Dans le cadre du semestre européen, les États adressent leurs programmes de stabilité à la Commission avant le 30 avril. Celle-ci les examine, publie ses propres prévisions en mai et présente au Conseil, début juin, des propositions de recommandations pour chaque État membre. Sur cette base, le Conseil adresse ses propres recommandations à chaque État membre fin juin ou début juillet. Malgré la clause dérogatoire générale du Pacte de stabilité et de croissance mise en œuvre au début de la crise sanitaire en mars 2020 et applicable jusqu’en 2022, la transmission d’un programme de stabilité reste nécessaire.
Le contenu du programme de stabilité transmis par la France à la Commission européenne et portant jusqu’en 2027 (soit la fin du prochain quinquennat) présenté en conseil des ministres le 14 avril a de quoi inquiéter. Certes, elles sont conformes aux déclarations du gouvernement et au cadre qu’il a fixé à la commission Arthuis. Les dépenses publiques représentaient 53,8 % du produit intérieur brut (PIB) en 2019 avant la crise, puis 61,3 % en 2020 du fait de l’effondrement de l’activité économique et des mesures d’aides mises en œuvre par l’action publique, elles baisseraient à 56 % en 2022 puis à 53,1 % en 2027. Le taux de prélèvements obligatoires rapportés au PIB serait globalement stable, il passerait de 43,5 % du PIB en 2021 à 43,7 % du PIB en 2027. En 5 ans, cette cure d’austérité est censée permettre un retour des déficits sous les 3 % du PIB en 2027. Ce programme est plus brutal que ce que préconise le rapport de la Commission Arthuis. Ce dernier n’envisage pas une baisse de la dette publique avant 2030 alors que le gouvernement s’engage sur une telle baisse dès 2026 (le ratio de dette rapportée au PIB étant censé passé de 118,3 % en 2025 à 118,2 % en 2026 puis à 117,7 % en 2027).
Pour Attac, si la commission Arthuis préconisait une austérité mal assumée qui prévoyait une baisse du taux d’endettement à partir de 2030, celle que prépare le gouvernement s’annonce encore plus brutale. Les « mesures de rupture » vantée par Emmanuel Macron en mars 2020 recelaient donc tout autre chose que celles promettant des « jours heureux ».
La période récente a mis en évidence le manque de moyens dans le secteur de la santé, le consentement à l’impôt s’affaiblit à cause d’une injustice fiscale croissante, les affaires d’évasion fiscales ne cessent de se succéder (avec la dernière en date, Openlux), il faut financer la transition écologique et les prévisions économiques font état d’une hausse du nombre de faillites et du chômage. En matière de politiques publiques, les enjeux majeurs ne manquent pas. Le programme proposé par le gouvernement aux instances européennes ne permettra pas de les relever. Pire, tout indique au contraire que l’obsession de la baisse de la dépense publique et le refus de procéder à une réforme fiscale visant à mieux répartir et redistribuer les richesses se traduiront pas une austérité très probablement plus brutale qu’après la crise de 2008. Un tel programme de stabilité signifierait des réformes profondément anti-sociales en matière de retraites, de pouvoir d’achat, de droits, de services publics et de qualité de vie.
Face à une telle orientation, Attac formule des propositions alternatives :
- une autre gestion de la dette publique et des propositions immédiatement applicables pour financer la « dette Covid » (voir la note du 2 février 2021 « Qui doit payer la dette Covid ? »)
- une réforme d’ensemble de la fiscalité afin de la rendre plus progressive, afin de financer l’action publique et de réduire les inégalités et une lutte résolue contre l’évasion et la fraude fiscales, ce qui passe, notamment, par la taxation unitaire et une véritable coopération internationale.
- une dépense publique permettant de financer l’action publique, la protection sociale et la transition écologique.