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Crises du capitalisme et nouveau travail en miettes (Jean-Marie Harribey)
En 1956, le sociologue Georges Friedmann publiait un ouvrage devenu un classique : Le travail en miettes (rééd. Gallimard, Idées, 1964). On était en plein boom des Trente Glorieuses, période où le taylorisme était introduit sur les chaînes de production industrielle dans tous les pays capitalistes développés. « Les Temps modernes » de Charlie Chaplin (1936) avaient déjà immortalisé les méfaits du travail à la chaîne sur la condition ouvrière. C’était le prix à payer du développement économique, de la hausse de la productivité du travail et du pouvoir d’achat et de l’accès à la consommation de masse : ainsi, le capital pensait anesthésier le prolétariat et faire oublier la crise de 1929 et ses conséquences tragiques de la Seconde Guerre mondiale.
Dossier : Le travail en temps de crises
Le capitalisme est-il en crise ? (Gérard Duménil, Dominique Lévy)
Cet article tente d’apporter une réponse à l’ambitieuse question qui nous a été posée : le capitalisme est-il en crise ? En en prenant les termes au pied de la lettre, la réponse est négative : le capitalisme « traverse » des crises mais « n’est pas » en crise. La gravité de la situation mondiale en ce début du XXIe siècle se situe moins dans la menace d’une crise économique majeure, en dépit de la covid, ou dans la poursuite d’une crise jugée permanente, que dans l’approfondissement et l’inflexion de tendances historiques profondes tristement célèbres, dont le réchauffement climatique est la plus grave, mais prise dans le magma de relations de classes, de rivalités internationales politiques et économiques, de hausse des inégalités, d’exodes de populations fuyant pauvreté et oppression, de divorce des gouvernants vis-à-vis de leurs administrés, de mort des utopies et de montée des populismes. Tout tient à tout dans cette crise-là.
Note sur la situation économique mondiale (François Chesnais)
Début décembre 2021, à en croire les principaux médias, les chiffres de la croissance économique française étaient plutôt bons. Ainsi Pauline Forgue a expliqué dans son émission très suivie de France Télévisions : « Après une chute vertigineuse en 2020 qui correspond à l’arrivée du Covid-19 sur notre territoire, la remontée a été tout autant spectaculaire. Le PIB français devrait augmenter au cours de l’année 2022 avec une progression prévue de 6,8 %. L’économie française s’est rapidement remise à fonctionner grâce aux différentes mesures de l’État ».
Les politiques monétaires dans le capitalisme néolibéral (Michel Cabannes)
Sur le plan théorique, le néolibéralisme, dans sa variante ordo-libérale comme dans ses variantes anglo-saxonnes, inclut une approche orthodoxe de la macroéconomie privilégiant la stabilité, notamment sur le plan monétaire.
Dans la pratique cependant, il n’en va pas de même. Le capitalisme néolibéral qui prévaut depuis les quatre dernières décennies s’accompagne de politiques monétaires différentes suivant les périodes et suivant les pays, pas seulement pour des motifs conjoncturels. D’abord, les politiques d’austérité ont eu tendance à s’effacer en faveur des politiques accommodantes. En outre, les pays européens ont privilégié longtemps la stabilité monétaire, alors que les États-Unis appliquaient déjà des politiques monétaires actives axées sur la croissance, marquant la dissociation entre le néolibéralisme et l’austérité monétaire.
Du taylorisme mécanique au taylorisme numérique : de la subordination collective à la subordination personnalisée (Danièle Linhart)
Le numérique nous entraîne dans un tourbillon de changements porteurs de modifications profondes de notre rapport au monde, au réel, à la société. Il véhicule une accélération fantastique de la réalisation de certaines catégories d’actes qui reculent les contraintes et restrictions liées aux limites de notre cerveau, de nos capacités cognitives, et de nos capacités physiques. Nous en retirons le sentiment d’être renforcés, agrandis, de disposer de potentialités démultipliées, mais nous ne nous rendons pas compte à quel point nous sommes dépossédés de certains des éléments les plus essentiels de nos vies.
Rationalisé, numérisé : la fin du travail ? (Thomas Coutrot)
« Le travail c’est fini ! Alors que la productivité à l’heure travaillée explose en France, (+759,3 % en soixante-cinq ans !), experts et économistes sont formels : dans les années qui viennent, 40 % des professions d’aujourd’hui auront disparu. Des millions d’emplois vont être supprimés, en France et dans le monde. »
« L’angle éco », émission présentée par François Lenglet sur France 2 le 17 octobre 2016
Les luttes pour la réappropriation de l’outil numérique et le capitalisme de plate-forme (Patrick Cingolani)
Chaque jour les plates-formes gagnent toujours plus de terrain sur notre vie quotidienne. Il y a des plates-formes pour notre santé (Doctolib), pour l’enseignement et les conférences dans les universités ou les entreprises (Zoom), pour louer un appartement ou une maison de vacances (Airbnb), pour être en relation avec nos amis (Facebook, TikTok) pour acheter des livres ou des articles de consommation courante (Amazon), pour télécharger de la musique (Spotify) pour nous déplacer (Uber, Caocao), pour nous restaurer (Deliveroo), pour nous informer (Google), etc.
