Ferme-usine des 1 000 vaches : La Confédération paysanne légitimement en action

jeudi 26 juin 2014, par Attac France

7 h 30, le 28 mai dernier, une cinquantaine de paysans, venus de toute la France, pénètre sur le chantier de la ferme-usine des 1 000 vaches, dans la Somme. À quelques semaines de la première traite annoncée, la Confédération paysanne a de nouveau pris ses responsabilités. Ses militants démontent partiellement la salle de traite, énorme machine destinée à traire trois fois par jours les 1 000 vaches que cette usine doit accueillir. Très rapidement, 4 paysans sont mis en garde à vue. Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, après une altercation avec S. Le Foll, ministre de l’Agriculture, à qui il rapportait les pièces démontées, est arrêté violemment quelques heures plus tard en gare d’Amiens par un commando de dix policiers en civil, à la demande, semble-t-il, de S. Le Foll. Nos cinq amis seront libérés le lendemain midi, après l’interrogatoire par le procureur ; c’est maintenant 6 paysans, un de plus les rejoint début juin, qui sont mis en examen. Leur procès est fixé au 1er juillet au Tribunal d’Amiens.

Quel est l’enjeu ?

Michel Ramery, l’homme qui finance le projet de la ferme des 1 000 vaches, est la 369e personnalité la plus riche de France, avec une fortune estimée à 120 millions d’euros, selon le magazine Challenges. Ramery règne sur le BTP dans le nord de la France, et taille des croupières aux géants du secteur. Depuis 2007, il a remporté 772 marchés publics en Picardie, Haute-Normandie et Nord-Pas-de-Calais, contre... 214 pour Vinci et 74 pour Bouygues. Est-ce la qualité de ses réponses aux appels d’offre qui lui a permis cette performance ou sa proximité avec le monde politique, notamment socialiste du secteur ?

Le projet imaginé par M. Ramery (patron de 3 500 salariés) prévoit d’enfermer en permanence 1 000 vaches et 750 veaux et génisses dans son usine-étable. Cette usine produirait de l’électricité à partir d’un immense méthaniseur alimenté par le lisier, le fumier, des résidus de céréales et autres végétaux. Le méthane libéré par la fermentation alimenterait un générateur électrique d’une puissance équivalente à 25 éoliennes. Le courant serait racheté par EDF. Encouragé par les primes, le méthane agricole est un nouvel agro-business. Le lait n’est prévu que comme un sous-produit du lisier et vendu 20 % de moins que le prix du marché.

Se rajoute la question sensible du foncier, dont M. Ramery a besoin pour l’épandage du lisier issu de la méthanisation. Les terres sont rachetées deux à trois fois leur prix. Tout ceci au détriment du maintien ou de l’installation de paysans.

L’agro-industrie, après avoir mis la main en amont sur les semences, les engrais et pesticides, après avoir mis la main en aval sur les marchés de la transformation et de la distribution, s’en prend au cœur du métier des éleveurs ; elle tente de remplacer les fermes et paysans par des usines et ouvriers.

Le pouvoir au service de l’agro-industrie

S. Le Foll, depuis deux ans, parcourt foires et colloques en vantant l’agro-écologie et l’agriculture paysanne. Mais il n’y a aucune volonté politique d’empêcher l’aboutissement de tels projets. La gestion du permis de construire, ainsi que des amendements à la loi d’avenir agricole, ne laissent plus place au doute. Le gouvernement ne fait rien pour maintenir de nombreux paysans.

Les arbitrages gouvernementaux sur la mise en œuvre de la Politique agricole commune (PAC) alertaient déjà sur les choix de Hollande et de ses ministres : industrialisation de l’agriculture et développement des exportations en sont les maîtres mots, et les mesures prises plaisent à la FNSEA, syndicat agricole majoritaire, présidé par Monsieur Beulin.

Arrêtons-nous un instant sur ce dernier personnage, président de Sofiprotéol, holding financier qui pèse près de 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Peu connue du grand public, cette firme est un opérateur industriel présent aussi bien dans les semences que dans l’alimentation animale avec la société Glon Sanders et les biocarburants avec le diester, et possède aussi des marques familières, comme les huiles Lesieur et Puget ou les œufs Mâtines. Beulin a également investi dans la presse, en étant actionnaire du magazine France agricole ; mais ce n’est pas tout, il est président du port de La Rochelle et du Conseil économique et social régional du Centre, vice-président de la Copa-Cogeca et administrateur du Crédit agricole. Il détient enfin, avec trois membres de sa famille, une exploitation de 500 hectares, baptisée le Quadrige, à Trainou (Loiret), qui touche 140 000 euros d’aides directes européennes par an. Beulin a publiquement défendu son ami Ramery et s’est bien sûr opposé au redéploiement des aides de la PAC vers les petits paysans.

Le devenir de l’agriculture nous concerne tous ; la mise en échec de la répression aussi !

Attac, avec la Confédération paysanne, affirme que le devenir de l’agriculture concerne l’ensemble des citoyen-ne-s, que ce soit pour la qualité de l’alimentation, la préservation de l’environnement et de la biodiversité, l’aménagement du territoire, la relocalisation de l’agriculture...

La mise en échec de la répression contre des syndicalistes nous concerne également. En actionnant la police et en donnant instruction au procureur de poursuivre des syndicalistes, le gouvernement met en cause les libertés. Quand les syndicalistes n’ont pas d’autres moyens de bloquer ces projets que de mener de telles actions, celles-ci, si elles sont illégales, sont profondément légitimes.

Nous serons donc aux côtés de la Confédération paysanne, à Amiens, le 1er juillet à 9 heures, pour accompagner nos six amis. Nous soutiendrons la pétition en faveur des syndicalistes de la « Conf’ ». Le procès, qui devrait être vraisemblablement reporté en octobre prochain, sera l’occasion d’une forte mobilisation pour l’agriculture paysanne et contre la répression syndicale.

J’agis avec Attac !

Je m’informe

Je passe à l’Attac !

En remplissant ce formulaire vous pourrez être inscrit à notre liste de diffusion. Vous pourrez à tout moment vous désabonner en cliquant sur le lien de désinscription présent en fin des courriels envoyés. Ces données ne seront pas redonnées à des tiers. En cas de question ou de demande, vous pouvez nous contacter : attacfr@attac.org