Christine Lagarde vient d’être élue directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) en remplacement de Dominique Strauss-Kahn. À l’heure où le Parlement grec vote un nouveau plan d’austérité injuste et inutile sous la pression de l’Union européenne et du FMI, cette décision élude tout débat sur une réorientation radicale du Fonds. Mais l’actualité judiciaire française (affaire Tapie) ou l’aggravation prévisible de la crise financière pourraient fort bien poser à nouveau ce débat dans les mois qui viennent. C’est pourquoi Attac maintient la candidature de sa coprésidente Aurélie Trouvé à la direction du FMI et engage dès maintenant des démarches pour faire émerger une candidature altermondialiste venant du sud de la planète. C’est la cinquième fois que ce poste, traditionnellement réservé à un État européen, échoit à la France, et il n’y a hélas pas lieu de s’en réjouir. Depuis les années 1980, la politique du FMI est toujours la même, quel qu’en soit le directeur général. Ainsi, c’est sous la direction de Jacques de Larosière (1978-1987), puis de Michel Camdessus (1987-2000) qu’ont été élaborés les plans d’ajustement structurel ayant conduit à la ruine tant de pays d’Amérique latine, d’Afrique ou d’Asie, si bien que par la suite la plupart des pays émergents ou en développement ont refusé de recourir à l’aide du FMI ou de la Banque mondiale (c’est d’ailleurs ce que vient de faire l’Égypte tout récemment). Les choses allaient-elles changer avec DSK ? Il fallait être bien naïf pour le croire. À l’exception d’un léger toilettage, le fonctionnement de l’institution est resté le même : c’est toujours “un dollar = une voix”, si bien que les États-Unis, avec plus de 17% des voix, disposent d’un droit de veto qui leur permet de contrôler le FMI, où les grands pays de l’Union européenne jouent aussi un rôle majeur. Il y a quand même une chose qui a changé : avec la crise financière, que le FMI a été d’ailleurs incapable de voir venir, ce sont maintenant des pays européens qu’on force à solliciter des plans d’austérité tout aussi draconiens que les précédents. Hongrie, Ukraine, Lettonie, Irlande, Grèce, Portugal sont les plus récentes victimes de programmes d’une rare violence sociale. Avec Christine Lagarde, au moins, il n’y aura plus la moindre ambiguïté : cette avocate d’affaires est ultralibérale et ne s’en cache pas. Mais n’allons pas croire que son concurrent au poste de directeur général, le Mexicain Agustín Carstens, aurait été un meilleur choix. Celui qui se veut le représentant des pays émergents est avant tout un économiste issu de l’école de Chicago, tout aussi néolibéral que Christine Lagarde. C’est pourquoi une candidature alternative est nécessaire pour porter l’idée d’une réforme radicale du FMI, qui doit cesser de privilégier la défense des créanciers et des banques et retourner dans le giron de l’ONU, avec comme règle essentielle “un pays = une voix”. C’est à cette condition que le FMI pourra peut-être trouver la crédibilité qu’il n’a pas aujourd’hui aux yeux des peuples. Attac France, Paris, le 29 juin 2011 Certains droits réservés par International Monetary Fund
Les têtes changent, le FMI ne change pas
mercredi 29 juin 2011