L’Accord économique et commercial global (dit CETA du fait de son acronyme anglais – Comprehensive Economic Trade Agreement) pourrait exposer les États membres de l’UE à des plaintes coûteuses de la part d’investisseurs nord-américains contestant des mesures d’intérêt général.
Une fois approuvé et ratifié, le CETA autoriserait les investisseurs canadiens, et leurs homologues américains disposant de filiales au Canada, à poursuivre les États membres de l’UE et l’UE elle-même pour toute législation affectant négativement leurs bénéfices. Le CETA ne comprend en revanche aucune obligation pour ces investisseurs.
Les accords de libre-échange existants tels que l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain) montrent que la majorité de telles poursuites incrimine des lois et réglementations protégeant la santé publique, l’environnement et le droit du travail, et permet aux intérêts lucratifs particuliers de supplanter l’intérêt général. Comme le souligne le rapport, le chapitre investissement du CETA conduirait à l’explosion des plaintes d’investisseurs contre des États. Ces plaintes sont tranchées dans des cours d’arbitrage sises hors des juridictions nationales ou européennes. Ce système de justice parallèle rend les procédures extrêmement coûteuses, opaques et partiales ; il alourdit par ailleurs les dépenses publiques et met la décision démocratique en péril.
Lora Verheecke, chercheuse et chargée de campagne chez CEO, observatoire des lobbies à Bruxelles, coordinatrice du rapport, souligne : « Ce nouveau rapport passe en revue les promesses de la Commission européenne censées rassurer les citoyens sur l’innocuité du chapitre investissement du CETA. Mais en dépit des changements apportés aux dispositions du précédent chapitre, le CETA ne démontre toujours pas qu’il protégera les États membres et l’UE d’une pluie de plaintes de la part d’investisseurs estimant leurs espoirs de profits frustrés ».
Amélie Canonne, présidente de l’AITEC, complète : « Le système juridictionnel sur l’investissement ne présente aucune évolution significative qui permettra aux États de retrouver leurs capacités à légiférer et réglementer sans crainte d’être poursuivis. Les plaintes liées aux secteurs pétrole-gaz/mines/électricité sont de plus en plus nombreuses, et représentent déjà un tiers du total des poursuites. Cela signifie que les entreprises canadiennes qui sont leaders de l’extraction énergétique et minière dans le monde ne se priveront pas d’attaquer des politiques conçues pour lutter contre le changement climatique. »
Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France, conclut : « Au nom de la protection de leurs investissements, les multinationales américaines et européennes pourront bien davantage imposer leurs desideratas aux citoyens : moins de normes environnementales, sanitaires et sociales pour plus de profits financiers. Cet énorme risque, qui a été mis en évidence dans le TAFTA, est bien présent dans le CETA. Voilà pourquoi, tout comme le TAFTA, il faut repousser le CETA. »
En dépit des mobilisations massives de l’opinion publique contre le traité, et notamment son chapitre investissement, les gouvernements de l’Union européenne et du Canada prévoient la signature de l’accord avant la fin de cette année. Des marches et des actions exigeant de renoncer au CETA sont organisées dans toute l’Europe dans le cadre de l’Automne d’action. En France et notamment à Paris, une initiative portée le Collectif Stop TAFTA/CETA aura lieu le samedi 15 octobre.