires Finances,
  • Sud PTT,
  • SUD Solidaires BPCE,

Avec le soutien de : France Insoumise, Parti Communiste Français,

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