Cette semaine, les États ont poursuivi les négociations sur le contenu détaillé du traité. L’Union européenne (UE), qui avait multiplié les stratégies d’obstruction ces dernières années, ne conteste plus la légitimité du processus. Elle a toutefois utilisé l’absence de mandat de négociation comme prétexte pour rester muette sur le fond. Or il y a urgence, comme l’expriment les 660 000 signataires européens de la pétition “Des droits pour les peuples, des règles pour les multinationales” [2]. La France, l’Espagne et la Belgique ont rompu avec l’immobilisme de l’UE en prenant la parole à quelques reprises pendant les discussions article par article. Les interventions des Etats en faveur du Traité sont d’autant plus importantes que nombre de pays demeurent des opposants fermes.
Quoi qu’il en soit la version actuelle du traité reste très insuffisante face aux enjeux : réguler les multinationales, prévenir les violations tout au long de leur chaîne de valeur et garantir l’accès à la justice des personnes affectées. Des amendements de fond doivent être poussés et il est essentiel que les Etats se saisissent en ce sens des recommandations de la société civile et s’appuient sur leur expertise et la voix des communautés affectées [3].
Ainsi, pour Juliette Renaud des Amis de la Terre France, « Ce projet de traité se centre sur les seules obligations des Etats, et nous dépendrons donc de leur volonté politique et de leur capacité pour le mettre en oeuvre au travers de lois nationales. Nous demandons au contraire que le traité impose des obligations directes pour les multinationales, pour que les juges puissent s’en saisir dès sa ratification ».
« Pour que les personnes et communautés affectées obtiennent réparation, celles-ci doivent pouvoir accéder à la justice également dans les pays d’origine des multinationales. Le traité doit aussi contenir des mécanismes de recours au niveau international, par exemple au travers d’une Cour internationale à même de juger les multinationales », ajoute Chloé Stevenson d’ActionAid France.
Pour Swann Bommier, du CCFD-Terre Solidaire, « Il est indispensable que ce traité consacre la primauté des droits humains et de l’environnement sur les droits accordés aux investisseurs et aux multinationales dans les traités de commerce et d’investissement. Il est temps que soient abolis les tribunaux d’arbitrage ».
« En tant que syndicalistes, nous constatons que les pays qui cherchent à affaiblir le traité sont ceux qui répriment les manifestations dans la violence et emprisonnent les opposant-es. La Chine, la Russie et le Brésil se sont particulièrement illustrés sur ces points. » déclare Stéphane Enjalran pour Solidaires.
La Coalition française pour le traité ONU appelle la France à renforcer son engagement, et à agir pour que les Etats européens prennent leurs responsabilités, individuellement et collectivement, en prenant une part active dans les négociations qui vont se poursuivre en 2020.