Les travailleurs du nucléaire

mercredi 13 avril 2016, par Jacqueline Balvet

Dans la suite des recherches autour du projet Manhattan, Thomas Mancuso montrera dans les années 1970 les liens entre l’exposition à faible dose des travailleurs du site nucléaire d’Hanford [1] et la mortalité précoce par cancer chez ces travailleurs. Depuis ce jour, plus aucune information sur la santé des travailleurs du nucléaire.

Dans la suite des recherches autour du projet Manhattan, « Thomas Mancuso montrera dans les années 1970 les liens entre l’exposition à faible dose des travailleurs du site nucléaire d’Hanford et la mortalité précoce par cancer chez ces travailleurs. Les autorités, mécontentes de ses résultats, ne renouvelleront pas son contrat » [2].

Depuis ce jour, plus aucune information sur la santé des travailleurs du nucléaire n’a pu être mis à jour, y compris la question du suivi systématique des travailleurs exposés : la volonté a été et est toujours manifeste de vouloir « faire disparaître ceux qui ont été contaminés ».

Dans le domaine du nucléaire, comme dans bien d’autres on est dans une situation évidente de « corruption de la science par les multinationales ».

Pour le nucléaire, un des secteurs avec la chimie qui présente le plus de risques pour la santé des salariés, « on sous-traite les risques. La situation est simple : les entreprises considèrent que, à partir du moment où une activité est sous-traitée, la gestion des risques qui y est liée ne relève plus de leur responsabilité mais de celle de l’entreprise sous-traitante » [3].

Dans le secteur du nucléaire en France, il y a trois niveaux de salariés :

  • les travailleurs statutaires, ceux qui ont un statut favorable, s’occupent du contrôle et de la préparation
  • les travailleurs de la sous-traitance les moins exposés, s’occupent de la sûreté
  • les travailleurs de la sous-traitance les plus exposés s’occupent de la décontamination, du nettoyage, du tri : cette catégorie correspond à des travailleurs très précaires car, à cause de la contamination, ils ont des contrats très courts et mobiles : cette dernière spécificité permet de déresponsabiliser l’entreprise principale EDF, d’effacer les traces des expositions, et de diluer l’origine de la contamination, vu la mobilité des travailleurs exposés à des situations multiples.

Les travailleurs de la sous-traitance représentent en France 25 à 30 000 personnes.

Rappelons que les 500 000 à 1 million de « liquidateurs » à Tchernobyl, tous morts ou très malades, ont été exclus des statistiques de la catastrophe.

Dans les années 2000, plusieurs études chez les travailleurs statutaires ont été mises en place dont une étude européenne par le Centre international contre le cancer (CIRC) : en ont été exclus les mineurs qui extraient l’uranium, les travailleurs qui gèrent les déchets, ceux qui s’occupent du transport, les militaires victimes des essais nucléaires. Malgré toutes ces précautions, les résultats ont été accablants avec un risque de décès par cancer multiplié par 2 ou 3 [4].

Pour toutes ces raisons, il est essentiel de briser l’invisibilité de ces travailleurs et que les responsables soient mis eu banc des accusés.

Les situations des travailleurs ne sont pas meilleures dans les autres pays

En Corée, les travailleurs qui s’occupent de la sûreté sont en emploi direct avec l’entreprise, et sont syndiqués à 80 %, les autres, près de 40 %, sont en sous-traitance, contrats précaires, avec moins d’allocations et des heures supplémentaires selon la nécessité de l’entreprise

Au Japon, à Fukushima, aucune amélioration des conditions de travail pour les décontamineurs : ils travaillent 9 h par jour et retirent leur masque, pour ceux qui en ont, pour manger, fumer… Pour ceux qui font le tri des déchets ; l’alarme sonne souvent. Il n’y a pas de congés payés, ils sont mis à disposition de l’entreprise, le suivi des doses est inscrit dans un cahier de l’entreprise, l’État ne compile pas ces données. Il n’y a pas de syndicat.

En Ukraine, tout est contrôlé par l’État, le nucléaire est secret d’État, les travailleurs ont une formation, ce qui permet à l’État de se déresponsabiliser face à tout accident « il était formé ! ».

Lors de la catastrophe de Tchernobyl, où ont été mobilisés militaires et civils soviétiques dont ukrainiens et biélorusses, les liquidateurs reconnus ont eu droit à un traitement. Mais certaines maladies ont été considérées comme des maladies mentales, la phobie de la radiation, et n’ont pas été prises en charge.

En France, le taux de syndicalisation chez les travailleurs de la sous-traitance est faible car ils subissent la mise en concurrence et le chantage à l’emploi.

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