Le rapport d’orientation

samedi 14 juin 2025, par Attac France

Les axes de travail de la mandature 2025/2028

1. Le contexte dans lequel s’inscrit l’action d’Attac France

1.1. Recomposition d’un nouvel ordre mondial et transformation de la scène géopolitique
L’état du monde se caractérise par une instabilité croissante et la multiplication des conflits armés. Si l’économie mondiale capitaliste n’est pas sortie de la longue stagnation apparue à la fin des années 2000, la situation dans laquelle elle se déploie a évolué. La situation géopolitique internationale reste dominée par le face-à-face entre un impérialisme établi, les États-Unis, et un impérialisme montant, la Chine, qui est néanmoins peu impliquée militairement dans les conflits contemporains. La Russie, puissance économique affaiblie s’est lancée dans une entreprise néo-impériale dont l’agression contre l’Ukraine est la manifestation la plus récente. L’hégémonie des États-Unis a subi un déclin relatif. La Chine a connu une nouvelle vague d’industrialisation, notamment par la production de technologies de pointe. Le dirigisme autoritaire de l’État chinois permet d’éviter toute forte contestation populaire. Les nouvelles routes de la soie illustrent la volonté de développement international de la Chine. Mais les niveaux de pauvreté d’une grande partie de la population chinoise demeurent très importants. Menacés dans leur hégémonie économique, les États-Unis sous la présidence de Joe Biden ont investi 500 milliards de dollars de fonds publics (sur dix ans) pour tenter de relancer l’économie et favoriser les entreprises privées. Leur puissance diplomatique et militaire leur permet de rester prédominants dans la marche du monde. La seconde élection de Donald Trump risque d’accentuer les désordres mondiaux et donne un élan supplémentaire à l’extrême droite au plan international. Ces rééquilibrages partiels entre puissances ont ouvert un espace dans lequel des puissances secondaires peuvent jouer un rôle significatif, au moins dans leur propre région (Russie, Turquie, Brésil, Arabie saoudite…). 
Le niveau d’interdépendance des économies s’accroît, comme en témoigne la multiplication des accords de libre-échange et des flux économiques, avec un marché mondial et une liberté de mouvement des capitaux toujours plus importants, malgré la pause imposée lors de la crise du covid. Cette extension du capitalisme accentue gravement la crise écologique globale, dont les manifestations se multiplient, touchant les populations les plus pauvres. Cette crise est le défi majeur actuel, alors qu’une partie des réponses internes au système tient en une transition par une massification des technologies dites vertes, qui ne fait qu’accélérer les politiques extractivistes. Les tensions régionales provoquent des guerres très meurtrières, susceptibles de redessiner certains équilibres ; c’est notamment le cas de l’agression contre l’Ukraine, des guerres de l’État d’Israël au Proche-Orient, du génocide contre le peuple palestinien à l’invasion du Liban et de la Syrie. »
Alors que le droit international est de plus en plus bafoué par de nombreux États, on assiste à une remilitarisation du monde, une hausse des budgets militaires des États, qui cependant provoque, du moins concernant la Palestine une remobilisation pour la paix et les droits des peuples dans de nombreux pays.
Les crises (écologique, sociale, démocratique…) s’imbriquent et démultiplient leurs dynamiques, produisant une dynamique mortifère pour les sociétés humaines, et plus généralement pour le vivant. Les réponses politiques dans de très nombreux pays relèvent d’un néolibéralisme autoritaire et d’une montée de l’extrême-droite, sous différentes formes, depuis les héritiers du fascisme classique jusqu’aux modèles libertariens.

