À Belém, la présidence de la COP30 met en avant un “Global Mutirão”, en référence à un mot autochtone tupi-guarani évoquant l’idée d’un effort collectif, censé accélérer l’Accord de Paris. Mais derrière le discours de mobilisation collective, les textes adoptés ne permettent en rien d’atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet pour limiter le réchauffement à 1.5°C, selon l’objectif fixé en 2015.
- Alors que la transition juste et la défense des droits sont fièrement affichées par les négociateurs, aucun financement public massif n’a été décidé, et on repousse toujours plus loin les promesses d’engagement : l’an passé, la promesse des pays les plus riches à verser 300 milliards de dollars par an aux plus pauvres apparaissait déjà très loin des besoins estimés à 1300 milliards par an ; cette année, même la demande modeste des négociateurs des États africains d’un financement de 120 milliards par an a été refusée.
- Le recours aux financements privés et au prêts qui ne peuvent qu’aggraver la dette des pays les plus pauvres demeure toujours une solution privilégiée par les États les plus riches, en particulier la France, dont 92% des financements climatiques bilatéraux de la France sont des prêts (chiffres de 2022).
- Il n’y a aucune remise en cause de l’extractivisme, du pouvoir des multinationales ou de la financiarisation du vivant.
- Alors que le sommet se déroulait aux portes de l’Amazonie, aucune mesure ferme n’a été prise pour lutter contre la déforestation.
Transition juste et sortie des fossiles : une occasion manquée, une nouvelle fois
Malgré un langage séduisant, la transition juste proposée reste strictement encastrée dans l’ordre néolibéral. Aucune contrainte pour les gouvernements ou les entreprises, aucune reconnaissance de la dette comme obstacle structurel, aucune mention de la dette climatique des pays du Nord. Le « Plan d’action genre », une feuille de route destinée à guider les politiques climatiques en y intégrant les questions de genre, a fait l’objet d’une bataille acharnée : l’Iran, l’Arabie saoudite et la Russie ont porté des attaques contre le texte, en tentant d’y intégrer une re-définition du genre envisagé sous le seul angle biologique. Cette menace pourrait se concrétiser lors de la prochaine COP en Turquie.
Le texte reprend par ailleurs le langage de l’OMC en appelant à maintenir un “système économique international ouvert”, au mépris des impacts climatiques du libre-échange, malgré un très vague « dialogue » à mener à l’avenir sur le commerce international et sa compatibilité avec l’action climatique. Les multinationales sont présentées comme “acteurs clés”, alors qu’elles sont responsables de l’essentiel de l’extractivisme et des émissions de gaz à effet de serre. La participation des organisations sociales reste elle encore purement consultative et symbolique.
Enfin, plus de 80 pays avaient porté une feuille de route pour sortir du pétrole, du gaz et du charbon. Présente dans un premier brouillon, elle a été supprimée dans la dernière version du texte, sous la pression des pétro-États et l’inaction de l’UE et de la France. Pas étonnant pour une COP où le nombre de lobbyistes des énergies fossiles n’a jamais été aussi important, y compris dans la délégation française qui en accueillait 22, dont 5 de TotalEnergies.
Sans financements publics et sans sortie planifiée des fossiles, la COP30 ne peut être une COP de “mise en œuvre”. Au final, 24 pays, emmenés par la Colombie ont souhaité poursuivre cette dynamique de sortie des fossiles et organiseront un sommet en 2026 sur le sujet ; dans la liste des 24 pays, on ne trouve pas la France.
D’autres solutions sont possibles !
Face à un capitalisme qui détruit le vivant, nous continuerons à agir et nous mobiliser lors des COPs et en dehors pour :
- désigner les responsables : riches, multinationales, banques, fonds spéculatifs.
- attaquer les règles du jeu : accords de libre-échange, dérégulation financière, évasion fiscale, dette des pays du Sud, responsabilité des multinationales.
- revendiquer des ruptures pour financer la bifurcation et sortir des énergies fossiles : annulation des dettes illégitimes, lutte contre les paradis fiscaux, démantèlement des subventions aux énergies fossiles, taxation massive des superprofits et des transactions financières.
- soutenir les luttes locales et globales qui construisent, dans les territoires, d’autres manières de produire, d’échanger et de décider. Entre autres en exigeant de vrais outils internationaux de protection des défenseureuses des droits environnementaux et sociaux mais aussi de contrôle citoyen des politiques environnementales.
Comme le propose la déclaration du Sommet des peuples, il est temps de reprendre le contrôle sur l’économie, la finance et nos vies pour sortir d’un système qui transforme le climat en variable de profits, et notre bien être en un dommage collatéral.

