Déclaration du réseau des ATTAC en Europe sur l’apartheid vaccinal

mardi 12 octobre 2021, par Collectif

L’apartheid vaccinal démontre une nouvelle fois qu’il nous faut changer de système économique, là, maintenant. Nous nous engageons à résister aux politiques scandaleuses mises en place par les gouvernements européens.

Il n’y a pas de meilleur symbole de la division qui plane sur le monde contemporain que l’inégalité extrême dans l’accès à des vaccins anti-Covid-19. À ce jour, 75 % des vaccins ont été administrés dans seulement dix pays. Alors que les gouvernements européens les plus riches ont achetés des doses au-delà de ce dont ils ont besoin, beaucoup de pays n’ont pas encore pu vacciner les membres les plus vulnérables de leur population. Les pays à bas revenu n’ont pu vacciner que 0,5 % de leur population.

Big Pharma se vante de pouvoir produire 12 milliards de doses en 2021 et les pays européens achètent des troisièmes doses, mais dans le même temps, le mécanisme de distribution internationale Covax se retrouve avec un déficit d’un demi-milliard de doses. Cette inégalité ne peut être compensée par des actes de charité. Ce qu’il faut pour mettre un terme à ce scandale, c’est une action politique.

Au cœur du problème, nous trouvons le pouvoir monopolistique accordé par notre économie mondiale aux grandes entreprises et aux spéculateurs. Alors que la majorité des vaccins existants ont été mis au point grâce à de l’argent public, ils se retrouvent dans les mains du privé et c’est Big Pharma et ses soutiens financiers qui vont en engranger les bénéfices pendant des décennies. Les pays et les usines qui souhaiteraient fabriquer des vaccins n’en ont pas le droit. La collaboration et la transparence qui devraient caractériser la production de connaissance médicale sont remplacées par le secret et une concurrence à couteaux tirés.

Depuis plus d’un an, les pays du Sud Global demandent la suspension des règles régissant les brevets relatifs aux vaccins, médicaments et équipement médical anti-CoViD, bref, la suspension des règles ADPIC. Or un groupe de riches pays européens – surtout l’Allemagne, le Royaume Uni et la Suisse – bloquent leur proposition. En d’autres termes, ces pays qui ont accumulé des stocks de vaccins empêchent les pays qui n’en ont presque pas de produire les leurs. Sur quelle logique ? Les bénéfices des multinationales les plus riches au monde pèsent plus lourd dans notre économie mondiale que le droit à la vie des populations d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine.

Si rien n’est fait contre l’inégalité vaccinale, ça ne va pas seulement coûter des millions de vie supplémentaires et mettre en péril la reprise en main de nos existences, cela va également renforcer les inégalités pour au moins une génération.

Les monopoles, crées par le fonctionnement du commerce mondial, ont fait de Big Pharma un des secteurs les plus financiarisés de notre économie. Loin de susciter les innovations, ce système encourage les multinationales à consacrer l’argent disponible au rachat d’actions et au paiement de dividendes plutôt qu’à la recherche et au développement. Il nous amène au point où les antibiotiques, sur lesquels repose la médecine moderne, n’agiront plus et où la recherche sur de nombreuses maladies affectant les plus populations les plus pauvres est entravée. Les règles de propriété intellectuelle sont également responsables du fait que notre système alimentaire est contrôlé par une poignée de multinationales dont le pouvoir érode notre démocratie. Et elles vont rendre notre lutte contre le dérèglement climatique d’autant plus difficile que les nouvelles technologies sont utilisées pour maximiser des profits et pas partagées pour le bien commun.

Attac a été créée pour combattre le pouvoir croissant de la finance et des grandes entreprises sur notre société. L’économie mondiale fait passer les bénéfices et l’extraction avant les vies et le bien-être des populations et avant notre planète. Avec quel résultat ? Des niveaux vertigineux d’inégalité, des poches de misère totale à côté de richesses sans précédent, ce qui entraîne un effondrement social, politique et environnemental. Les règles de propriété intellectuelle renforcent un système financier dévoyé que nous n’avons cessé de mettre en cause, et instaurent une forme de capitalisme monopolistique incompatible avec l’exercice de la démocratie.

Nous ne pouvons accepter que les soins de santé soient régis par les attentes du marché.

Il faut changer le système

Nous soutiendrons les efforts visant à suspendre les brevets portant sur des médicaments et technologies en rapport avec la CoViD-19. Mais nous irons plus loin et exigerons des changements plus fondamentaux de l’économie mondiale. Ils comprennent :

  • une réforme radicale du système de droits de propriété intellectuelle afin de donner la priorité à un partage de connaissance et à la collaboration afin de promouvoir le bien public. À court terme, cela signifie aussi soutenir les programmes de transfert de technologie qui permettent de ne pas dépendre de multinationales ; suspendre de façon permanente les règles de propriété intellectuelle sur des technologies essentielles à la satisfaction de droits humains ; et utiliser, comme d ‘ailleurs prévu dans l’ADPIC, des licences obligatoires qui permettent de produire librement des techniques et médicaments sous brevet ;
  • la création partout dans le monde de capacités publiques et souveraines dans le domaine de la recherche et de la production pour briser l’étau où Big Pharma maintient le système mondial des soins de santé ;
  • un financement adéquat de l’Organisation mondiale de la Santé pour encourager les coopérations mondiales en matière de soins de santé, des coopérations qui viseraient explicitement les soins de santé en tant que droit et donneraient la priorité à la création de soins de santé publics et universels, accessibles à tous et de bonne qualité.

En tant qu’Européen·ne·s, nous estimons que le rôle joué par nos gouvernements dans l’accroissement des inégalités pendant la pandémie est scandaleux et rappelle les politiques racistes et coloniales utilisées pendant des siècles par beaucoup de nos pays. Nous nous engageons à résister à ces politiques et, par solidarité et en collaboration avec nos allié·e·s partout dans le monde, à créer une économie au service des gens.

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