1.2. Le retour à l’orthodoxie budgétaire dans l’Union européenne
L’Union européenne est sortie difficilement de l’épreuve de la pandémie. La guerre en Ukraine a aggravé une situation déjà tendue, économiquement et politiquement. Si la pandémie a montré la fragilité économique de l’Europe, l’agression russe en Ukraine puis celle menée par Israël ont montré son faible poids géopolitique et son absence de cohérence interne sur l’international.
Après le « quoi qu’il en coûte » de la période Covid et le relâchement de la rigueur budgétaire, le retour à l’orthodoxie ne s’est pas fait attendre. Début 2024, le Pacte de Stabilité et de Croissance a été revu. S’il donne l’impression d’une plus grande souplesse, son application est en réalité beaucoup plus rigoureuse. L’application des « règles d’or » (pas plus de 3 % de déficit public et pas plus de 60 % de dette publique par rapport au PIB) devrait devenir plus drastique. Le contrôle budgétaire des États par la Commission n’en sera que plus rigoureux.
Au niveau politique, la période a été marquée par le renforcement de la présence de l’extrême droite, que ce soit dans les gouvernements ou au niveau de l’Union (avec 187 député·es d’extrême-droite, à côté des 188 du PPE, et pour la première fois des commissaires européens d’extrême-droite). Si l’Italie ou la Hongrie ont un gouvernement dirigé par des partis d’extrême-droite, de nombreux autres gouvernements bénéficient d’un soutien (Finlande, Pays-Bas, Suède, Slovaquie…) ou sont soumis à une position très forte de l’extrême droite qui influe sur les politiques nationales (Allemagne, France). Une telle situation ne peut que peser négativement et limiter les quelques avancées permises par les politiques européennes, notamment en matière environnementale. De même, de très nombreux États membres ont annoncé des politiques migratoires plus dures.

1.3. En France aussi, une alliance entre le néolibéralisme autoritaire et l’extrême-droite
Dans le monde comme sur le plan national, les politiques fiscales et budgétaires néolibérales de ces quarante dernières années présentent un bilan catastrophique : elles ont provoqué le repli et l’affaiblissement des services publics et du système de protection sociale, exposé une partie croissante de la population à la précarité, et alimenté les inégalités de toutes sortes. Le consentement aux prélèvements obligatoires – piliers d’une démocratie sociale digne de ce nom – recule. Pour imposer leur agenda austéritaire, les néo-libéraux s’allient de facto avec l’extrême-droite dont la montée en puissance s’accélère. Ce poids de l’extrême-droite, dont l’électorat est cimenté en grande partie autour du racisme, structure en bonne partie la vie politique française, en particulier dans la séquence 2024-2027. Désormais son arrivée au pouvoir est une hypothèse forte, ce qui ne peut que concerner et inquiéter les mouvements sociaux et syndicaux. Avec l’enracinement de l’extrême-droite, c’est aussi la question des libertés publiques qui se pose avec une nouvelle acuité, ainsi que les menaces qui pèsent sur les migrant·es, les personnes racisées, les mouvements féministes et LGBTQIA+... 
S’ajoute au poids électoral pris par le RN, un haut degré de crise politique, et l’échec du projet macroniste basé sur l’hypothèse d’un nouveau bloc social centriste, composé des gagnant·es de la modernisation capitaliste. 
Contrairement à d’autres pays, la gauche n’a pas disparu même si elle demeure minoritaire, et la formation de la NUPES puis du Nouveau Front Populaire ont montré que les aspirations à l’unité de la gauche politique étaient fortes dans une partie importante de l’électorat.
Les mobilisations collectives n’ont pas faibli durant les dernières années, sur différents fronts : monde du travail, luttes écologistes, antiracisme, féminisme… Cependant, la mobilisation d’ampleur et l’unité syndicale n’ont pas suffi à stopper la contre-réforme des retraites.
Sur le front écologiste, le développement des Soulèvements de la Terre a cristallisé de nombreux combats et a su rassembler différentes organisations lors de la menace de dissolution. Les Soulèvements apparaissent comme un lieu essentiel pour l’écologie militante même si celle-ci ne se résume pas à ce mouvement. Pour autant, les victoires pour la défense du vivant restent rares et insuffisantes, et la répression touche aussi désormais les militant·es écologistes, la répression des mouvements sociaux étant une donnée d’ensemble de la période actuelle.

