Youlie Yamamoto au congrès de Solidaires finances publiques

lundi 21 octobre 2024, par Attac France

Intervention de Youlie Yamamoto, porte-parole d’Attac, au 34e Congrès National de Solidaires Finances Publiques le 17 octobre 2024.

Bonjour les camarades, mes cher·es collègues,

Je remercie Solidaires finances publiques d’avoir invité Attac. Je suis ravie d’être au Congrès de mon syndicat. Parce qu’avant d’être porte-parole de l’association, je suis d’abord contrôleuse des finances publiques. J’ai commencé en 2009, avant la fusion. J’ai été à l’école nationale du Trésor, filière GP en force !

C’est Solidaires finances publiques qui m’a permis de m’engager à Attac. Car entre deux saisies de déclaration de TSB au PELP de Paganini ou d’envois d’AMR au SIE de Montreuil, je papillonnais entre mes sections Solfip 93 ou Paris et… les garde-à-vue. J’exagère, mais c’est pour teaser la suite de mon intervention.

J’ai co-fondé le groupe « Action » en 2016, chargé de rendre visible les campagnes d’Attac dans l’espace médiatique avec des actions spectaculaires et désobéissantes.

J’ai mené plus d’une action avec la double casquette : avec Solfip nous avons symboliquement prélevé l’argent évadé au siège de Google pour le déposer à un centre des finances publiques ; nous avons prélevé du mobilier d’évadés fiscaux comme MacDo ou Total pour le déposer devant une DRFIP ; et en février dernier nous avons lancé la campagne SUM (Superprofits Ultra-riches Méga injustices) en déployant une banderole géante « Tax the rich » du haut du nouvel hôtel de luxe LVMH appartenant à Bernard Arnault.

Nous avons continué de mener cette campagne ensemble avec la tribune signée largement pour la justice fiscale parue en septembre, et le forum de la justice fiscale du 5 octobre.

Pourquoi nous menons des actions ensemble ? Pour celles et ceux qui ne le savent pas, Solfip est membre fondateur d’Attac. Fondée en 1998, l’association est le fruit d’un contexte politique très particulier. C’était l’essor de l’altermondialisme qui proposait des alternatives aux politiques néolibérales. Le mouvement social en pleine ébullition, les partis en crise, Attac est née en réaction à cela, un mélange des genres, composé de syndicats (Solfip, CGT Finances, Solidaires, UgictCGT, FSU, Syndicat de la magistrature…) d’associations (Droit au logement, Action chômage…) de médias indépendants (Monde diplomatique, Politis…) et de personnalités (Gisèle Halimi, Susan George…).

A l’origine, il s’agissait de taxer les transactions financières. 26 ans plus tard, l’association produit des analyses et mène désormais des actions pour la justice fiscale, sociale et écologique. Mais nous affirmons aujourd’hui que la bifurcation écologique et sociale est indispensable si nous voulons changer la vie des gens. Nous pensons qu’il n’y aura pas de justice sociale sans justice écologique, et inversement. Ce pourquoi l’association s’engage dans l’Alliance écologique et sociale, aux côtés de Solidaires entre autres.

Et on a du boulot.

Je ne vous apprends rien, nous traversons une crise sociale et politique majeure. Pourquoi ? Parce que des politiques injustes sont mises en œuvre. Je vais vous faire un petit bilan de ces politiques. Comme ce bilan est déprimant avec des informations barbantes et anxiogènes, je vous le fais sous la forme du jeu « Question pour un champion ». Vous devez deviner qui se cache derrière ce bilan catastrophique.

Et… Top ! J’ai décidé de supprimer l’impôt sur la fortune (ISF), instaurer le prélèvement forfaitaire unique (PFU), de baisser l’impôt sur les sociétés (IS) qui a surtout profité aux grandes entreprises, bref j’ai multiplié les cadeaux fiscaux ; grâce à moi 500 des plus grosses fortunes françaises possèdent l’équivalent de 20% du PIB du pays en 2017 et passent à 45% en 2022 ; grâce à moi toujours la France s’est hissée au top 3 mondial des millionnaires alors que la population des millionnaires baisse dans le monde ; grâce à moi encore la fortune de Bernard Arnault a triplé, elle est passée de 70 milliards d’euros en 2017, à 220 milliards en 2024 ; je suis suis…Emmanuel Macron !

Passons à un autre responsable de la crise.

Et… Top ! En mars j’ai annoncé 10 milliards de coupes budgétaires, puis 16 milliards au printemps ; j’ai annoncé un premier dérapage du déficit public à 5,5% au lieu des 4,1% prévus ; pour finalement annoncer le crash cet été avec un déficit de plus de 6% ; cela n’a créé aucun emploi, pas d’effet sur la croissance ni l’investissement, c’est pas moi qui le dis c’est France Stratégie, organisme rattaché à Matignon, et ça donne un trou dans la caisse de 60 milliards d’euros, je suis je suis…Bruno Le Maire !

