Il est de plus en plus difficile de garantir aux citoyens un bon niveau de protection sociale et des politiques publiques de qualité en période de pénurie des ressources publiques. L’évasion et la fraude fiscales connaissent une progression inquiétante, notamment du fait des sociétés multinationales qui redoublent d’ingéniosité pour transférer artificiellement une partie de leurs bénéfices vers les paradis fiscaux.
Selon James. S. Henry du Tax Justice Network, 21 à 32 000 milliards de dollars environ seraient dissimulés dans les paradis fiscaux. Si les fortunes cachées dans ces territoires opaques étaient imposées équitablement, les ressources nécessaires pour investir dans la sécurité sociale, la solidarité internationale et vers une transition durable pour sauver notre planète seraient disponibles.
La lutte contre la fraude fiscale est principalement menée par les responsables politiques nationaux et internationaux. Mais les élus locaux peuvent jouer un rôle déterminant pour empêcher que l’argent des contribuables bénéficie à des entreprises, des banques ou des fonds qui utilisent les paradis fiscaux à des fins d’évasion fiscale.
Cet engagement peut passer par la remunicipalisation de certains services ou par l’imposition d’exigences de transparence comptable pays-par-pays pour les banques ou les entreprises des autres secteurs qui postulent pour des marchés publics. Un tel reporting pays par pays permettrait de voir si les entreprises soumissionnaires paient des impôts justes dans tous les pays où elles opèrent.
Depuis 2010 les régions françaises ont commencé à agir en exigeant plus de transparence comptable de la part des banques avec lesquelles elles travaillent [2]. Cette mobilisation a donné lieu en 2013 à l’adoption d’une règle contraignante de publication d’informations pays par pays pour les banques en France et en Europe. En Suède, en Norvège et en Finlande, certaines municipalités prennent des mesures fortes pour une plus grande transparence et des pratiques fiscales responsables dans leurs marchés publics.
Il appartient aujourd’hui aux nouvelles équipes municipales de franchir une étape supplémentaire en exigeant la même transparence de la part de l’ensemble des entreprises avec lesquelles elles travaillent.
Aujourd’hui les élus locaux lancent un appel international pour encourager d’autres initiatives locales et exiger des mesures plus ambitieuses au niveau international :
« A l’heure où les ressources publiques sont devenues rares, il est immoral de refuser de participer à l’effort collectif en cherchant par tous moyens, y compris illicites, à échapper à l’impôt. Les collectivités doivent intégrer la « citoyenneté » des entreprises et des banques dans le choix de leurs fournisseurs ». Roland Ries, Maire de Strasbourg et sénateur du Bas-Rhin, parti socialiste, France
« Dans le combat contre les paradis fiscaux, nous, les collectivités locales, pouvons jouer un rôle déterminant. Nous devons simplement choisir de ne travailler avec des banques ou des entreprises qui se soustraient à l’impôt, par quelque moyen que ce soit et où que ce soit sur la planète. » Robert Lion, Conseiller régional Île-de-France, EELV, France
« Je crois que c’est un suicide financier pour le secteur public d’apporter un soutien à des entreprises qui fuient l’impôt. Par notre action locale nous encourageons et promouvons des règles internationales ». Ian Eiloart, Conseiller municipal de Lewes, Parti libéral démocrate, Royaume Uni
« Mettre fin aux paradis fiscaux est à la fois une obligation politique et une urgence sociale. Le déclin des services publics et les coupes des aides aux plus défavorisés sont en train de creuser les écarts en matière d’exclusion et de pauvreté ». Txentxo Jiménez Hervás, conseiller régional de Navarra, Parti Aralar, Espagne
« Il est nécessaire et urgent d’éradiquer les paradis fiscaux pour garantir la soutenabilité des dépenses publiques avec un système fiscal juste et équitable base sur des principes d’égalité ». Marisa de Simón Caballero, Txema Mauleón Esparza and José Miguel Nuin Moreno, conseillers régionaux de Navarre, coalition Izquierda-Ezkerra, Espagne
« Je trouve profondément immoral que certaines activités financées par l’argent public soient conduites de manière à éviter l’impôt en délocalisant les profits. » Carina Nilsson, conseillère à Malmö, Parti social-démocrate, Suède.
« C’est notre responsabilité d’élu à tous les niveaux d’assurer que chaque couronne d’impôt est utilisée pour le bien vivre ensemble et ne disparait pas dans les paradis fiscaux » Bertil Dahl, Conseiller à Kalmar, Parti de gauche, Suède.
« Tout le monde comprend que nous ne pouvons pas préserver notre système de protection sociale si l’argent public bénéficie à des entreprises qui ne paient pas l’impôt en toute honnêteté. Nous avons l’obligation de gagner ce combat contre les paradis fiscaux. » Thomas Wallgren, conseiller municipal d’Helsinki, Parti social-démocrate, Finlande.
« Les collectivités locales ont la charge de gérer la plus grande partie des services de protection sociale et ce grâce au financement par l’impôt. C’est pourquoi nous nous devons d’agir contre la fraude fiscale ». Johannes Hirvaskoski, conseiller municipal de Vanda, Parti centriste, Finlande.
« Il s’agit de comportements qui ont un effet de distorsion du marché, un problème dont peu de gens mesurent l’étendue. Les paradis fiscaux sont dévastateurs pour les acteurs honnêtes. Les pays les plus pauvres sont les plus durement affectés mais aussi vous et moi ». Lars Giæver, conseiller municipal de Lillehammer, Parti Vert, Norvège.
« Les paradis fiscaux autorisent la fraude fiscale organisée. Ils encouragent un capitalisme parasitaire qui pille la société, la planète et les générations futures ». Øyvind Solum, conseiller municipal de Nesodden, Parti Vert, Norvège
« Les paradis fiscaux sont à associer au crime organisé. Si nous voulons préserver les systèmes de protection sociale au sein de notre société et combattre la pauvreté, nous devons nous en débarrasser ». Even Gran, conseiller municipal de Horten, Parti socialiste de gauche, Norvège.
Signataires français
Olivier Becht, Maire de Rixheim, Président délégué de Mulhouse Alsace Agglomération et député suppléant de la 5e circonscription du Haut-Rhin, sans étiquette ; Jean-François Debat, Vice-président aux Finances de la Région Rhône-Alpes et Maire de Bourg-en-Bresse, Parti socialiste ; Cyril Kretzschmar, Conseiller Régional de Rhône-Alpes, Europe Ecologie – Les Verts ; Robert Lion, Conseiller Régional Île-de-France, Europe Ecologie – Les Verts ; Eric Loiselet, Conseiller Régional Bourgogne, Europe Ecologie – Les Verts ; Eric Piolle, Conseiller Régional de Rhône-Alpes, Europe Ecologie – les Verts ; Roland Ries, Maire de Strasbourg et sénateur du Bas-Rhin, parti socialiste ; Victorine Valentin, Conseillère Municipale de Colmar, Conseillère Régionale Alsace, Parti Socialiste