2. Les engagements d’Attac

2.1. Lutter pour la bifurcation écologique et la justice sociale
Née pour défendre le projet d’une taxe sur les transactions financières d’aide aux citoyen·nes et ayant élargi son champ de réflexion et d’action aux enjeux écologiques et sociaux, Attac porte la justice fiscale, sociale et écologique dans son ADN et son orientation. Par justice sociale, Attac n’entend pas seulement la réduction des inégalités socio-économiques, la lutte contre la précarisation et la défense de la protection sociale et des services publics mais bien plus largement la lutte pour une véritable démocratie sociale, une société débarrassée du patriarcat, du racisme et de toute oppression. Notre association se veut féministe et anti-raciste.

Dans ses écrits, ses actions et ses campagnes, Attac n’a cessé de montrer qu’une juste répartition des richesses était indispensable et que celle-ci passait par un système social et fiscal, et une politique budgétaire à même de financer la bifurcation écologique et les politiques sociales nécessaires à la réduction des inégalités, en particulier en redéveloppant des services publics pour répondre aux besoins contemporains et en défendant les communs. A cet égard, Attac dénonce la généralisation de services d’intérêt général à deux vitesses voulue par l’Union européenne, accentuant les injustices sociales et défend notamment le plein droit pour tous.tes à la justice, la santé et l’éducation. L’objectif est également non seulement de combattre les politiques néolibérales, mais aussi d’empêcher les politiques austéritaires, en France comme dans les autres pays. Ce combat demeure central pour Attac et ce d’autant plus que l’extrême droite bénéficie des dégâts de ces politiques néolibérales. Il s’agit de « reprendre la main » dans le débat d’idées sur la nécessité et la possibilité d’autres choix économiques et d’autres perspectives en matière de répartition des richesses, de citoyenneté sociale et d’émancipation. Pour cela, il nous faut préciser quels sont les moyens d’engager une bifurcation écologique. Outre les questions budgétaires et fiscales, la définition de services publics en faveur de la bifurcation et de la justice sociale, la nécessité de transformer le travail et d’améliorer les droits des travailleur.es, la défense et l’extension des protection sociales, ou encore la définition des besoins sociaux adaptés aux limites environnementales, doivent faire partie, entre autres, des débats portés par notre association.
Attac en s’engageant dans les projets de sécurité sociale de l’alimentation œuvre à la réalisation de cette transformation sociale et écologique.
Le projet d’Attac est tout autant féministe qu’écologiste. Capitalisme et patriarcat sont en effet deux systèmes d’exploitation et d’oppression imbriqués qu’il s’agit de combattre de manière simultanée. Les violences économiques touchent d’abord les femmes et elles sont les premières victimes de l’affaiblissement de la protection sociale et des services publics. Les violences sexistes et sexuelles sont non seulement le résultat de la culture du viol mais aussi l’expression de rapports de pouvoir redoublés dès lors que les femmes sont placées en position de subordination économique. La lutte pour le renforcement des droits des travailleurs et des travailleuses est aussi une lutte féministe. De même, la revalorisation des métiers féminisés est un combat pour la réduction des inégalités socio-économiques.
Enfin, pour Attac, la justice écologique et climatique signifie reconnaître que les différents groupes sociaux n’ont pas les mêmes responsabilités en matière de changement climatique et de destruction du vivant, et ne subissent pas de la même façon les effets des dégradations environnementales. A cet égard, la responsabilité des multinationales, des ultrariches et du système productiviste qu’ils perpétuent est sans commune mesure Tant que les criminels climatiques ne seront pas clairement identifiés et empêchés de nuire, il sera injuste de demander aux plus précaires et aux pays du Sud de consentir un effort qui se fait souvent au prix d’un appauvrissement ou d’un endettement accru. Il convient de mettre fin à l’extractivisme, ce qui nécessite des politiques de sobriété ambitieuses et volontaire , une révision drastique de nos modes de production et de consommation afin de sortir des énergies fossiles, sans recourir au nucléaire, et de reconnaître pleinement la dette climatique des pays occidentaux. En cela, l’insertion d’Attac dans les mobilisations écologistes au niveau français et international est d’autant plus importante.

