La Révolution française a renversé l’Ancien régime et, lors de la nuit du 4 août 1789, l’Assemblée nationale a aboli les privilèges de la noblesse et du clergé, dont leurs exemptions fiscales. On l’oublie souvent, mais l’injustice fiscale a été l’une des causes majeures de la Révolution. Dans les cahiers de doléances de 1789, la réforme de l’impôt figurait parmi les revendications principales. La Révolution a consacré le principe d’égalité devant l’impôt, pensé comme étant le socle de l’indispensable consentement à l’impôt. Ainsi, dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aujourd’hui intégrée dans la Constitution, l’article 13 indique que « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».
Le parallèle entre la situation actuelle et celle de 1789 nous semble frappante. Aujourd’hui, ce ne sont plus la noblesse et le clergé qui échappent à l’impôt, mais les ultra-riches et les entreprises multinationales. Ainsi, en proportion de leur revenu, les milliardaires payent moins d’impôt que le reste de la population. En effet la population française dans son ensemble paie en moyenne environ 50 % de ses revenus en impôts et cotisations sociales, contre 27 % pour les milliardaires, tandis qu’en pourcentage de leur chiffre d’affaires, les grandes entreprises, et notamment les multinationales, payent moins d’impôt que les PME.
Lors du mouvement des Gilets jaunes en 2018-2019, 20 000 cahiers de doléance ont été rédigés, soit 220 000 doléances. Il est ressorti de leur analyse un fort sentiment d’injustice fiscale, avec des propositions consensuelles pour rétablir la justice fiscale, notamment autour d’un rétablissement de l’ISF, d’une meilleure taxation des multinationales, ou de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale.
Alors que le gouvernement dit rechercher 44 milliards d’économies dans le budget 2026 et, pour cela, s’apprête à demander des sacrifices à l’ensemble de la population (salarié
es, fonctionnaires, retraité es, chômeur ses, allocataires des prestations sociales, malades...), nous disons qu’il est inconcevable de demander à celles et ceux qui ont des difficultés pour boucler leurs fins de mois de se serrer encore la ceinture alors que celles et ceux qui peuvent le plus contribuer à l’impôt ne paient pas leur juste part !Rappelons que depuis 2017, les plus riches ont vu leurs impôts baisser du fait de la suppression de l’ISF ainsi que du Prélèvement forfaitaire unique (PFU), appelé « flat tax », qui a mis fin à la progressivité de l’imposition des revenus financiers, si bien qu’aujourd’hui ceux-ci sont moins taxés que les revenus du travail. Comme l’ont montré les quatre rapports du Comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital, cela n’a produit aucun ruissellement mais a contribué à enrichir les plus riches. Alors que les taux de pauvreté battent des records historiques en France (15,4% de la population en 2023 en France métropolitaine, selon l’INSEE, soit un pic sans précédent depuis le lancement de l’indicateur en 1996), les riches n’ont jamais été aussi riches : selon le classement annuel des 500 plus grandes fortunes de France, publié en juillet 2025 par Challenges, le nombre de milliardaires en France est passé de 16 à 145 entre 1996 et 2025 et leur patrimoine total a été multiplié par 14, passant de 80 à 1128 milliards d’euros.
Dans ce contexte, comment tolérer qu’on demande des efforts à l’ensemble de la population tout en maintenant les privilèges fiscaux ?
Il est urgent de rétablir la justice fiscale par des mesures qui permettraient de faire payer à chacun sa juste part d’impôt tout en restaurant le consentement à l’impôt : taxe Zucman sur les 1800 foyers fiscaux les plus riches, révision des niches fiscales injustes et inefficaces, mise en place d’un ISF rénové, suppression de la flat tax pour mieux taxer les dividendes, taxation unitaire pour mettre fin à l’évasion fiscale des multinationales, réduction des aides publiques aux entreprises qui sont devenues le premier budget de l’État avec un montant record de 211 milliards d’euros.
L’austérité que veut nous imposer le gouvernement n’a rien d’une fatalité, à condition d’abolir les privilèges fiscaux : aux ultra-riches et aux grandes entreprises de faire des efforts ! Mobilisons-nous pour imposer l’idée qu’un autre budget est vital.