Pierre Khalfa fait partie des lecteurs intéressés par Puissances du salariat (1998), puis en désaccord avec les propositions nouvelles que j’ai progressivement approfondies, avec des tâtonnements qu’il signale pour certains à juste titre, dans L’enjeu des retraites (2010), L’enjeu du salaire (2012) et Émanciper le travail, entretiens avec Patrick Zech (2014). Il avait été un des premiers responsables syndicaux à me demander de présenter mon travail dans une formation syndicale de Solidaires à la fin des années 1990 et nous avons participé en 1999, comme il le rappelle, à un ouvrage collectif de la Fondation Copernic naissante contre la réforme des retraites. Depuis ces dernières années, il critique une évolution de mon travail qu’il considère comme une dérive tant théorique que politique. De fait, je récuse comme « conduite d’évitement » une série de mots d’ordre syndicaux (mais ni la lutte pour la hausse des salaires, ni la promotion des services publics, comme il le laisse entendre). Cette divergence sur la stratégie syndicale est essentielle. Commençons par l’examiner, et nous verrons que c’est la clé de nos divergences théoriques.