2.2. Poursuivre et renouveler l’altermondialisme
Malgré le très fort affaiblissement des mouvements altermondialistes, Attac défend une perspective internationaliste et solidaire, contre toutes les formes de domination et de néocolonialisme. Elle accompagne les mouvements sociaux et citoyens qui aux quatre coins du monde cherchent des voies alternatives au système actuel.
Les modes de mobilisations des mouvements sociaux changent avec une demande très forte d’horizontalité qui percute les modes de décision plus anciens et plus descendants. Les problématiques internationales étant complexes et liées à de multiples sujets, elles nécessitent des collaborations avec des organisations et des collectifs qui ont une expertise sur différents sujets et régions du monde, et des outils d’aide à la compréhension et à l’action. Cela doit permettre de faciliter les échanges avec les premier·ères concerné·es et de faire en sorte que les militant·es d’Attac se forment sur les questions internationales. Pour cela, l’association encouragera la participation aux rencontres internationales, (FSM, rencontres lors des COP…), Européennes, (European Commun Space for Alternatives - ECSA) et aux rencontres au niveau national avec les Universités d’été.

2.3. Lutter contre l’impunité des multinationales et les traités de libre échange
Face aux multinationales qui, partout dans le monde, et en toute impunité, provoquent des dégâts sociaux, humains et environnementaux considérables, nous menons des campagnes de dénonciation des méfaits de compagnies comme Total, ou contre les agissements des banques complices et toxiques. Nous mettons ainsi en évidence la nocivité des projets des multinationales qui, sous statut transnational, peuvent s’enrichir sans assumer leur responsabilité des dommages causés. Les multinationales en elles-mêmes, par leur puissance financière supérieure au budget de bien des États, constituent une menace directe pour la démocratie. Elles prospèrent en jouant des règles fiscales et sociales. Elles profitent de la prolifération des traités de libre-échange, au détriment des peuples et des écosystèmes. Ces traités sont les instruments d’un néo-impérialisme commercial, dans la mesure où ils entretiennent les relations de pouvoir héritées de l’ère coloniale qui ont établi les fondements du commerce international moderne, même si d’autres acteurs, comme la Chine ou la Russie, sont maintenant très actifs dans des accords de libre-échange.
Attac dénonce les accords de libre-échange en cours et à venir tels que l’accord UE-Mercosur ou plus anciennement le CETA ou le TAFTA au vu de leurs méfaits sociaux et environnementaux. La vigilance est de tous les instants car les États comme la commission européenne œuvrent toujours pour le plus d’accords possibles même au détriment des agriculteur·rices et des consommateur·rices. Il convient en outre de veiller à la bonne application de la loi de 2017 sur le devoir de vigilance des entreprises. Attac soutient les efforts en vue d’obtenir un Traité contraignant à l’ONU sur la responsabilité des multinationales, dont le projet est toujours en cours depuis 2014. 

2.4. Lutter pour un contrôle démocratique du financement de l’économie
Les investissements publics et privés visent à garantir les profits des grandes entreprises, au détriment du financement des politiques devant répondre aux besoins des populations. Attac soutient les initiatives visant à redonner la main aux pays du sud dans la construction de leur souveraineté financière : audits citoyens, annulation de la dette, la taxation des flux financiers…
La lutte contre l’évasion fiscale, la taxation des profits des multinationales et des produits numériques, la transformation des politiques monétaires, le plafonnement des écarts de revenu et de patrimoine, l’implication des citoyen·nes dans la construction des budgets permettront aux citoyen·nes d’exercer un contrôle plus démocratique des modes de financement de l’économie. La mobilisation citoyenne a déjà permis d’obtenir des victoires. Aujourd’hui, pour aller vers une société sans évasion fiscale, sans spéculation et sans financement des énergies fossiles, nous devons prendre le contrôle sur l’organisation des banques, sur les prélèvements fiscaux ou par les cotisations sociales, ainsi que sur les choix des investissements.

