Lobby Tour à la Défense, évadez-vous !

vendredi 28 avril 2017, par Attac Play

Début avril, à l’occasion de la semaine d’action contre l’évasion fiscale, les membres de la Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires ont organisé un « Lobby tour » dans le quartier de La Défense pour emmener citoyen.ne.s et journalistes à la découverte des acteurs qui contribuent à l’évasion fiscale.

Vous avez raté l’événement ? Revivez la visite !

Photos du lobby tour disponibles ici !

Top départ de la Société générale

Cours Valmy
La Société générale a créé, via Mossack Fonseca, pas moins de 979 sociétés offshore entre 1977 et 2015 [1], score qui la situe dans le top 5 des banques utilisant le plus les services du cabinet panaméen. Une enquête préliminaire pour blanchiment a été ouverte en France par le Parquet national financier. En effet, si permettre l’ouverture d’une société offshore, c’est-à-dire d’une société dans un pays qui n’est pas celui de votre résidence fiscale, n’est pas un problème en soi, cela peut permettre de dissimuler de l’argent non seulement au fisc, mais aussi aux contrôles judiciaires de toute sorte.

« Société générale, la banque qui vous aide à déposer votre argent sous le soleil des Caraïbes. »

Ces révélations ont failli coûter cher au directeur général de la Société générale, Frédéric Oudéa, qui avait témoigné sous serment en 2012 devant le Sénat français que sa banque n’avait plus d’activité au Panama, ni dans un autre territoire non coopératif. Le bureau du Sénat a cependant renoncé à engager des poursuites pour faux témoignage.

Au-delà de l’affaire des Panama Papers, la présence de la Société générale dans des paradis fiscaux pose de nombreuses questions : en 2014, ses activités dans ces territoires rapportaient 4 fois plus de bénéfices que dans les autres pays, alors que ses salariés y sont 16 fois moins nombreux [2].

Petite pause chez McDo

Centre commercial des 4 Temps
Grâce à un rapport d’une coalition de syndicats judicieusement intitulé « Unhappy Meal » [3], le grand public a pu avoir connaissance, en février 201 5 de l’existence de la très productive filiale luxembourgeoise de McDonald’s : McDonald’s Europe Franchising SARL. Avec à peine 15 salariés, cette filiale serait parvenue à dégager 284,3 millions d’euros en 2013, taxés à 1,46 % [4]. Au coeur de cette productivité extraordinaire, un schéma bien classique d’ « optimisation fiscale agressive » qui aurait coûté au fisc français plusieurs centaines de millions d’euros d’impôts.

« Au menu de McDo, on ne trouve pas que des frites et des hamburgers, mais aussi de savants montages luxembourgeois. »

La filiale luxembourgeoise abrite en effet la marque McDonald’s. Tous les McDonald’s d’Europe payent cette filiale (à hauteur de 10 à 20 % de leur chiffre d’affaires) pour utiliser la marque. C’est donc une partie importante des revenus des McDonald d’Europe qui arrivent au Luxembourg, où ils sont très peu imposés, grâce au régime fiscal avantageux mis en place par ce pays pour les revenus tirés des marques. Suite à ces révélations, la Commission européenne a ouvert une enquête pour vérifier si ces pratiques sont conformes au droit communautaire.

Halte chez PricewaterhouseCoopers

PB5 Passage Franklin

PwC fait partie, avec Ernst and Young, Deloitte et KPMG des Big 4, c’est-à-dire du club des quatre plus gros cabinets de conseil et d’audit au monde, exerçant à la fois des activités de conseil en « optimisation fiscale » et de vérification des comptes pour les multinationales.
PwC a vu ses pratiques douteuses révélées au monde entier avec l’affaire du Luxleaks, qui a éclaté en novembre 2014. PwC est en effet l’intermédiaire qui a négocié avec l’administration luxembourgeoise pour le compte de plusieurs centaines d’entreprises multinationales les très avantageux « rulings » qui ont été rendus publics par le Consortium international des journalistes d’investigation.

