Le rêve de césar le boxeur

En février 2011, sur l’île de Gorée, s’est réunie l’Assemblée Mondiale des Migrants composée d’une centaine de personnes, migrants ou réfugiés politiques, en majorité africains mais aussi latino-américains et asiatiques. Pendant trois jours ces migrants ont débattu et amendé le texte de la Charte Mondiale des Migrants avant de l’adopter pour le présenter au Forum social mondial de Dakar.

Certains d’entre eux étaient venus individuellement, d’autres avaient fait un long voyage en caravanes de bus parties de Rabat et de Bamako. César, réfugié centrafricain au Mali, était venu avec la caravane de Bamako. Je lui ai demandé, comme à d’autres, de me raconter son histoire.
Pour fuir l’effervescence qui régnait dans l’espace où s’était tenue l’assemblée, nous nous sommes installés dans le petit jardin public de l’île.
J’ai posé une seule question à César et à partir de celle-ci, il a dévidé pendant deux heures, de façon continue, le récit de son terrible voyage. Je ne l’ai interrompu que de rares fois pour lui poser des questions brèves relatives au temps, à la succession et à la durée des évènements.

Au fil de son récit, César visualisait et revivait les scènes qu’il racontait. Il les théâtralisait en donnant les répliques des différents protagonistes. L’intonation, les accents d’intensité suivis de temps de silence, les ruptures de rythme, les répétitions de mots ou de phrases traduisaient ses émotions et ses sentiments. Ses affects ne sont pas exprimés avec des mots, ce qui rend très difficile de les restituer à l’écrit si l’on s’est donné pour principe de transcrire fidèlement sa parole sans rien y ajouter. Pour moi qui ai entendu le récit oral de César, je me demande si la passion et l’intensité dramatique qui s’exprimaient à l’oral seront perceptibles pour le lecteur.

J’ai été bouleversée à l’écoute de ce récit car même si j’avais déjà eu connaissance par la presse d’une grande partie des faits et des évènements relatés, je les vivais « en direct ». Leur succession et leur accumulation étaient insoutenables.

J’ai ensuite éprouvé un sentiment de culpabilité d’avoir fait revivre à César tant de souffrances, et de douleur à l’évocation des morts laissés en chemin. De quel droit étais-je venue réveiller d’aussi terribles souvenirs dans ce lieu paisible et agréable ?

L’une des réponses est de faire connaître et de dénoncer les violences imposées aux migrants par la politique de fermeture des frontières des États membres de l’Union Européenne. Ceux-ci font pression sur les pays du pourtour de la Méditerranée pour qu’ils contiennent les migrants et les empêchent d’atteindre les frontières de l’Europe. De nombreux moyens sont mis en oeuvre pour atteindre cet objectif : formation et équipement des forces répressives : armée et police, installation de camps d’internement, surveillance des espaces maritimes par les bateaux de l’agence Frontex. L’octroi de l’aide au développement est soumis à la signature d’accords de réadmission des sans-papier arrêtés à l’intérieur des États.

L’Union Européenne qui se fait fort de sa réputation de défenseur des droits de l’homme ferme les yeux sur les exactions et graves manquements aux droits humains qui sont commis à l’encontre des migrants et ne se soucie pas de savoir s’ils sont traités conformément au respect de la dignité humaine et du droit international.

Les évènements les plus dramatiques que relate César : l’assaut des barrières de l’enclave de Melilla et la déportation dans le désert ont eu lieu à l’automne 2005.

Depuis cette date, la guerre aux migrants n’a cessé de s’intensifier.

Actuellement, au Maroc, les migrants ne sont plus déportés massivement dans le sud saharien mais abandonnés à la frontière est vers Oujda et renvoyés de part et d’autre de la frontière par les autorités marocaines et algériennes comme dans un jeu de ping-pong.
Des centaines de boat-people meurent en Méditerranée. La guerre civile et l’intervention de l’OTAN en Lybie ont provoqué la fuite de milliers de réfugiés. Le Haut Commissariat de l’ONU aux réfugiés a dénombré à la fin mai plus de1 5OO noyés depuis février 2011. Ces naufrages ont eu lieu alors que les bâtiments de l’OTAN, les navires de FRONTEX, les avions de la coalition surveillent étroitement la Méditerranée. Ils doivent donc en être témoins sans pour autant intervenir.

La réponse des États de l’Union Européenne à ces drames est encore de refuser d’accueillir ces réfugiés, alors que l’intervention de l’OTAN dans la guerre, est en partie responsable de leur fuite.

Quand, nous Européens, croirons-nous assez fort dans les valeurs que nous prétendons défendre pour les imposer à nos gouvernements ?

MARTINE BLANCHARD
Paris, le 16 septembre 2011

Le récit complet de « Le rêve de césar le boxeur » ainsi qu’une présentation de son association et une demande de soutien sont en fichiers joints.

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