2.5. Lutte contre l’autoritarisme et les atteintes aux libertés publiques

2.5.1. Un projet néolibéral autoritaire
La paupérisation et le creusement des inégalités, fruits des politiques libérales, font naître contestations et résistances. Pour les empêcher, le pouvoir mène une répression sans précédent. Il détourne les moyens législatifs, judiciaires, légaux et institutionnels (usage abusif du 49-3, outils législatifs destinés à la lutte contre le terrorisme…) Il justifie l’ensemble de ces mesures par une stigmatisation et une criminalisation du mouvement social. Cette mise au ban des opinions démontre une pratique de plus en plus autoritaire du pouvoir largement corroborée par les alertes des instances nationales, européennes et internationales sur le niveau de répression et des atteintes aux libertés publiques.
L’exécutif a multiplié lois et mesures liberticides et développé une doctrine du maintien de l’ordre au service de sa politique. Ainsi, l’usage de la violence par la police s’est aussi largement amplifié à l’encontre des jeunes, des personnes racisées, des militant·es et manifestant·es, dans les quartiers populaires et contre les mobilisations écologistes, c’est également le cas dans les départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer (DROM-COM). Ce système de violences institutionnelles pave le chemin à l’extrême-droite qui n’aura qu’à utiliser les outils à sa disposition.
Dès lors, lutter pour la défense et l’extension des libertés publiques, de la démocratie s’intègre totalement à la lutte contre l’ordre néo-libéral, d’autant plus dans une Ve République hyper-présidentialisée. Alors que le décrochage d’une partie de la population avec les représentant·s politiques et leurs pratiques s’accentue et que les contre-pouvoirs citoyens sont mis à mal, Attac défend la perspective d’une « démocratisation de la démocratie » visant à donner les moyens à toutes les couches de la population d’intervenir dans les choix politiques, sociaux et économiques.

2.5.2. Développer nos capacités de résistance
L’engagement d’Attac a amené l’association et/ou ses membres à être de plus en plus souvent poursuivi·es. L’association doit poursuivre et amplifier son travail de médiatisation et de dénonciation de cette judiciarisation croissante, renforcer, et travailler à mieux sécuriser les activités de ses militant·es.
Ces attaques, qui frappent de façon diverse mais continue, doivent en parallèle amener à la constitution de fronts larges, contre la répression et pour la défense des libertés à toutes les échelles.
Attac doit prendre toute sa part dans les observatoires, les collectifs et autres initiatives en favorisant la participation le plus large possible.

3. Les moyens pour mettre en œuvre ces engagements

3.1. La stratégie d’Attac et ses outils
Attac porte des objectifs politiques de transformation sociale en rupture avec la logique capitaliste. L’association demeure néanmoins totalement indépendante du champ partisan, sans s’interdire de nouer des contacts, lorsque cela est nécessaire, avec les partis politiques. En outre, Attac est un espace de rencontre entre différentes cultures politiques et militantes ce qui constitue à la fois une force et un défi. Ainsi, Attac se veut une organisation dans laquelle s’élaborent des horizons émancipateurs et des imaginaires radicalement alternatifs. Nous souhaitons contribuer, avec d’autres, à des transformations sociales qui dépassent le cadre des institutions de la démocratie représentative, en articulant résistances, rapport de force, adoption de mesures législatives obtenues à l’issue de pressions populaires, et alternatives concrètes, notamment locales, qui s’expérimentent dans les luttes et sur les territoires. En ce sens, Attac s’appuie sur quatre piliers : l’expertise, l’éducation populaire, l’action et la construction d’alliances. Par notre expertise, étayée notamment par les analyses rigoureuses de notre Conseil scientifique, nous sommes en capacité de proposer une orientation et des propositions qui déclinent celle-ci de manière concrète, tout en cherchant à renforcer nos liens avec le monde de la recherche ou les élaborations qui se mènent dans le champ militant. Par nos actions, nous travaillons à rendre visibles nos positions afin qu’elles pèsent dans le débat public et soient mises à l’agenda politique et médiatique. En contribuant à la mise sur pieds d’arcs larges de mobilisation, nous prenons notre part dans la construction de rapports de force. En tant qu’association d’éducation populaire, nous incarnons dans notre fonctionnement même les imaginaires que nous portons et les enrichissons par l’expérimentation d’autres rapports aux autres, au vivant ou aux savoirs, qui s’émancipent de toute domination.