Voilà, la politique de Macron est un échec. Cela provoque une offensive conservatrice, avec une alliance des droites et du Rassemblement national incarnée en la personne de Michel Barnier, lequel nous sort la même vieille rengaine austéritaire ! Le pays serait au bord de la faillite, la dette et le déficit sont brandies comme un épouvantail pour faire passer la pilule de la réduction des dépenses publiques de 40 milliards d’euros. Q-U-A-R-A-N-T-E. Du jamais vu depuis vingt ans.

Ce discours est faux ! Il faut le combattre de toutes nos forces. L’austérité n’est pas une fatalité, et pire elle a deux conséquences : l’aggravation des inégalités (avec l’effondrement des services publics et de la protection sociale) et cela crée du ressentiment et du désespoir sur lesquels prospère le RN.

Le RN pré-gouverne déjà. Il s’enracine. Le parti se structure. Il attend patiemment son heure, à l’heure d’une grande vulnérabilité démocratique.

Nous devons mener la bataille culturelle. La justice fiscale est un outil, la rigueur budgétaire est une erreur, la solution est de faire contribuer ceux qui ne participent pas assez. C’est à dire, les ultra-riches et les multinationales. Et cela dit en passant ce sont en plus ceux qui polluent le plus tout en subissant le moins les conséquences du réchauffement climatique.

Nous devons en tant qu’acteur et actrice du mouvement social combattre la petite musique de l’austérité et imposer la justice fiscale dans le débat public. Et ce n’est pas une mince affaire…

J’alerte sur l’état de nos libertés publiques. Les libertés de manifestation, d’expression, de réunion, et même de pensée subissent des attaques sans précédent. Les arrestations arbitraires, les interdictions de manifestations, les convocations en commissariat, les procès…se multiplient. Notre capacité en tant qu’organisation de transformation sociale est menacée.

Macron détruit pan par pan l’État de droit. Depuis les gilets jaunes, il a mené deux offensives : législative d’abord, avec la loi sur le maintien de l’ordre, la loi sécurité globale, et la loi « Séparatisme » (Loi confortant les principes de la république) véritable trappe à criminalisation de l’action politique et syndicale, et associative notamment avec le CER (Contrat d’engagement républicain). La seconde offensive concerne le discours. Un discours emprunté à l’extrême-droite qui stigmatise et criminalise les militant·es. Les écologistes seraient des ecoterroristes, les syndicalistes, des preneurs d’otage.

Combien d’actions et de militant·es et syndicalistes réprimés ? Des milliers, rien que depuis l’année dernière. C’est une véritable chape de plomb judiciaire, législative, avec une doctrine du maintien de l’ordre féroce, qui s’abat sur nous. Aujourd’hui, toute contestation pour le progrès social ou un monde soutenable devient impossible.

Comme en témoigne la répression dans les mobilisations antibassines, la tentative de dissolution des soulèvements de la terre, les mobilisations retraites, justice pour Nahel, Palestine, jeunesse ou bien encore Kanak. Il y a des alertes sur la répression et les atteintes aux libertés publiques à tous les niveaux, des instances nationales comme européennes, et internationales. C’est dans ce contexte que les déclarations de Bruno Retailleau doivent nous alerter au plus haut point. Pour lui l’État de droit ne serait « pas intangible » parce qu’il y a au dessus la « vox populi ».

A Attac nous subissons déjà les effets de ces offensives : nous avons été convoqué·es à l’Assemblée nationale à la commission d’enquête sur les groupuscules violents ; Le Figaro a lancé un sondage « Faut-il dissoudre Attac ? » ; nous essuyons trois procès depuis l’année dernière. Et d’ailleurs à l’heure où je vous parle, Lou Chesné porte parole et Jean-François Guillon du Bureau national sont en ce moment même au tribunal pour avoir participé à une action symbolique où nous avons empêché le décollage de jets privés.

On voit l’emprise et l’expansion des idées et des médias réactionnaires, avec Bolloré plus puissant que l’Arcom ; on voit le RN en force ; on voit tout l’arsenal répressif que j’ai cité prêt à produire les pires effets entre les mains du RN. Nos organisations sont menacées. C’est pourquoi Attac s’investit dans les cadres et initiatives de défense des libertés publiques, mais aussi à la construction d’un front démocratique, à l’instar des meetings « Libertés ! » et « Front démocratique » que nous avons co-organisés pendant les législatives. Il faut non seulement continuer les dynamiques en cours, mais il faut également les renforcer.

Face à cela, le repli ne doit pas être individuel, il doit être collectif, le repli doit se faire au sein de nos organisations. Il faut investir massivement et fortement nos organisations. Car le mouvement social et les médias indépendants sont le dernier rempart démocratique. On peut déjà s’abonner à un média indépendant, adhérer à une association, et faire syndiquer !

Camarades, vous êtes au quotidien au contact du public, des entreprises, des collègues, faites syndiquer à tour de bras. Vous avez là un pouvoir citoyen, un superpouvoir démocratique qui participe à résister à l’extrême-droite et à la battre durablement : c’est votre pouvoir syndical. Syndical power !

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