Comme nous l’avons exprimé, dès le mois de juin 2015 et depuis à plusieurs reprises, une bonne partie des sponsors de la COP 21 ne sont pas climato-compatibles. La majorité des entreprises choisies émettent massivement des gaz à effet de serre, responsables du changement climatique, ou tirent leurs profits d’activités dépendant de secteurs et d’investissements fortement carbonés : EDF et Engie dont les émissions provoquées par leurs centrales à charbon sont équivalentes à près de la moitié des émissions de la France [2], Air France qui est opposée à la réduction des émissions dans le secteur de l’aviation, Renault-Nissan qui fabrique des automobiles extrêmement polluants, Suez Environnement qui est connue pour sa participation au lobby pro-gaz de schiste français [3].
En contradiction avec ses propres engagements [4], le secrétariat général de la COP 21 n’a pas rendu public les conventions signées avec les entreprises privées. Nous avons pu consulter des notes internes du Secrétariat général de la COP 21 et nous sommes en mesure de révéler le montant des contributions de 31 des sponsors privés choisis par le gouvernement, soit près de 60 % des sponsors qui sont aujourd’hui annoncés sur le site officiel [5] de la COP 21.
Voici les principales informations :
- le total de ces contributions représentent environ 16,9 millions d’euros, soit à peine 10 % du budget total, un montant très éloigné des 20 % escomptés ;
- la contribution moyenne est de 547 000 euros, avec des contributions extrêmement variables allant d’à peine 80 000 euros (Puma) à 3 millions d’euros (La Poste).
- les deux secteurs qui ont le plus contribué sont le secteur de l’énergie (et notamment fossile) et le secteur des transports, avec une somme avoisinant les 3,9 millions d’euros chacun.
- les plus gros contributeurs sont des entreprises dans lesquelles l’État est un actionnaire majoritaire ou très significatif : EDF, ERDF, Renault, le STIP et La Poste sont les seules structures à avoir contribué à hauteur de plus d’un million d’euros.
- des multinationales d’envergure mondiale comme Google, Axa, Carrefour, BNP, Sanofi, sont devenues sponsors de la COP 21 pour de faibles montants, moins de 250 000 euros.
- hormis la BNP, le secteur bancaire est peu représenté ; selon le secrétariat, c’est en raison des « fortes pressions de certaines ONG pour mener une politique de désinvestissement dans certains projets miniers, et notamment charbonniers » qui amènent le secteur à « craindre de se heurter à des réactions hostiles en cas de trop grande visibilité au sein de la COP ».
Nous avons également appris que de très nombreuses entreprises – nous en avons compté plus de 75 – ont refusé d’être sponsors de la COP 21, parmi lesquelles :
- les assureurs et banques AG2R, BPCE, HSBC, Allianz, Crédit Suisse, Deutsche Bank, Crédit agricole, American Express, Rotschild, Groupama,
- les bétonneurs Eiffage, Vinci, SPIE, Bouygues,
- les géants des NTIC tels que Microsoft, IBM, Apple, Nokia, Free,
- les géants de la distribution alimentaire Auchan, Casino, Pernod Ricard, Unilever, Danone,
- ou encore les industriels Lafarge, Veolia ou Airbus, ou encore Vivendi et Avril.
Le gouvernement offre dont sur un plateau et à très bon prix la possibilité à des multinationales climaticides de verdir leur image alors que l’intérêt général aurait nécessité de ne pas polluer les négociations sur le changement climatique avec les intérêts particuliers que ces entreprises représentent, afin de ne pas créer de doute, au sein de l’opinion publique, sur la sincérité du contenu et du résultat des négociations. De la même manière qu’on ne confierait pas le financement d’une conférence internationale contre le tabagisme aux cigarettiers, nous dénonçons la décision du gouvernement d’avoir confié le financement de la COP 21 à des champions de la pollution. Nous exigeons par ailleurs que le gouvernement et le secrétariat général de la COP 21 publient immédiatement l’ensemble des conventions signées avec les sponsors privés, comme il s’y était engagé, et afin de respecter les plus simples et élémentaires exigences de transparence en la matière. L’État d’urgence climatique impose de mettre au clair les liens entre le secteur privé et les espaces de construction des politiques publiques en matière de lutte contre les dérèglements climatiques.