Le triptyque infernal composé de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS), du prélèvement forfaitaire unique (PFU) et de la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en un maigre impôt sur la fortune immobilière (IFI) l’illustre parfaitement. Les 3 rapports du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital l’ont confirmé : ces mesures ont surtout eu pour effet de faire exploser la distribution de dividendes au profit des plus riches, rien de plus. Pour les 100 contribuables les plus riches imposés à l’ISF en 2017, le PFU et la suppression de l’ISF ont procuré un gain de 1,2 million d’euros en moyenne...
La note de l’Observatoire de la justice fiscale d’Attac revient également sur la suppression de la taxe d’habitation, que le gouvernement vante comme ayant principalement bénéficié aux classes moyennes. C’est oublier de préciser que les plus pauvres, qui en étaient exonérés, n’en ont pas bénéficié et que les 20% les plus riches en seront les principaux bénéficiaires d’ici 2023. Et cela pour un effort financier d’environ 23 milliards d’euros d’ici 2023, dont la moitié en faveur des 20 % des ménages les plus aisés.
En réponse au mouvement des Gilets Jaunes, la réduction de l’impôt sur le revenu (IR) aura pour sa part, bénéficié à près de 17 millions de foyers fiscaux et coûté un peu plus de 5 milliards d’euros, soit le coût du PFU et de l’IFI, des mesures ayant bénéficié à quelques centaines de milliers de contribuables. Cette baisse contribue également à affaiblir l’impôt progressif alors que les impôts indirects sur la consommation et les prélèvements proportionnels, comme la contribution sociale généralisée (la CSG rapporte 50 milliards d’euros de plus que l’IR) poursuivent leur progression.
Au-delà de l’IS, le gouvernement a poursuivi ses choix en faveur des entreprises, et pas seulement les PME… Le coût des allègements de cotisations sociales, baptisés « niches sociales », pourrait désormais atteindre les 100 milliards d’euros, voire plus, avec la transformation du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) en nouvel allègement alors que l’impact du CICE en termes d’emplois et de relance économique, comme celui des niches sociales, n’est pas démontré, loin s’en faut. Par ailleurs, réclamée à grands cris par le Medef, la baisse de 20 milliards d’euros des impôts locaux des entreprises, les « impôts de production », pourtant actée avant la crise sanitaire, a été abusivement intégrée au plan de relance. Cette mesure inquiète les élus locaux, qui ont perdu une grande part de leur marge de manœuvre fiscale durant ce quinquennat et voient les finances locales dépendre très largement des choix gouvernementaux…
Si « ruissellement » il y a eu, il s’est écoulé vers le haut, vers les plus riches, plombant de surcroît les recettes publiques. Sur l’ensemble du quinquennat, 3 mesures (baisse du taux d’IS, PFU et IFI) auront coûté à elles seules la bagatelle de 35 milliards d’euros. Un coût global qui passe à 55 milliards d’euros avec la baisse des impôts de production (10 milliards sur deux ans et davantage avec la transformation du CICE en allégement : environ 20 milliards d’euros par an). Un pognon de dingue qui manque cruellement aux services publics… Et un transfert de charge fiscale sans précédent.
Ce quinquennat aura donc été celui de l’injustice fiscale et sociale et, par conséquent, celui au cours duquel le consentement à l’impôt (pilier d’une vie en démocratie), déjà écorné auparavant, aura connu un affaiblissement préoccupant. « En même temps », cela n’a pas empêché le pouvoir de s’attaquer à la redistribution sociale avec la baisse des allocations logement et sa « réforme » de l’assurance chômage, ajoutant l’injustice sociale à l’injustice fiscale. Et ce, alors que le taux de pauvreté atteint des records. Au surplus, le gouvernement n’hésite pas à instrumentaliser la question de la dette publique : présenté dès le printemps 2021, son programme de « stabilité et de croissance » est synonyme d’austérité. Son projet ? Intensifier le dynamitage du modèle social et faire payer l’intégralité de la dette via un système fiscal déséquilibré et injuste. Autrement dit, poursuivre et accélérer ce qu’il a entrepris. Pour Attac, à l’opposé de ces choix, et face aux enjeux, il est urgent de défendre une véritable justice fiscale, sociale et écologique.