Télétravail au féminin : quels enjeux sur l’avenir du travail des femmes ? (Thérèse Villame)
Dans un précédent article on montrait comment le télétravail, face auquel les entreprises étaient initialement plutôt suspicieuses et frileuses, était devenu quasiment la norme depuis la pandémie du COVID-19, s’installant durablement avec ses avantages et inconvénients pour les salarié.es. Les entreprises y trouvant finalement leur intérêt (réduction des surfaces immobilières et des coûts de fonctionnement, tels que ménage, sécurité, énergies, etc., et en revanche une productivité accrue des salarié.es). Sans pour autant que cela ait amené à une réelle réflexion sur les modes de management à y associer, ni d’évolution majeure quant à la représentation des managers vis-à-vis du télétravail, beaucoup d’entre eux restant souvent suspicieux sur le terrain.
Les dislocations contemporaines du travail (Guillaume Tiffon)
Souffrance, stress, burn out, risques psychosociaux… quel que soit le vocable retenu, les témoignages de salariés faisant état d’une montée en puissance de la pénibilité mentale du travail se multiplient depuis le début des années 2000. Comment expliquer ce phénomène ? Serait-ce simplement dû au succès de ces catégories d’analyse, aujourd’hui de plus en plus utilisées pour parler de son travail ? À des difficultés personnelles, relevant de la sphère privée ? À un manque de formation des salariés, qui ne sauraient pas s’organiser dans leur travail, prioriser leurs tâches, ni gérer leur stress ? Ou faut-il plutôt y voir un lien avec l’accélération des flux informationnels et les nouvelles formes d’organisation du travail qui accompagnent la « révolution numérique » ? Auquel cas, de quelle nature est ce lien : comment se caractérisent ces nouveaux modes d’organisation ? En quoi accroissent-ils la pénibilité mentale du travail ? Et dans quelle mesure résultent-ils des transformations contemporaines du capitalisme ?
Le spectre de l’ubérisation (Alain Véronèse)
Pour paraphraser la célèbre phrase de Marx et Engels, on pourrait écrire qu’« un spectre hante le monde, le spectre de l’ubérisation ». D’emblée, l’avant-propos d’un Hors-série du Monde, « Les révolutions du travail », donne la couleur et tonalité politique. Cette publication est très critique sur les nouveaux agencements productifs du libéralisme. Avec un portait stylisé, encravaté, de Karl Marx en page 2.
À propos de Dépasser l’entreprise capitaliste dirigé par Daniel Bachet et Benoît Borrits (Jean-Marie Harribey)
Les Éditions du Croquant viennent de publier un livre dirigé par Daniel Bachet et Benoît Borrits et introduit par Bernard Friot, qui rapporte les travaux du séminaire de la Bourse du travail et des groupes parisiens du Réseau Salariat au sujet du dépassement de l’entreprise capitaliste. Ce livre réunit les contributions d’économistes et sociologues (Daniel Bachet, Benoît Borrits, Thomas Coutrot, Hervé Defalvard, Olivier Favereau, François Morin et Jacques Richard), complétées par des échanges avec les participants au séminaire.
Débats
Concilier climat et commerce dans un capitalisme mondial sous tension (Thierry Pouch)
Vingt ans après l’ouverture du Cycle de Doha par l’Organisation mondiale du commerce et les États qui en sont membres, aucun accord commercial multilatéral n’a été à ce jour signé. Dans l’histoire des relations commerciales post-Seconde Guerre mondiale, il s’agit du plus long cycle de négociation. Le report sine die de la « Ministérielle » de novembre 2021, pour cause de crise sanitaire, atteste symboliquement de l’essoufflement d’une institution internationale qui semble ne plus pouvoir répondre aux défis du siècle.
Des fragmentations sociales au commun : paradoxes (Marie-Claude Bergouignan)
Le commun qualifie ce qui est le fait de deux ou plusieurs personnes ou choses, ce qui est partagé avec d’autres. Une « communauté » au sens large désigne le rassemblement plutôt stable – ou tout au moins recherchant la stabilité – de membres unis par l’histoire et/ou une culture, par l’intérêt, par un pacte de citoyenneté et/ou un projet. Ainsi, l’article 1 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 énonce que « les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune ». Dans une société où, désormais, « les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit », l’utilité commune indique la volonté d’abolir les privilèges de naissance, mais exprime aussi les orientations citoyennes quant à la définition de l’intérêt général.