Les alliances nouées par Attac peuvent être ponctuelles ou durables en France ou à l’international, elles visent à être les plus larges possibles afin de construire un puissant rapport de forces. Par son expérience et la confiance nouée avec de multiples organisations, Attac peut aider et inciter les organisations du mouvement social moins coutumières du travail unitaire à s’inscrire dans des dynamiques communes. Malgré des difficultés, l’expérience de l’Alliance écologique et sociale (AES) doit rester un axe important de l’intervention d’Attac dans la durée et de l’investissement du CA : l’enjeu est bien celui d’articuler social et écologie, au cœur des alternatives portées par Attac. Cet investissement, quand c’est possible, doit se décliner au plan local. Le collectif pour une transition citoyenne (CTC) peut aussi contribuer à ce travail de convergences durables. A mesure que s’accentue la crise écologique, les luttes en défense du vivant se massifient. Depuis les Soulèvements de la Terre jusqu’à Terres de Luttes, en passant par les associations plus anciennes, les cadres d’action se sont diversifiés depuis ces dernières années. Attac poursuivra son investissement.
Par ailleurs, l’expérience de 2024 montre que face au risque de prise de pouvoir de l’extrême droite, Attac peut être amenée à se mobiliser aux côtés de forces politiques qui sont proches de ses propositions et de ses valeurs, après consultation des adhérent·es, dans la mesure du possible.

3.2. Les campagnes et chantiers
3.2.1. Plusieurs types de campagne possibles

Les idées d’extrême droite sont de plus en plus présentes dans le débat public et médiatique. Les stratégies, les contenus, la propagande des idées et la progression des scores électoraux de l’extrême droite devront être analysées plus finement par Attac. Cela doit être nécessairement pris en compte dans les campagnes sur le fond (être utiles au combat contre l’extrême droite) comme sur la forme (évoluer au vu du contexte répressif).

Objectifs des campagnes
Tous les sujets qui traversent l’association ne pourront pas nécessairement faire l’objet d’une campagne. La définition des priorités tient compte de l’expertise, de l’expérience et des moyens dont dispose l’association, et du contexte politique. Stratégiques, les thèmes de campagnes sont validés par le Conseil d’Administration qui charge ensuite l’espace campagne de leur construction : définition des objectifs, matériel de campagne et moyens d’action. Les campagnes cherchent à faire bouger les lignes sur des thèmes précis, obtenir des avancées concrètes, participer à la construction d’un rapport de forces. Elles peuvent permettre aussi d’assurer la visibilité de l’association, de recruter des adhérent·es, des militant·es, d’accompagner un appel à dons... Dans tous les cas, l’implication des Comités Locaux, tant dans les échanges lors de la construction des campagnes que dans la phase de déploiement, est primordiale pour atteindre ces objectifs.

Types de campagnes
Attac mène plusieurs types de campagnes au niveau national et international :
• les campagnes initiées par Attac et définies par le CA ;
• les campagnes issues du mouvement social dans lesquelles Attac s’engage en participant régulièrement aux cadres unitaires, et aux temps forts initiés par le mouvement social ;
• les campagnes en inter-organisations ;
• les campagnes issues de mobilisations ponctuelles.

