Non seulement l’Irlande est le pays de l’Union européenne ayant le plus faible taux d’imposition sur les sociétés (12,5 %, contre 25 % en France) mais pour attirer les entreprises multinationales, l’Irlande n’hésite pas à proposer des avantages fiscaux supplémentaires. C’est ainsi que la filiale irlandaise d’Apple avait réglé un taux d’imposition effectif dérisoire sur ses bénéfices européens « allant de 1% en 2003 à 0,005% en 2014 », selon Bruxelles.
Ce traitement fiscal favorable entre 2003 et 2014 permettait donc à Apple de quasiment échapper à l’impôt, dans le pays où la marque à la pomme avait rapatrié l’ensemble de ses revenus engrangés en Europe, mais aussi en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde. En 2016, la Commission avait donc ordonné à Apple de rembourser 13 milliards d’euros à l’Irlande, considérant que ces aides remettaient en cause le sacro-saint principe de la concurrence libre et non faussée puisque toutes les entreprises n’avaient pas bénéficié des mêmes avantages.
Au cours de la campagne #ApplePayeTesImpôts qui a débuté en novembre 2017 lors de la sortie de l’iPhone X, Attac avait mené des dizaines d’actions en France et en Europe, en faisant du paiement de cette amende une de ses revendications. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de voir enfin, 7 ans plus tard, cette revendication aboutir.
Néanmoins, cet objectif était pensé comme un premier objectif atteignable, mais nous avons bien conscience que le paiement de cette amende ne règle pas le problème de fond : il reste primordial d’obliger les multinationales comme Apple à payer leur juste part d’impôts là où elles réalisent leurs activités plutôt que de les laisser déclarer artificiellement leurs profits dans des paradis fiscaux comme l’Irlande.
C’est pourquoi Attac revendique, avec de nombreux experts de la fiscalité, la mise en place d’une taxation unitaire pour mettre fin à l’évasion fiscale des multinationales. Cela consiste à taxer le bénéfice global des entreprises multinationales, en considérant celles-ci comme une entité unique, puis dans une seconde étape, à répartir ce bénéfice dans les pays où ces entreprises réalisent effectivement leur activité. La taxation unitaire pourrait être mise en œuvre dès à présent en France à condition d’une réelle volonté politique.
Rappelons qu’au cours de la campagne menée pour qu’Apple paye sa juste part d’impôts, Attac s’était vue assigner en référé par la marque à la pomme, qui demandait à la justice française d’interdire aux militant·e·s de pénétrer dans les Apple Store. Ce procès avait été perdu par Apple, le tribunal reconnaissant qu’Attac agissait dans le cadre d’une campagne d’intérêt général sur le paiement des impôts et l’évasion fiscale.
Apple n’hésite pas à intimider les organisations du mouvement social qui tentent de mettre en lumière ses pratiques. Dans le même temps elle a dépensé des sommes colossales pour ne pas payer ces 13 milliards. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de la voir aujourd’hui définitivement obligée de rembourser ces aides, et cette victoire nous encourage à poursuivre nos campagnes pour la justice fiscale.