Fiche : L’Europe et l’évasion fiscale

vendredi 10 mai 2019, par Attac France

Une Europe solidaire a besoin d’une politique fiscale commune !

Une Europe solidaire a besoin d’une politique fiscale commune !

L’évasion fiscale et le dumping fiscal sont des problèmes européens faits maison

Luxembourg, Pays-Bas, Irlande, Malte, Chypre - des États membres de l’UE figurent parmi les paradis fiscaux les plus actifs. L’Allemagne est également l’une des destinations les plus populaires pour les flux financiers non transparents, en particulier en provenance des pays du Sud, avec l’aide desquels le blanchiment d’argent et la fraude fiscale sont pratiqués à une échelle gigantesque . En outre, on trouve parmi les paradis fiscaux une douzaine d’autres territoires d’outre-mer principalement britanniques et néerlandais, tels que Jersey, Curaçao et les îles Vierges britanniques.

Les paradis fiscaux sont au cœur de l’Union européenne. En effet, la politique de concurrence a fait de l’UE l’un des piliers de la concurrence fiscale mondiale. Le pionnier a été l’Irlande, qui applique un taux d’imposition de 12,5 % sur les bénéfices des sociétés depuis 2004. Chypre, l’Estonie et la Bulgarie offrent désormais des taux d’imposition aussi bas et les taux d’imposition des principaux pays industrialisés ont également été progressivement réduits. La France n’est pas en reste : le taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés a baissé de moitié depuis les années 1980 passant de 50% à 28% en 2019 et atteindra 25% en 2022.

Blocus des institutions européennes : le principe de l’unanimité dans la politique fiscale

A ce jour, il n’existe pas de politique fiscale européenne commune. De nombreuses initiatives ont échoué en raison du principe de l’unanimité en matière fiscale. Alors que le Parlement européen réclame depuis 18 ans une loi uniforme sur l’impôt des sociétés (avec l’approbation de la gauche), de nombreux gouvernements bloquent le Conseil européen ou le Conseil pour les Affaires économiques et financières parce qu’ils défendent l’idéologie de la concurrence fiscale.

Résultat : l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent prospèrent au profit d’une minorité de riches et des multinationales

En particulier, le déplacement comptable des bénéfices par le biais des prix de transfert manipulés, de paiements d’intérêts, de droits de licence et de brevets, d’assurances, etc. conduit souvent à des taux d’imposition très faibles pour des sociétés multinationales telles que Apple, IKEA, Amazon et Nike. En outre, il existe de nombreuses lacunes et de nombreux accords spéciaux. Pendant des années, Apple a bénéficié d’un taux d’imposition dans l’UE en dessous de 1%. Mais des entreprises françaises comme Total, ou allemandes telles que BAYER, BASF, E-ON et SAP jouent également dans le concert des évasions fiscales. Selon les estimations du Parlement européen, les États membres de l’UE perdent environ 1000 milliards d’euros par an à cause de l’évasion fiscale.

Le faible niveau d’imposition du revenu et du patrimoine, conjugué à l’évasion fiscale et au blanchiment d’argent, entraîne une concentration croissante de la richesse entre des mains de moins en moins nombreuses. La richesse des milliardaires croît quatre fois plus vite que la richesse totale. Au fur et à mesure de cette évolution, la confiance dans la démocratie et sa promesse initiale d’une politique juste grâce à l’impôt sont détruites.

Nous avons besoin d’une politique fiscale européenne commune !

Pour surmonter les nombreux défis posés par la transition écologique et sociale, nous avons besoin d’une politique fiscale européenne commune qui ne tolérera plus les tentatives nationales isolées au détriment de tous les États membres. Nous demandons que les cinq exigences suivantes soient appliquées au niveau européen :

  • Fiscalité à l’échelle du groupe : les États membres de l’UE doivent enfin se mettre d’accord sur une base commune pour l’imposition des sociétés multinationales. Avec un impôt unitaire (la directive européenne est appelée ACCIS), le bénéfice global d’une entreprise multinational doit être réparti entre les pays dans lesquels elle exerce son activité. Chaque État pourrait alors imposer la partie des bénéfices qui relève de son territoire. Ce qui conduit à stopper les transferts fictifs de bénéfices dans les paradis fiscaux.
  • Taux minimaux d’imposition à l’échelle de l’UE : afin d’éviter l’exploitation de taux d’imposition différents d’un pays de l’UE à l’autre, il est nécessaire de fixer des taux d’imposition minimaux sur les bénéfices des sociétés à l’échelle de l’UE.
  • Impôts progressifs sur le revenu, le patrimoine et les bénéfices : afin d’arrêter la concentration croissante de la richesse au profit d’une minorité, et la concentration des entreprises - en particulier dans l’économie numérique - la richesse, le revenu et les bénéfices doivent être imposés selon un barème tel que cette tendance s’inverse. Enfin l’introduction d’une taxe sur les transactions financières est nécessaire pour stopper la spéculation et la prédation financières.
  • Plus de transparence : les nombreux scandales de ces dernières années ont été découverts presque sans exception par des journalistes, des ONG et avec l’aide de lanceurs d’alerte. La transparence s’impose ! C’est pourquoi nous demandons des reporting publics pays par pays sur les activités des entreprises, des registres publics des entreprises, des rapports sur les stratégies fiscales des groupes d’entreprises, des échanges internationaux de données sur les comptes étrangers, etc.
  • Droit pénal fiscal : Les délits fiscaux ne sont plus des délits insignifiants. L’évasion fiscale ne doit pas en valoir la peine. C’est pourquoi nous demandons la fin de l’impunité fiscale par le renforcement du droit pénal fiscal. Les lois doivent également garantir la protection des lanceurs d’alerte.

La politique néolibérale de l’UE, qui repose sur le dogme de la concurrence, doit prendre fin. Pour lutter contre la fragmentation sociale et les inégalités croissantes, nous avons besoin de plus de coopération entre les États et les autorités européennes. Pour une Europe juste et écologique fondée sur la solidarité, nous avons besoin de ressources publiques - pour l’éducation, la santé, la lutte contre la pauvreté et le changement climatique. Ces ressources existent, mais elles sont aujourd’hui confisquées par une minorité de riches et par les multinationales. Nous sommes déterminés à mettre fin à la concurrence et à l’évasion fiscales pour que cesse l’injustice fiscale et sociale !

P.-S.

Cette fiche préparée pour les élections européennes de 2019 a été rédigée en collaboration avec Attac Allemagne.

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