Moyens d’action
La désobéissance civile peut être utilisée comme moyen d’action dans le cadre des campagnes. Dans le contexte répressif actuel, le recours à la désobéissance civile se fait uniquement dans le cadre du consensus d’action d’Attac qui ne vise jamais les personnes physiques et a pour double objectif de permettre aux militant·es d’agir en conscience et de positionner les méthodes de l’association dans la diversité des tactiques de lutte du mouvement social. Dans ce cadre, les actions d’Attac visent systématiquement la défense du bien commun, sans porter atteinte à l’intégrité physique ou psychologique des personnes présentes sur l’action, et sans exposer les militant·es individuellement à la répression policière et judiciaire, dans une démarche de soin collectif de la préparation à la réalisation de l’action.

3.2.2. De nombreux chantiers internes

Enjeux numériques
Attac s’engagera résolument sur les enjeux numériques et leurs emprises sur nos vies, véritable question politique. Pour cela, il s’agira : de contribuer à la diffusion et l’utilisation d’outils qui permettent un contrôle personnel et collectif de l’outil utilisé comme les logiciels libres ; d’améliorer nos pratiques numériques ; de protéger les données personnelles des adhérent·es et des salarié·es ; de lutter collectivement avec les acteur·ices du numérique militant contre les GAFAM acteurs du « capitalisme de surveillance » ; de sensibiliser aux conséquences énergivores des équipements numériques et à la fracture sociale du numérique.

Éducation Populaire et émancipation : au cœur de notre fonctionnement associatif
Attac accomplit depuis des années un travail important pour sensibiliser largement sur les thèmes prioritaires de l’association, afin de développer notre capacité à nous adresser à un public le plus large possible et aux divers réseaux militants. Pour toucher davantage ce large public, il nous faudra réfléchir aux moyens de communication à développer et aux supports produits. En particulier, il faudra réfléchir à la manière de travailler avec les organisations et collectifs qui agissent dans les espaces ruraux et péri-urbains et dans les quartiers populaires. Il conviendra également de nous impliquer dans les enjeux et luttes locales afin d’y expérimenter les horizons émancipateurs que nous portons et d’y porter les propositions concrètes pour un autre monde. Cela implique un travail étroit avec nos CL mais aussi un travail d’alliances et de rencontres avec d’autres organisations, collectifs et associations. Enfin, répondre aux sollicitations des universités et écoles et susciter les échanges semble un enjeu fondamental afin d’aller échanger avec une partie de la jeunesse. Si nous voulons que cet élargissement de notre audience se traduise par une diversification des profils militants, il faudra transformer nos modes de fonctionnement pour renforcer l’horizontalité et la lutte contre les rapports de pouvoir.
Dans cette perspective, loin de se limiter à de simples outils, l’éducation populaire est un moyen tout autant qu’un objectif.
Par ailleurs, l’éducation populaire à Attac s’articule avec la production d’expertises et de savoirs utiles aux mouvements sociaux. Ces savoirs doivent se créer en sollicitant chercheur.ses et militant.es, tout en veillant à favoriser leur diffusion et leur appropriation par le plus grand nombre.
Enfin, en tant qu’association d’éducation populaire, Attac travaille sur la question du rapport au savoir, l’importance de le situer et de le rendre accessible pour toutes et tous. En cela la formation revêt bien entendu une importance fondamentale aussi bien en interne qu’en externe. Militer à Attac, c’est aussi acquérir savoirs et savoir-faire : la montée en connaissances et en compétences du plus grand nombre de militant·es est une condition pour faire d’Attac un espace où la démocratie s’expérimente et se vit.
Le soin ou « care » tel qu’il est nommé dans de nombreux milieux militants (c’est-à-dire organiser collectivement la prise en charge des besoins de toutes et tous et construire des rapports militants et organisationnel débarrassés de rapports de domination pour permettre à chacun·e de trouver sa place dans l’association) sera également une préoccupation politique et organisationnelle majeure en cohérence avec notre volonté de transformation sociale. Cela est d’autant plus nécessaire car nous faisons face à une situation politique instable et difficile ainsi qu’à une répression féroce et croissante.
En ce sens le CA travaillera à la mise en place d’outils et de dispositifs internes (charte, formation, note explicative…) de lutte contre toutes les oppressions. »

