Quel est le lien entre l’ancien ministre des finances britannique Georges Osborne, Friederich Merz, candidat à la tête de la CDU en Allemagne, et Jean-Francois Cirelli, ancien conseiller économique de Jacques Chirac ? Réponse : tous les trois travaillent pour le fonds d’investissement BlackRock. Peu connu en France, BlackRock est le premier gestionnaire d’actifs au monde. Il gère près de 6 000 milliards de dollars d’actifs financiers et est présent au capital de nombreuses sociétés françaises. Principal actionnaire du CAC40, il en détenait plus de 2,3 % fin 2016. Le siège de BlackRock en Europe se situe actuellement à Londres et emploie plus de 3 000 personnes. Le Brexit rend plus difficile l’accès au marché commun pour les entreprises du Royaume-Uni, et BlackRock a donc décidé de renforcer une partie de ses activités dans le reste de l’Union européenne : le back-office et les tâches informatiques seront principalement traitées à Budapest ; les Pays-Bas se voient renforcés comme plaque tournante de l’essentiel des transactions au sein de l’Union. Le bureau de Paris s’agrandit : l’Autorité des marchés financiers (AMF) française vient de donner son accord pour que le groupe transforme son bureau commercial en une société de gestion à part entière. Une victoire pour le gouvernement qui essaie d’attirer les financiers britanniques à Paris. Sa politique visant à réduire le « coût du travail » pour les entreprises, et également sa politique fiscale de plus en plus favorable aux acteurs financiers, ont représenté des arguments essentiels.
Une fois présent dans un pays, le fonds peut user de son pouvoir de pression – déplacer ses investissements dans un autre pays – pour être entendu par les autorités. Son poids financier ainsi que son réseau (anciens députés, hauts fonctionnaires, voire ministres) font de lui un acteur invisible mais extrêmement puissant en Europe. Autre signe de son pouvoir, BlackRock est consulté par les États pour analyser les actifs des banques et ses services ont même été imposés à la Grèce par la Troïka. Conseiller les États est doublement intéressant pour BlackRock : son service d’analyse facture cher ses conseils – qui s’orientent bien souvent vers la libéralisation et la privatisation ; ses investisseurs seront ensuite les mieux placés pour profiter de ces privatisations.