Desintox sur le programme xénophobe du RN

lundi 17 juin 2024, par Attac France

Dans le monde selon le Rassemblement national, les immigré·es sont responsables de tous les maux : délinquance, violences sexuelles, chômage, baisse des salaires, déficit public... Une catégorie de la population est ainsi désignée à la vindicte populaire, alors même que la responsabilité écrasante des grandes entreprises et des plus riches dans les crises sociales et écologiques est passée sous le tapis. Il faut dire que les grands patrons comptent parmi les nouveaux amis des dirigeant·es d’extrême-droite.

Dans ce desintox, nous défaisons une à une les idées racistes du programme du RN.

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Les immigré·es sont responsables de la délinquance ? C’est faux !

Résumé : Selon le rapport annuel de la CNCDH, 52 % des Français·es pensent que « l’immigration est la principale cause de l’insécurité » (chiffres 2020). Pourtant il n’existe aucune preuve d’un quelconque lien entre immigration et délinquance.

L’extrême-droite met en avant une surreprésentation des étranger·es parmi les personnes condamnées en se basant sur leur nationalité : en 2021, selon les chiffres du ministère de la Justice, 15,7 % d’entre elles étaient de nationalité étrangère alors qu’elles représentent 7,7 % de la population française selon les chiffres de l’INSEE [1].

Cette surreprésentation ne démontre pourtant en rien une propension plus grande à commettre des actes de délinquance de la part des personnes étrangères. Elle s’explique par leurs conditions de vie : nombre d’entre elles font partie des catégories les plus pauvres, et c’est par ailleurs la délinquance qui est la plus fortement « recherchée » et réprimée. Ainsi, les personnes immigrées originaires d’Afrique représentent 32% des ouvrier·es et employé·es (contre 19 % pour les non-immigré·es).

Certaines infractions sont liées à la condition même de personne étrangère (comme le travail illégal), et certaines font l’objet de condamnations quasi systématiques : refus de test PCR, refus de rendez-vous au consulat, refus monter dans l’avion etc.

Ajoutons que les personnes immigrées (étrangères ou non) sont victimes de traitements discriminatoires : contrôles au faciès qui conduisent à des sur-interpellations, traitements plus sévères par le système judiciaire ; alors même que 99 % des condamnations concernant des personnes étrangères sont des délits (ministère de la Justice).

En conclusion : il n’existe pas de lien entre immigration et délinquance, mais entre précarité et délinquance. Or le programme du RN vise à précariser davantage les personnes issues de l’immigration (absence de papiers, de permis de travail, accès aux droits limités). Comme l’écrit la Cimade : « C’est donc l’arbre qui cache la forêt : s’attaquer à l’immigration pour réduire la délinquance semble donc infondé, et c’est davantage une lutte contre les inégalités sociales et territoriales qui permettrait de diminuer les actes de délinquance. A défaut, l’on ne fait que créer une prophétie autoréalisatrice, sans même parler de la polarisation des tensions que de tels discours entraînent. »

Les immigré·es sont responsables des violences sexuelles ? C’est faux !

Résumé : 9 victimes de viol sur 10 connaissent leur agresseur ( dont la moitié sont les conjoints et ex-conjoints).

Il est particulièrement odieux d’insinuer que ce sont les immigré·es qui seraient responsables des violences sexuelles en France, alors qu’il est solidement établi que les viols sont commis très majoritairement par les proches des victimes. Plus de neuf victimes de viol sur dix connaissaient leur agresseur. Les conjoints et ex-conjoints en représentent presque la moitié.

La stratégie de l’extrême-droite consiste à communiquer sur des cas de viol impliquant des immigré·es, pour tenter de faire croire que ces cas sont représentatifs. Or, la culture du viol est présente dans la société française. Pour combattre cette culture du viol, il faut lutter contre le patriarcat et le sexisme, au lieu de faire croire que les immigré·es sont responsables de tous les maux de notre société.

Les immigré·es sont responsables du chômage ? C’est faux !

Résumé : Les analyses menées sur le marché du travail ne trouvent pas d’impact négatif de l’immigration sur le chômage en France ou dans les principaux pays développés.

On se souvient des affiches du FN « 3 millions de chômeurs, ce sont 3 millions d’immigrés de trop ! La France et les français d’abord », affiches directement inspirées de celle du parti nazi dans l’Allemagne des années 1930 qui rapportaient le nombre de juifs au nombre de chômeurs. Depuis la fin des Trente Glorieuses, rendre les immigré·es responsables du chômage de masse est un grand classique de l’extrême-droite, le RN ayant multiplié les affiches avec des slogans tels que « Immigration = chômage » ou encore « Halte au chômage, le travail aux français ».

L’immigration est régulièrement accusée d’être cause de chômage. L’arrivée d’une nouvelle main d’œuvre sur le marché du travail entraîne en effet une hausse de l’offre de travail ; si l’on considère que la demande de travail est fixe, alors on peut anticiper une augmentation du chômage, soit car les immigré·es ne trouvent pas d’emplois, soit parce qu’ils entrent en concurrence avec les natifs.

Mais, à court terme, les effets de ce surplus de main-d’œuvre sont liés aux caractéristiques des immigré·es et leur capacité à occuper les mêmes postes que la population active dans le pays d’accueil. Si les immigré·es ont des caractéristiques très proches de celles de la population active et qu’ils sont en mesure d’occuper les mêmes postes de travail, les immigré·es seraient parfaitement substituables aux personnes déjà présentes sur le marché du travail ; la concurrence augmenterait alors pour les mêmes métiers, le salaire moyen s’ajusterait à la baisse.