« PricewaterhouseCoopers joue en eaux (très) troubles mais les poursuites judiciaires se tournent vers les lanceurs d’alerte. »

Ancien employeur des deux lanceurs d’alerte à l’origine de la fuite, Antoine Deltour et Raphaël Halet, PwC a porté plainte pour vol et est donc à l’origine des poursuites engagées à leur encontre. La firme a usé de tous les moyens à sa disposition pour obtenir l’autorisation d’interroger Raphaël Halet et de perquisitionner son domicile, le soumettant ainsi à d’importantes pressions [5]. Margaret Hodge, parlementaire britannique à la tête du comité des comptes publics, a accusé en 2015 PwC d’encourager « l’évasion fiscale à une échelle industrielle » [6].

L’étape EDF

20 Place de la Défense
Une firme dont l’État français détient 84% ne devrait-elle pas montrer l’exemple en matière de paiement de ses impôts ? EDF a pourtant été mise en cause à plusieurs reprises pour ses pratiques fiscales douteuses, comme l’implantation de filiales spécialisées dans l’assurance en Irlande, au Luxembourg et aux Bermudes. Une autre filiale aux Pays-Bas lui permet de ne pas payer d’impôts sur ses bénéfices réalisés en Pologne. EDF a aussi créé en 2008 une banque de financement interne en Belgique pour bénéficier de l’avantage fiscal des « intérêts notionnels ». Bilan ? Un manque-à-gagner pour le fisc français se chiffrant en centaines de millions d’euros.

« Quand une entreprise publique fait de l’optimisation fiscale aux dépens de son principal actionnaire : l’État. »

Le cas d’EDF n’est pas isolé, puisque d’autres grands groupes dont l’État est un actionnaire majeur, comme Aéroports de Paris, Orange, Engie ou encore Renault ont eux aussi été pris en flagrant délit d’optimisation fiscale. Le ministre de l’Économie Michel Sapin s’en est ému publiquement suite aux révélations de la presse sur EDF, mais il n’y a jamais eu de suites [7].

Passage par Starbucks

90-102 Esplanade du Général de Gaulle

Starbucks est l’une des premières multinationales à s’être retrouvée au coeur d’une controverse de grande ampleur en 2012 suite à une enquête de l’agence Reuters [8] qui a montré comment, en transférant une partie de ses profits aux Pays-Bas et en Suisse, la filiale britannique de Starbucks n’avait pas payé d’impôt sur les sociétés depuis 3 ans.

« La chaîne qui vous offre un café garanti 100% sans contribution fiscale. »

Même montage, mêmes effets : selon BFM business [9], en France non plus, l’entreprise n’aurait pas payé d’impôt sur les sociétés depuis son installation. C’est au Royaume-Uni que les révélations ont fait le plus de bruit : le mouvement britannique Uncut a lancé une importante opération de boycott qui a contraint l’entreprise à sortir du silence, et à annoncer notamment qu’elle allait désormais « payer l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni ». Déclaration qui a étonné le responsable de la politique fiscale de KPMG au Royaume-Uni, qui a déclaré : « C’est la première fois que je vois l’opinion publique faire changer d’avis une compagnie influente et puissante comme Starbucks. [10] »
Ces annonces n’ont pas suffi à convaincre la Commission européenne, qui a ouvert une enquête en 2014 sur les pratiques fiscales de Starbucks, et conclu un an plus tard au caractère illégal de certains avantages octroyés par les Pays-Bas à l’entreprise, en enjoignant ce pays à récupérer le manque à gagner (estimé entre 20 et 30 millions d’euros). Mais les Pays-Bas ont fait appel…

L’escale BNP Paribas

3 Place de la Défense

BNP Paribas est la plus importante banque française. C’est aussi celle qui réalise le plus de bénéfices dans les paradis fiscaux : 2,432 milliards d’euros en 2014, soit 35,3 % de ses bénéfices internationaux [11].

« BNP Paribas quitte les Caïmans mais pas ses pratiques d’évasion fiscale. »

C’est sa présence aux îles Caïmans, paradis fiscal notoire, où la banque enregistrait en 2014 un bénéfice de 4 millions d’euros sans salarié qui a valu à la banque d’être prise pour cible par les Faucheurs de chaises, collectif d’associations militantes regroupant Attac France, Solidaires Finances Publiques, Bizi !, ANV-Cop 21 et les Amis de la Terre à l’automne 2015. Tant et si bien que la banque a annoncé, en juin 2016, son retrait des îles Caïmans [12] : un petit pas si l’on considère les 17 paradis fiscaux dans lesquels la BNP est toujours présente en 2014 [13], mais qui montre que la pression citoyenne permet d’obtenir des résultats.

