Peut-on parler sérieusement des banques dans la rue ?

vendredi 12 avril 2013, par Attac France

« Oui, il y avait du monde ce soir à notre débat public, c’est sûr. Mais quand même, un peu toujours les mêmes... on ne touche que les convaincu-e-s ! » N’a-t-on pas toutes et tous, à un moment donné, au cœur d’une campagne de mobilisation, après avoir fourni pas mal d’efforts, émis ce jugement teinté de déception ?

On aimerait voir d’autres personnes, d’autres catégories socio-professionnelles ; on aimerait que nos discours, nos analyses, nos propositions touchent plus de monde ; on aimerait... et si on cherchait à s’en donner les moyens ? Si, par exemple, on inversait le processus : ce n’est plus « notre » public qui vient à nous dans un événement que nous organisons mais c’est nous qui créons notre public en allant vers lui ?

Le projet de loi de réforme bancaire, par exemple, nous sommes bien évidemment les premiers à dénoncer sa vacuité. Comment le dire ? Comment amener nos propositions dans l’espace public ?

Flamenco à Aix-en-Provence

« Mieux vaut une courte saynète qu’un long discours » ? On souhaite une séparation nette entre les activités des banques et ce n’est pas inscrit à la hauteur de nos exigences dans le projet de loi. C’est un sujet technique, complexe, difficile à rendre rapidement saisissable : cherchons alors à rendre visible cette exigence afin de la montrer.

Lors de la semaine de mobilisation face au Forum économique mondial de Davos, différentes actions de rue ont pu être menées afin de dénoncer les pratiques bancaires.

Les membres du comité d’Attac Pays d’Aix ont ainsi dansé une sévillane face à trois cibles : les paradis fiscaux, les agences de notation et la Troïka. À la fin de chaque couplet, la cible était renversée, puis remise debout et retournée avec nos dénonciations ou exigences. Au quatrième couplet de la danse, l’exigence forte d’Attac concernant la séparation des banques de dépôt et des banques d’investissement a été symbolisée, en même temps qu’une banderole réclamant une taxation des transactions financières était déployée.

Prendre du plaisir dans l’action. Cette danse a été appréciée : par les passant-e-s qui ont rapidement compris les revendications d’Attac face à la dérive bancaire et à l’ersatz de réforme proposée par le gouvernement ; par les participant-e-s à la saynète qui ont pris du plaisir à faire passer un message politique de cette manière ; par les journalistes de la presse locale qui ont ensuite assuré une bonne couverture médiatique pour populariser nos idées. Sans oublier, bien sûr, le petit verre de sangria servi aux participant-e-s et passant-e-s qui se sont arrêté-e-s !

Pour en savoir plus... Cette danse dans la rue était accompagnée d’une distribution de tracts pour déconstruire le discours dominant sur la dette et l’austérité, rappeler le rôle et la responsabilité des banques dans la crise et mettre en avant nos exigences. Le dépliant de présentation d’Attac, des bulletins d’adhésion et les rendez-vous locaux étaient également mis à la disposition des passant-e-s sur une table. Il y aura toujours peut-être des réticences face à cette forme de sensibilisation : « Doit-on maintenant faire les clowns dans la rue ? Doit-on arrêter les débats et les analyses de fond ? » On voit bien ci-dessus que non : la saynète réalisée à Aix-en-Provence était un moyen complémentaire pour porter un message ; les tracts et documents d’analyse « sérieux » sont distribués. Le sens de ces formes de mobilisation, c’est plutôt de donner à voir nos analyses pour donner envie d’en savoir plus.

Inauguration symbolique à Orléans

Une autre action pour interpeller public et élu-e-s au sujet de cette dite réforme bancaire a été menée à Orléans, où une place du centre de la ville, la place de la République, a été le lieu de l’inauguration d’une nouvelle statue : « la République défigurée par la finance ». Les militant-e-s du comité du Loiret, avec celles et ceux du CAC45, ont préparé une cérémonie à laquelle ont été invités, par courrier et par lettre ouverte dans la presse, les responsables des agences bancaires locales et les parlementaires du département qui avaient quelques jours plus tard à se prononcer sur ce projet de loi. Au terme du discours d’inauguration, le tissu qui recouvrait la statue a été retiré et chacun-e a alors pu observer la finance trônant au milieu de la place.

Bankbusters au Puy-en-Velay

Plusieurs comités d’Attac ont repris une action qui avait été jouée à plusieurs reprises dans le cadre de la campagne g8/g20 de 2011 ; ainsi au Puy-en-Velay (Haute-Loire) ou à Lons-le-Saunier (Jura) où des groupes d’une dizaine de personnes ont ciblé les banques comme étant les fauteurs de crise. Ces actions, menées pendant le marché du samedi matin, ne sont pas passées inaperçues : un très bon moyen pour « dénoncer l’impunité de la finance et des banques qui engrangent toujours d’énormes profits et n’ont jamais quitté les paradis fiscaux ; faire le lien entre le sauvetage de la finance par les États et les politiques d’austérité partout en Europe ; et mettre en avant nos propositions pour une véritable réforme du système bancaire », ainsi que le précise François, secrétaire d’Attac en Velay. Plusieurs vitrines des agences locales ont été désintoxiquées par les bankbusters qui reprenaient en chœur les paroles « François, Non, Non, rien n’a changé ! » sur l’air des Poppys. Action-amusement et discours militant sont là encore de la partie ; et les retours-presse se font l’écho de nos revendications.

Diversifier nos formes d’actions

Ces formes d’intervention dans la rue ne sont pas l’alpha et l’oméga de l’action militante d’Attac ; elles en sont juste une petite partie, celle permettant aussi de diffuser nos propositions.

Il ne s’agit pas ici de grosses actions spectaculaires et médiatiques, tel un accrochage de banderole au sommet de la pyramide du Louvre : il s’agit d’une diversification de nos modes d’intervention auprès du public. Les conférences-débats avec un-e invité-e de renom sont l’une de ces formes ; les projections-débats dans de petites salles municipales ou dans un café aussi ; de même que les tractages et tenues de stands sur les marchés...

Un article dans le numéro précédent de Lignes d’Attac (p.7), intitulé « Pour une mise en place de Form’Actions », faisait état de l’ébauche d’une réflexion sur le sujet afin que nous retrouvions le goût d’installer l’éducation populaire hors des salles de centre-ville.

Ces « Form’Actions » commencent à se mettre en place à un niveau régional, ainsi pour les comités d’Île-de-France, de Midi-Pyrénées et de Rhône-Alpes. Pour cette dernière région, les comités se sont adressés à la scop L’Orage, petite sœur de la scop Le Pavé de Franck Lepage (1), pour monter une formation de trois journées au printemps, appelée « Susciter la participation ». Il s’agira lors de cette formation de donner le temps aux militant-e-s de poser un regard critique sur leurs manières de porter les discours altermondialistes et de construire des interactions avec leurs publics. Les questions que ces formations soulèvent sont au cœur de la démarche citoyenne que nous portons : Quel est le sens de la participation et de l’engagement bénévole ? Quelles techniques de mobilisation utilisons-nous ? Quels sont les différents outils d’éducation populaire que nous pouvons convoquer pour porter nos messages ?


(1) Les coopératives d’éducation populaire :

Scop Le Pavé :  http://www.scoplepave.org
Coopérative du Vent debout (à Toulouse) : http://www.vent-debout.org
L’Engrenage (à Tours) : http://lengrenage.blogspot.com
L’Orage (à Grenoble) : http://www.scoplorage.org

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