D’aucuns diront que l’absence de majorité à l’Assemblée nationale ne pouvait que conduire le gouvernement à utiliser le 49-3. Attac ne partage pas cette analyse. Certes, aucun des blocs n’a la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Mais il n’en demeure pas moins que le « nouveau front populaire » est depuis les élections législatives le bloc le plus important et que le projet de loi de finances 2025 n’a tenu aucunement compte de ses propositions.
Le gouvernement Bayrou a donc refusé d’assumer des compromis qui auraient pu constituer des « petits pas » intéressants et a choisi d’imposer un projet de budget qui s’inscrit dans une orientation politique qui n’a pas été validée par les urnes. Ce texte est donc entaché d’illégitimité tant sur le fond que sur la manière dont il a été imposé. Tout ceci ne peut qu’aggraver la crise politique, ce qui contribue à renforcer l’extrême droite, et alors que le RN profite de la période pour consolider sa stratégie de normalisation.
L’association Attac s’est exprimée à plusieurs reprises sur le budget. Elle rappelle que les mesures symboliques de ce budget en matière de recettes relèvent de la cosmétique, car elles ne procèdent à aucun rééquiibrage du système fiscal et qu’elles sont même en recul par rapport au budget Barnier - dont la majorité de la population considérait qu’il était injuste socialement - qui a été censuré. A titre d’exemple, la contribution des 450 plus grandes entreprises ne sera appliquée qu’un an, au lieu de deux dans le projet « Barnier ».
Le gouvernement Bayrou a donc su reculer face à quelques grands patrons dont Bernard Arnault mais a ignoré voire méprisé la demande profonde de davantage de justice fiscale d’une très large partie de la population. Selon un récent sondage en effet, 78% des personnes souhaitent une taxation plus importante des personnes les plus fortunées, 59% sont pour une taxation des héritages les plus élevés, 84 % sont favorables à une taxation des superprofits et 71 % souhaitent que l’imposition sur les dividendes soit revue à la hausse [1]
Le budget Bayrou va à contresens de ces légitimes demandes alors que leur mise en œuvre permettrait de dégager davantage de recettes publiques (indispensables pour faire face aux enjeux climatiques, sociaux et économiques de la période), de réduire les inégalités et de renforcer le consentement à l’impôt, pilier de toute démocratie digne de ce nom. Faute de changement de stratégie ou de nouvelles élections législatives, l’obsession des néolibéraux et des conservateurs d’imposer l’austérité se met, hélas, en place. Les gouvernements se suivent et se ressemblent donc, dans leur orientation et leur stratégie. Ils portent tous une lourde responsabilité dans l’aggravation de la crise politique.
Pour toutes ces raisons, Attac censure le budget du gouvernement Bayrou. Notre association continuera plus que jamais à défendre une réelle justice fiscale, sociale et écologique. Face à l’échec des politiques néolibérales et à la montée des thèses libertariennes et d’extrême droite, c’est la seule alternative juste et permettant de faire vivre une réelle démocratie.