La recherche d’horizontalité s’est traduit ces dernières mandatures par la mise place des Assises et d’un week-end de réflexion stratégique depuis 2021 afin d’assurer une meilleure démocratie interne. S’il n’est pas parfait, ce travail démocratique est sans cesse en mouvement. Au-delà, les processus d’accueil afin de pouvoir tout à la fois rajeunir les adhérent·es, les fidéliser, augmenter la collaboration entre les adhérent·es dans leur diversité, générationnelle et/ou de culture militante, leur donner envie de prendre des responsabilités en lien avec leurs aspirations et leurs savoirs, doivent être une préoccupation de toutes nos instances.

3.3. L’animation du réseau militant
Il revient au Conseil d’administration de s’assurer que le présent rapport d’orientation est mis en œuvre et de coordonner et dynamiser le réseau militant d’Attac France afin de garantir son implication dans les campagnes et chantiers menés. Le réseau est constitué des adhérent·es de l’association, des comités locaux, du Conseil scientifique, des espaces et groupes de travail nationaux et du collège des fondateurs. Si Attac a vocation à rester une association de militant·es, elle est aussi une association employeuse. Pour cela, elle s’appuie notamment sur l’équipe salariée. Ceci implique des responsabilités, en particulier pour le CA, en matière de santé et sécurité au travail, notamment en matière de prévention des risques psycho-sociaux. Ceci implique aussi de se préoccuper de la pérennisation des moyens financiers et de l’indépendance financière de l’association qui repose à plus de 90 % sur les adhésions et les dons. Pour garantir cette indépendance et développer nos ressources, il est nécessaire d’agir sur les différentes catégories de contributeurs : adhérent·es, donateurices ponctuel·les ou par prélèvement automatique ainsi que sur les sympathisant·es susceptibles de devenir contributeur·ices.
Parce qu’ils sont implantés sur une grande part du territoire, les comités locaux constituent l’espace premier d’engagement dans Attac. Ils participent à l’échelle locale aux actions et à la stratégie d’alliances de l’association. Ils sont ainsi un relai essentiel de la stratégie que poursuit Attac, et qu’ils ont aussi contribué à élaborer. Le CA devra rester vigilant sur les manières concrètes de mieux associer les comités locaux à la conception et à la mise en œuvre des campagnes et chantiers nationaux, au moment des RCL et entre les RCL. Le développement des liens entre référent·es du CA et comités locaux est une piste à explorer. Le développement de moyens notamment salariés en est une autre.
De même, le CA est l’instance au sein de laquelle les différents espaces et groupes de travail doivent pouvoir échanger sur l’actualité de leurs activités et sur leurs projets. Il est de la prérogative du CA, à l’issue de ses délibérations, d’établir des priorités et d’allouer les ressources militantes et salariées en conséquence de celles-ci. De même, il lui appartient de réfléchir à la manière de rendre visible et de diffuser l’expertise produite par les espaces et groupes de travail, sous la forme de publications ou autres. Les priorités ainsi établies par le CA servent de feuille de route au Groupe action (GA). Celui-ci (le groupe action), a vocation à faire des émules au sein des comités locaux afin d’adapter les actions (buts et modalités) aux réalités du terrain, en accord avec les campagnes décidées nationalement. C’est en son sein et par la participation d’Attac pleine et entière aux mobilisations des mouvements sociaux que l’association poursuit sa réflexion sur la diversité des tactiques et actualise son consensus d’action. Enfin, il est aussi de la responsabilité du CA d’animer le collège des fondateurs, d’assurer l’implication de ses membres et de mener une réflexion constante sur l’évolution de ce collège. Les membres fondateurs jouent un rôle essentiel dans l’élaboration de la stratégie de l’association en matière d’alliances et de dynamiques unitaires. Cet effort unitaire se traduit notamment par l’organisation des Universités d’été des mouvements sociaux et des solidarités.

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