En réalité, les immigré·es n’ont pas la même structure de qualification que la population active et occupent des emplois très complémentaires à ceux occupés par le reste de la population. Les analyses menées sur le marché du travail ne trouvent pas d’impact négatif de l’immigration sur le chômage en France ou dans les principaux pays développés.

Anthony Edo (« The Impact of Immigration on the Labor Market », 2019) montre ainsi que les analyses menées sur l’impact de l’immigration sur le marché de travail des nationaux concluent généralement à des effets neutres ou positifs. Dans le cas de la France, l’arrivée d’immigré·es a augmenté l’offre de travail potentielle sans augmenter le taux de chômage et sans réduire le taux d’emploi.

En France, les immigré·es sont surreprésentés dans des métiers caractérisés par des conditions de travail contraignantes et/ou des métiers en tension. Selon la Dares, les immigré·es représentent ainsi 38,8% des employés de maison, 28,4 % des agents de gardiennage et de sécurité et 24,1 % des ouvriers non qualifiés du BTP. Ces secteurs essentiels au fonctionnement de l’économie proposent des métiers que les personnes non immigrées évitent en raison de la précarité des contrats et des conditions de travail plus contraignantes.

L’augmentation de l’offre de travail induite par l’immigration exerce un effet très limité sur le chômage, en raison de la faible substituabilité entre les emplois occupés par les immigré·es et ceux des natifs.

Les immigré·es baissent les salaires ? C’est faux !

Résumé : Entre 1990 et 2010 l’immigration n’a eu aucun effet global sur le salaire des natifs.

Pour justifier son opposition à la proposition de régulariser les étrangers qui travaillent dans des secteurs en tension, Jordan Bardella a affirmé en février 2023 sur LCI : « L’immigration est aujourd’hui utilisée par les grands groupes pour peser à la baisse sur les salaires. Et en réalité, quand vous aurez régularisé un travailleur clandestin, les grands patrons prendront d’autres clandestins parce que cette chaîne de faire peser à la baisse sur les salaires est sans fin. »

L’immigration tire-t-elle les salaires vers le bas ? Ce n’est pas ce que montrent les études économiques sur ce sujet !

Anthony Edo et Farid Toubal (2015) ont montré qu’à court-moyen terme, l’immigration aurait un effet légèrement négatif sur le salaire moyen des qualifiés, compensé par un effet légèrement positif sur le salaire moyen des peu qualifiés. Elle pousserait à terme les non-immigrés vers des postes plus spécialisés avec des tâches plus complexes. Edo et Toubal concluent qu’entre 1990 et 2010 l’immigration n’a eu aucun effet global sur le salaire des natifs.

L’immigration pousserait même à terme les non-immigré·es vers des postes plus spécialisés avec des tâches plus complexes, selon Cristina Mitaritonna, Gianluca Orefice Gianluca et Giovanni Peri (« Immigrants and firms’ outcomes : Evidence from France », European Economic Review, 2017).

En cas d’effets négatifs, ceux-ci sont de très court-terme et concentrés sur les travailleurs en concurrence directe avec les immigrés. Les individus les plus impactés sont souvent les immigré·es des vagues antérieures, car ils représentent les substituts les plus proches des nouveaux travailleurs étrangers (Ottaviano & Peri, 2012). Ainsi, selon El Mouhoub Mouhoud (2012), la concurrence sur le marché du travail s’exercerait davantage entre anciennes et nouvelles générations de migrant·es qu’entre migrant·es et natifs.

Ainsi, l’immigration en France a contribué à l’accroissement de la population active mais n’a pas réduit le salaire moyen sur le marché du travail.

Les immigré·es coutent cher aux finances publiques ? C’est faux !

Résumé : « la contribution des immigrés sous la forme d’impôts et de cotisations a été supérieure aux dépenses publiques consacrées à leur protection sociale, leur santé et leur éducation ».

Selon l’extrême-droite, la population immigrée appauvrit les caisses de l’État. Ainsi, « L’immigration coûte cher », selon Sébastien Chenu (porte-parole du RN), qui évoquait en 2021 la somme de « 15 milliards d’euros » à « récupérer par an » en mentionnant « les aides sociales qui sont versées à des gens qui ne sont pas Français, le coût de l’AME, les mineurs non accompagnés… ». La députée RN Gisèle Lelouis a assuré en 2023 que l’immigration coûte près de 54 milliards d’euros par an à la France.

En réalité, les immigré·es ne constituent pas une charge pour les finances publiques, bien au contraire ! L’OCDE a ainsi publié une revue des études ayant évalué les effets de l’immigration sur les finances publiques (Perspectives des migrations internationales, 2021). La conclusion est on ne peut plus claire : « Dans les 25 pays de l’OCDE pour lesquels des données sont disponibles, en moyenne au cours de la période 2006-18, la contribution des immigrés sous la forme d’impôts et de cotisations a été supérieure aux dépenses publiques consacrées à leur protection sociale, leur santé et leur éducation ». En France, la contribution nette des immigré·es est estimée à 0,25% du PIB, en moyenne, sur la période 2006-18.

La contribution des immigré·es aux recettes fiscales est suffisamment importante pour financer les dépenses publiques supplémentaires générées par leur arrivée. En effet, les immigré·es sont surreprésenté·es dans les classes d’âge les plus actives, entre 20 et 60 ans, période au cours de laquelle les montants des cotisations payées sont en moyenne supérieurs à ceux des avantages perçus.

La structure d’âge de la population immigrée permet donc de compenser une contribution plus faible à âge donné que les non-immigré·es.

Enfin, alors que Marine Le Pen affirmait en 2011 que « L’immigration participe de la déstabilisation massive de notre système de protection sociale », l’immigration contribue au contraire à compenser les effets du vieillissement de la population sur le financement des retraites.

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