Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont écrit le 6 juin à MM. Van Rompuy et Barroso pour leur demander d’accélérer le rythme en matière de régulation financière européenne. Dans ce qui ressemble à un lapsus, ils déclarent vouloir « empêcher la spéculation de menacer les efforts d’ajustement requis par la crise économique et financière ». Ce vibrant plaidoyer commun pour l’austérité se double d’une omission de taille : la lettre des deux dirigeants ne dit pas un mot de la taxation des transactions financières, mesure réclamée par la société civile en Europe et dans le monde pour désarmer la spéculation et financer les urgences sociales et écologiques. Sous la pression de l’opposition et de la société civile d’Allemagne, Mme Merkel a pourtant déclaré à plusieurs reprises ces dernières semaines souhaiter que l’Union européenne la propose au G20 et, à défaut d’accord mondial, la mette en oeuvre dans l’UE, voire dans la zone euro. La Ministre de l’économie et des finances Christine Lagarde se serait abstenue de lui apporter le moindre soutien lors de la réunion de l’ECOFIN qui s’est tenue mardi 8 juin à Luxembourg. Quelle position portera la France lors du Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne le 17 juin prochain ? Pourquoi Nicolas Sarkozy ne soutient-il pas la proposition faite par Angela Merkel ? Les autres propositions avancées dans le courrier commun du 8 juin demeurent bien timides. Outre une recommandation tardive mais néanmoins bienvenue pour organiser les marchés de produits dérivés, aujourd’hui totalement opaques, France et Allemagne demandent que la Commission et le Conseil « traitent le sujet des ventes à découvert déstabilisatrices ». Un modeste pas en avant, puisque Mme Lagarde avait critiqué une mesure d’interdiction de cette pratique ultra-spéculative, mesure prise par l’Allemagne le 16 mai dernier. Mais les deux pays n’ont aucune demande concernant l’achat des CDS (Credit Default Swaps) sur la dette souveraine, alors que c’est la spéculation sur les CDS de sa dette qui a déstabilisé la Grèce. Or tant que les CDS ne seront pas réservés aux détenteurs de titres de la dette du pays concerné, les fonds spéculatifs pourront continuer d’assurer la maison des voisins afin d’y mettre le feu et empocher la prime. Il faudra bien un jour, sous la pression sociale, que les pouvoirs publics nationaux et européens s’attaquent sérieusement au pouvoir de la finance et acceptent la mise en oeuvre de mesures fortes, telles que des mécanismes de taxations des transactions financières, qui fassent peser le poids de l’ajustement sur les fauteurs de la crise et épargnent les populations. Attac France, Montreuil, le 11 juin 2010