Le procès, intentés par la BNP au faucheur de chaise Jon Palais en janvier 2017, qui s’est soldé par la relaxe de ce dernier, a légitimé l’action des militants face aux pratiques de la banque. Rappelons également que les Panama Papers ont révélé que la banque avait sollicité le cabinet Mossack Fonseca pour la création de quelques 400 sociétés offshore dans des paradis fiscaux [14] et qu’en Argentine, 5 dirigeants de la banque ont été mis en examen à la fin 2016, accusés d’avoir fait sortir illégalement un milliard de dollars du pays entre 2001 et 2008 [15].

La dernière ligne droite : Total

2 place Jean Millier

Les entreprises pétrolières et minières comme Total exploitent depuis des décennies les ressources naturelles des pays du Sud, mais les profits qu’elles génèrent ne profitent guère aux populations concernées. Au contraire, ils contribuent souvent à entretenir des régimes corrompus et peu démocratiques.
Pour y remédier, une directive européenne impose désormais à ces multinationales du secteur extractif la transparence sur les sommes qu’elles versent aux gouvernements et chefs d’État.

« La première entreprise française a des pratiques fiscales aussi opaques que le pétrole qu’elle exploite. »

Total, présente dans des pays aux régimes autoritaires, notamment en Afrique, s’est opposé à l’adoption de cette directive au niveau européen puis à sa transposition en France, en arguant du fait que cela nuirait à ses intérêts commerciaux et à ses négociations avec les pays. Au final, le projet a bien été adopté, mais avec des sanctions ridicules [16].

En réponse aux critiques, Total a voulu jouer la transparence en rendant publique une liste de toutes ses filiales partout dans le monde. Une liste en réalité incomplète, mais qui montre néanmoins que Total est implantée dans des paradis fiscaux notoires, comme les Bermudes, mais aussi d’autres moins identifiés comme tels comme les Pays-Bas [17]. La firme est aussi une habituée des procédures en arbitrage international privé contre les gouvernements qui cherchent à augmenter ses impôts [18].

Dans le même temps, Total a continué pendant de nombreuses années à ne pas payer d’impôts en France, en prétextant des « pertes » sur son activité dans le pays. De quoi se demander par où passent les milliards de dollars de bénéfices générés chaque année par Total et généreusement distribués à ses actionnaires.

Le final : Engie

Place Samuel de Champlain

Anciennement GDF-Suez, Engie fait partie de ces fleurons qui distinguent la France en matière d’énergie... mais aussi d’inventivité fiscale. Elle est détenue à 33% par l’État français mais ce caractère semi public ne garantit pas son exemplarité.

La Commission européenne a en effet ouvert, en septembre 2016 une enquête approfondie sur certains arrangements fiscaux, validés par le Luxembourg, qui auraient permis à l’entreprise de réduire de manière significative ses impôts [19]. Un montage en particulier intéresse la Commission : les prêts accordés par les filiales luxembourgeoises, présentés comme des investissements au Luxembourg pour bénéficier d’un régime spécial sur les dividendes et comme des véritables prêts dans les autres pays, de manière à pouvoir déduire les intérêts des bénéfices engrangés.

« Engie reçoit des factures d’impôts de l’État français bien plus faibles que les vôtres. »

Le journal en ligne lesjours.fr a poursuivi l’enquête, et mis en lumière le rôle d’Engie II, une filiale qui aurait permis une remontée spectaculaire de bénéfices au Luxembourg [20] : entre 2011 et 2014, ce seraient environ 2 milliards d’euros qui y auraient ainsi été transférés pour bénéficier de la fiscalité avantageuse du Grand-duché. Le gouvernement français, qui a longtemps répété que l’optimisation fiscale agressive était l’apanage des grands groupes américains, ne s’est pas beaucoup exprimé sur ce dossier.

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