La « Grande Sécu » ou quelle place pour les assurances « complémentaires » ? (André Grimaldi)
Olivier Véran a demandé au Haut comité pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) un rapport sur l’articulation entre l’assurance maladie obligatoire (La Sécu) et les assurances complémentaires (mutuelles, instituts de prévoyance et compagnies d’assurances). En effet, l’existence des assurances privées « complémentaires » posent deux problèmes, historiquement datés.
Sur le livre Face au Covid-19 d’Alain Bihr (Dominique Dubois)
Le sociologue Alain Bihr vient de publier Face au Covid-19, Nos exigences, leurs incohérences (Paris, Syllepse, 2021). Il place dès l’abord son essai dans une perspective anticapitaliste, puisqu’il voit la crise sanitaire qui a résulté de la pandémie du Covid-19 comme révélatrice d’une crise du capitalisme. Mais, ce qui est plus original, également comme une crise des forces anticapitalistes, incapables d’engager une alternative concrète.
Les scénarios énergétiques en débat, Réponses aux critiques de Jacques Rigaudiat (Philippe Quirion, Behrang Shirizadeh)
Un article de Jacques Rigaudiat, paru dans le précédent numéro de cette revue, commente les scénarios énergétiques de l’association négaWatt et de l’Ademe, ainsi que les travaux d’optimisation du mix énergétique que nous avons menés concernant, d’une part, un mix électrique 100 % renouvelable pour la France, et, d’autre part, le choix de la part relative des renouvelables, du nucléaire et du captage-stockage géologique du CO2 dans ce mix. Dans ces travaux, publiés dans des revues scientifiques en économie de l’énergie, nous développons une série de modèles qui optimisent l’investissement et le fonctionnement d’un système électrique capable de satisfaire la demande d’électricité à chaque heure pendant une ou plusieurs années (jusqu’à 19), ceci à l’horizon 2050. Comme toutes les hypothèses, celles sur lesquelles nos travaux se basent sont bien sûr contestables, comme le sont nos choix de modélisation, mais les critiques formulées dans cet article nous apparaissent infondées.
À l’attention des lecteurs, note sur le statut de la revue Les Possibles
La revue Les Possibles a maintenant quatre ans d’âge et sa diffusion progresse régulièrement. Nous rappelons qu’elle fut créée à l’initiative du Conseil scientifique d’Attac pour être un lieu de débat théorique sur la nécessaire transformation de la société, aujourd’hui minée par le capitalisme néolibéral. Dès lors, ouverte à toutes les personnes qui s’inscrivent dans cette perspective, elle est indépendante de l’association Attac, le contenu des articles est de la responsabilité de leurs auteurs et n’engage pas l’association. La diversité des sujets, des auteurs et des disciplines témoigne de la volonté de garantir le pluralisme des idées. Le choix des thèmes et le respect des règles du débat scientifique et démocratique sont assurés par un comité éditorial dont la composition figure à la fin du sommaire.
Le comité éditorial
Adresse
Attac, 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris
Directeur de la publication
Jean-Marie Harribey
Secrétariat de la rédaction
Isabelle Bourboulon, Edgard Deffaud, Jean-Marie Harribey, Esther Jeffers, Éric Le Gall, Christiane Marty, Pascal Paquin, Dominique Plihon, Jean Tosti
Responsables techniques
Edgard Deffaud, Serge Gardien, Éric Le Gall, Wilfried Maurin, Pascal Paquin, Rémi Sergé, Olivier Tétard, Valentin Drean
Comité éditorial
Sylvie Agard, Christophe Aguiton, Verveine Angeli, Paul Ariès, Geneviève Azam, Daniel Bachet, Jacques Berthelot, Catherine Bloch-London, Martine Boudet, Isabelle Bourboulon, Thierry Brugvin, Thierry Brun, Alain Caillé, Claude Calame, Christian Celdran, François Chesnais, Francoise Clement, Pierre Concialdi, Jacques Cossart, Annick Coupé, Thomas Coutrot, Christian Delarue, Vincent Drezet, Cédric Durand, Guillaume Duval, Mireille Fanon-Mendès-France, Daniel Faugeron, David Flacher, Fabrice Flipo, Pascal Franchet, Bernard Friot, Jean Gadrey, Susan George, Jérôme Gleizes, Gérard Gourguechon, André Grimaldi, Janette Habel, Nicolas Haeringer, Jean-Marie Harribey, Michel Husson, Esther Jeffers, Isaac Johsua, Pierre Khalfa, Serge Le Quéau, Frédéric Lemaire, Christiane Marty, Gus Massiah, Antoine Math, Dominique Méda, Georges Menahem, Pascal Paquin, René Passet, Évelyne Perrin, Dominique Plihon, Thierry Pouch, Daniel Rallet, Jean-Claude Salomon, Catherine Samary, Denis Sieffert, Vicky Skoumbi, Jean-Louis Sounes, Daniel Tanuro, Bruno Tinel, Michel Thomas, Jean Tosti, Éric Toussaint, Stéphanie Treillet, Aurélie Trouvé, Patrick Viveret
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