Emmanuel Macron aura fait beaucoup d’efforts pour satisfaire Le Rassemblement National (RN) en nommant Michel Barnier comme Premier Ministre, avec l’aval de Marine Le Pen. Et Michel Barnier a fait beaucoup, depuis sa nomination, pour plaire au RN : nomination de ministres très très à droite, projets de loi (immigration, fonction publique…) très très réactionnaires, amendements au projet de loi de finances… Mais cela n’aura pas suffi. Après avoir dégainé son premier 49-3, Michel Barnier est donc censuré, il aura dirigé le gouvernement le plus court de la Ve République : retour à la case départ.
On ne peut que se satisfaire de la censure d’un gouvernement qui aura voulu imposer un plan d’austérité budgétaire extravagant et des mesures aussi graves que la réforme de l’aide médicale d’État ou les trois jours de carence pour les fonctionnaires. Mais rien n’est réglé. Le RN a été largement encouragé dans sa campagne de dédiabolisation, le gouvernement en ayant fait un interlocuteur régulier depuis sa nomination jusqu’à cette motion de censure. L’ogre d’extrême droite n’est jamais repu : plus on lui donne, plus il en veut.
Cette instabilité gouvernementale n’est pas passagère, elle résulte de la perte de la capacité du pouvoir à susciter suffisamment d’adhésion, comme à répondre aux besoins réels et aux demandes de la population. La chute du gouvernement apparait donc comme le résultat différé des élections de 2024 et du choix de gouverner avec les perdants des législatives. Mais un gouvernement en crise ne fait pas une alternative.
Pour qu’un gouvernement redevienne légitime, il devrait d’abord satisfaire les revendications qui s’expriment dans le pays : défense des salarié·es face aux menaces de licenciements, arrêt de la casse du statut des fonctionnaires et développement des services publics, revalorisation des salaires et abrogation de la réforme des retraites, bifurcation écologique et lutte contre les inégalités, arrêt des accords de libre-échange, garantie de revenu pour les paysan·nes…
La décision la plus légitime est d’en revenir aux résultats des élections législatives. C’est sur la base du programme du Nouveau Front Populaire (NFP) qu’une majorité de député·es a été élue à l’Assemblée nationale. La mise en application de ce programme, qui vise à répondre aux urgences sociales et écologiques, est la seule porte de sortie par le haut dans cette crise politique et institutionnelle. Un·e représentante du NFP doit être nommé·e à Matignon pour former un nouveau gouvernement, c’est la seule voie démocratique légitime.
Au-delà des choix institutionnels qui seront faits, un réel changement politique nécessite bien autre chose qu’un gouvernement légitime de gauche. La campagne pour la justice fiscale d’Attac a mené le combat dans le camp du mouvement social sur un sujet crucial dans cette séquence. Les mobilisations collectives, les propositions concrètes d’un autre monde possible, peuvent s’articuler aux résistances contre l’extrême-droite et ses alliés pour inventer d’autres horizons, pour la justice sociale et la bifurcation écologique. C’est ce à quoi s’emploiera Attac dans les mois à venir.